Etude

La pierre française moins chère que les étrangères, affirme une étude

Commandée « sans a priori » par le syndicat de la filière des pierres d’ornement pour la construction, une étude aboutit à la conclusion d’un prix systématiquement inférieur du matériau venu de France par rapport à la concurrence de la péninsule ibérique, de la Turquie et de Chine. Pas le prix d’achat, mais le coût global, surtout quand on intègre ceux d’ordre social. La profession va s’empresser de brandir l’argumentaire auprès des maîtres d’ouvrage publics.

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Fac?ace en pierre de Saint-Maximin, immeuble 52 Seven a? Paris par Architectures Raphae?l Gabrion et Rocamat
La pierre calcaire, dont la Bourgogne-Franche-Comté forme la première région d’extraction (19 % du total) est utilisée à 85 % dans le bâtiment.

C’est un grand chelem auquel cette équipe de France-là ne s’attendait pas. La filière nationale de la pierre naturelle pour la construction a cherché à comparer le plus objectivement et le plus précisément possible ses coûts, par rapport à ses concurrents venus de l’étranger, proche ou lointain. Son instance représentative, le Syndicat national des industries de roches ornementales et de construction (SNROC) a commandé, dans ce but, une étude à la Cellule économique de la construction de Bretagne, la région fief du granit. Le verdict de ce travail, dévoilé il y a quelques jours, est sans appel : « dans tous les cas de figure et pour tout type de pierre - granit, grès ou calcaire - nous sommes moins chers au cumul de tous les critères », rapporte Fabrice Descombes, président de l'association Pierre de Bourgogne, dont la région est la première productrice de pierre calcaire en France. Il dresse ce constat avec satisfaction, bien sûr, et une pointe de surprise : « Nous n’imaginions pas un résultat si univoque, et avec une telle ampleur », ajoute-t-il.

Car les écarts telles que présentés par cette étude sont conséquents : -28 % pour la France par rapport au Portugal, -35 % vis-à-vis de la Turquie et de la Chine, de -27 à -49 % pour l’Espagne (en hors taxes). La fourchette de ce dernier différentiel s’explique notamment, selon Fabrice Descombes, par le lieu d’extraction du pays voisin, selon qu’il se situe plus au nord ou au sud et génère par conséquence des coûts de transport plus ou moins élevés.

Car la leçon de ce travail comparatif vient rejoindre un constat maintes fois dressés par ailleurs : l’avantage, le produit français le prend une fois pris en compte les coûts environnementaux et sociétaux. Une fois de plus, le débat et les argumentaires portent sur la définition même du « coût » qui est retenue par les parties prenantes. En prix d’achat, la situation est tout autre.

L’étude détaille ainsi deux cas de figure : 5 000 m2 de pavés en granit et 2 000 m2 de dalles calcaires posées en Ile-de-France, selon que la pierre provienne de France (respectivement de Bretagne et de Bourgogne) ou de l’étranger. Pour le granit, le différentiel en défaveur de l’offre domestique dépasse 50 % en prix d’achat face au Portugal comme face à la Chine. Il se réduit à respectivement 46 % et 36 % après prise en compte du transport. Il reste encore substantiellement négatif une fois calculé l’impact environnemental, par la conversion en euros des émissions de CO2 selon la méthode du Centre technique de matériaux naturels de construction (CTMNC).

Recettes en retour pour les donneurs d’ordre

Ce sont les coûts « sociaux » collectifs qui font la bascule. L’étude choisit ici un périmètre large, dont l’étendue peut faire débat. Elle se place dans la posture des pouvoirs publics, pour calculer leur perte de TVA liée au non-achat de produits français, les allocations chômage à verser du fait de la non-création d’emplois sur le territoire national et, à l’inverse, le produit des charges salariales et patronales ainsi que des taxes sur les consommations intermédiaires pour le choix d’une offre nationale.

« La conclusion favorable repose la question des critères d’appels d’offres. En première lecture, les donneurs d’ordre seront tentés de choisir la matière importée. Mais en termes de coût final, ils seront perdants », avance Fabrice Descombes. Tout l’enjeu étant de convaincre de ce discours les décideurs et leurs concitoyens contribuables. « Pour 100 euros dépensés auprès d’offres françaises, 72 euros reviennent aux budgets des collectivités. Avec l’importé, c’est presque rien, il ne reste guère que la TVA », estime Fabrice Descombes.

La profession ne va, bien sûr, pas manquer de prendre son bâton de pèlerin avec, sous le bras, ce travail de la Cellule économique régionale de la construction (Cerc) qu’elle qualifie de « tout à fait indépendant et transparent ». « Toutes les données de nos compétiteurs importateurs sont connues : le prix rendu chantier, les coûts sociaux, les coûts de transport », poursuit le président de Pierre de Bourgogne. Il souligne que la collecte des informations, courant 2023, s’est déroulée dans une période de niveau de fret maritime assez bas en termes de pris, soit donc une configuration qui pouvait peser favorablement pour les étrangers et défavorablement pour le comparatif tricolore.

En 2020, selon les données Unicem retenues pour l’étude, la filière des « roches ornementales et de construction » totalisait 640 entreprises représentant un chiffre d’affaires de 525,4 millions d’euros, réalisé à 46 % dans le bâtiment, 42 % dans la voirie et 12 % dans le funéraire. Le granit étant davantage implanté dans le funéraire, la part du bâtiment et de la voirie se situe à 85 % et 14 % pour le calcaire.

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