Le reproche devenait lancinant : les prix d'architecture du Moniteur et d'AMC ne prennent pas suffisamment en considération le logement. Qu'à cela ne tienne ! Réuni par deux fois à l'Institut du monde arabe, à Paris Ve , le jury présidé par Paul Chemetov a remis l'Equerre d'argent 2019 à la résidence Julia-Bartet à Paris XIVe , de l'architecte Charles-Henri Tachon pour la RIVP. Un bâtiment de béton brut et bleuté, à la svelte silhouette, construit sur une parcelle grevée de contraintes, qui abrite également un centre de formation pour apprentis (CFA) et un local des Restos du cœur. « Un édifice élégant, saisissant de beauté, qui met en valeur la complexité du métier d'architecte et redonne de la fierté à son environnement », a relevé le jury. « Il est extrêmement réjouissant que l'Equerre soit attribuée à un bâtiment de logement social », a souligné Charles-Henri Tachon lors de la cérémonie.
Primée dans la catégorie « habitat », la résidence La Quadrata à Dijon (Côte-d'Or) comporte 40 logements sociaux modulables. Cette opération emmenée par l'architecte Sophie Delhay pour Grand Dijon Habitat est un projet expérimental, construit sur une combinatoire d'espaces non assignés, « qui s'intéresse davantage à l'habiter qu'à la façade et qui témoigne d'une grande humanité comme d'une grande rationalité », a jugé le jury.
La Première œuvre a mis en lumière l'agence Antoine Dufour Architectes pour l'atelier du maître-verrier Emmanuel Barrois à Brioude (Haute-Loire), une intervention humble et économe de moyens, sur d'anciennes halles ferroviaires. « Une réalisation frugale, qui démontre que l'ordinaire relève aussi du patrimoine ».

En « culture, jeunesse et sport », la récompense revient à l'agence Raum (lauréate en 2010 du prix de la Première œuvre) pour leur salle festive à Saint-Jean-de-Boiseau (Loire-Atlantique). Un bâtiment monolithique et virtuose, qui « calme le jeu » dans une marée pavillonnaire. Justesse des proportions et qualité de l'exécution ont été mentionnées pour cette « architecture contemporaine remarquable qui sait exister en dehors d'une grande métropole ».

Une même rigueur transparaît chez Christian Kerez, lauréat de la catégorie « activités » pour son immeuble de bureaux à Lyon (Rhône). Un édifice hiératique, « d'une grande cohérence » aux dires du jury qui a vu en lui « la réduction de l'architecture à la question structurelle ».
En « ouvrage d'art », la distinction revient à la passerelle imaginée comme un simple trait dans le paysage, lancée au-dessus d'un canal à Saint-Omer (Pas-de-Calais) par les architectes de l'agence DVVD : esprit de finesse autant que de géométrie sont ici à l'œuvre.

Enfin, un prix spécial du jury salue le travail de Marc Mimram sur le court Simonne-Mathieu de Roland-Garros à Paris (XVIe ), pour deux programmes hybridés, dans la transparence et la légèreté, avec des serres, « inscrites dans la grande tradition d'innovation du verre allié au métal. Un projet magnifique qui a su apaiser les polémiques nées dès ses commencements ».