Pourquoi ce rapport intermédiaire alors que les conclusions de la commission étaient attendues en septembre ?
Cette note d’étape était prévue comme la présentation d’un diagnostic partagé des 30 membres de la commission et une ébauche des propositions fiscales et financières. Car notre volonté est qu’elles puissent être prises en compte dès l’élaboration de la loi de finances pour 2022 et non simplement figurer comme simples « amendements Rebsamen ». Ce rapport compte 21 propositions issues du constat que depuis 3-4 ans l’acte de construire est dévalorisé par de nombreuses contraintes nouvelles.
Le refus de certains maires de ne pas accueillir de nouveaux habitants dans un espace déjà dense accélère la consommation de terres agricoles en les renvoyant hors de la ville. En même temps, depuis la suppression de la taxe d’habitation, les maires bâtisseurs sont pénalisés par les difficultés de financement des équipements nouveaux, écoles, crèches, gymnases etc. Pour 1 000 logements, une municipalité pouvait avant la réforme de la taxe d’habitation, espérer une ressource annuelle de 440 000 euros ; depuis elle est à 93 000 euros. »
Comment encourager les maires à construire de nouveaux logements ?
Il faut que les maires bâtisseurs et en particulier ceux qui construisent du logement social, puissent y trouver un intérêt financier et obtenir des compensations. C’est le sens d’un contrat local qui lierait le préfet aux élus, et définisse le type de logements, les secteurs géographiques et les moyens financiers. La commission propose d’encourager les maires par un bonus, qui serait une aide de l’Etat, lorsqu’ils dépassent l’objectif fixé dans le contrat local entre l’Etat et les collectivités.
La logique voudrait par ailleurs une plus grande cohérence budgétaire, avec une évolution de la part de la DGF (dotation globale de fonctionnement) avec l’augmentation de la population. L’encouragement à bâtir passe aussi par une modification du taux de compensation de la taxe foncière par l’Etat sur le foncier bâti. 3% sur 20-25 ans n’est pas attractif pour une commune. La commission propose de le porter à 100% sur 6 ans, une durée incitative pour mener une politique volontariste du logement.
Le rapport pointe aussi la mobilisation du foncier public pour la construction de logements sociaux. Quel est le problème ?
C’est ce qu’on appelle la décote Duflot [ du nom de la ministre qui la mise en place en 2013, ndlr ] qui devait permettre la construction de 110.000 logements entre 2012 et 2016 par la cession de terrains de l’Etat. D’abord un inventaire annuel devrait permettre d’avoir un état des lieux exact, ensuite, l’Etat ne joue pas toujours le jeu. Des propriétés, et j’ai des exemples dans ma ville, ne sont pas cédées en-dessous de leur valeur vénale, sans doute parce que la décote est coûteuse pour les finances publiques.
Si elles sont entendues, ces propositions ne vont-elles pas coûter cher à l’Etat ?
Je ne vous livre pas le montant de l’évaluation des mesures préconisées, elles vont faire l’objet d’un arbitrage avec Bercy. Celle qui coûtera le plus cher est le taux de compensation de la taxe foncière par l’Etat du foncier bâti. Mais cette mesure reste tenable financièrement pour l’Etat.
N’est-ce pas un énième rapport ?
Il n’y a pas que des propositions originales, mais certaines le sont comme une optimisation du foncier avec des parkings silos plutôt que de surface pour libérer de l’espace, pour construire des logements ou encore le redonner à la nature. Beaucoup parmi les 21 restent à travailler pour fluidifier les modalités d’autorisation. Mais rien n’est impossible car on a bien réussi à assouplir les règles d’urbanisme en Ile-de-France afin d’accélérer la construction des installations pour les Jeux Olympiques de 2024 !
On devrait aussi pouvoir parvenir à réduire les délais de révision des PLU. Il y a aussi des propositions de bon sens comme l’aide aux communes pour la dématérialisation de l’instruction des permis de construire ou assouplir les conditions de changement d’usage des locaux, de bureaux en logements. Le mérite de ce rapport est d’aborder de front les questions fiscales et financières. On ose proposer des moyens pour encourager l’acte de bâtir.
Quand le rapport définitif sera-t-il remis au Premier ministre ?
En deux temps, le 15 septembre pour les propositions financières afin de les inclure dans la préparation de la loi de finances 2022 puis le 15 octobre, pour tous les dispositifs de simplification réglementaires, l’idée étant que ceux-ci soient discutés dans le cadre de la loi 4D : déconcentration, décentralisation, différenciation, décomplexification qui vient d’être examinée par le Sénat.