C’est un véritable pas de géant qu’ont franchi les plates-formes collaboratives ces deux dernières années. « Nous qui étions présents sur 5 % des plus gros projets de construction, sommes désormais sollicités pour de petits immeubles de 4 étages », illustre Nicolas Delmas, directeur commercial de Prosys (solution Mezzoteam). Le constat est le même chez un autre grand éditeur de ces plates-formes Sword CTSpace (solution BuildOnline). « De 2000 à 2006, nous étions en phase de construction du marché, souligne Hakim Fagoul, directeur Sword CTSpace France. Puis les grands comptes ont eu besoin des plates-formes pour gérer des marchés complexes ; ils ont tiré le marché et, aujourd’hui, ce dernier est en forte demande de systèmes d’échanges de données informatisées (Sedi), pour des projets plus petits, de type collège ou lycée. »
Un réflexe pour nombre de maîtres d’ouvrage
Que de chemin parcouru pour ce qui était à l’origine une « simple » armoire à plans électronique ! A usage exclusivement interne, les plates-formes se contentaient de « stocker de l’information ». Progressivement, elles ont su accueillir de nouveaux documents (fichiers Excel, documents techniques…), qu’il a été possible d’organiser, de hiérarchiser et d’échanger, dans un premier temps en interne, puis par l’avènement d’Internet, avec l’extérieur. Aujourd’hui, et de l’avis de tous, ces plates-formes sont devenues un réflexe chez nombre de maîtres d’ouvrage, au moins sur les gros projets. « En marchés publics, 70 à 80 % des grands projets, supérieurs à 10 millions d’euros, sont soutenus pas une plate-forme collaborative », indique Hakim Fagoul.
Suivi de l’avancement du projet et au-delà
Ce que confirme Philippe Schutz, manager senior chez Algoé (conseil en management), en charge des projets urbains : « Nous l’utilisons sur une dizaine de sites en rénovation urbaine, indique-t-il. De notre côté, nous poussons toujours nos clients à se poser la question de son utilisation, surtout pour des projets à l’échelle du territoire, qui imposent aux participants de se coordonner sur le partage de l’information - ce qu’ils ont du mal à faire. »
Dans cette démarche, les maîtres d’ouvrage sont effectivement les principaux décisionnaires, mais ils ne sont pas forcément les principaux payeurs. « Même s’ils n’achètent notre solution que dans 20 à 30 % des cas, ils sont de forts prescripteurs, souligne Nicolas Delmas. En marché privé, ils peuvent demander à la maîtrise d’œuvre de s’équiper de la solution et de l’acheter. En marché public, ils l’achètent et l’imposent au maître d’œuvre dans le cadre du marché. »
Les intérêts de ce type de plates-formes sont nombreux, d’abord pour le maître d’ouvrage : elles lui permettent de suivre au jour le jour l’avancement de son projet, sans être tributaire des informations que voudra bien lui délivrer son maître d’œuvre. Une traçabilité qui évite de nombreux litiges. Mais l’intérêt dépasse le projet de construction. « Jusque-là, le maître d’œuvre devait lui remettre à la fin du projet le dossier d’ouvrage exécuté, avec l’ensemble des documents techniques permettant à l’ouvrage de fonctionner, explique Nicolas Delmas. Désormais, tous ces documents, à jour, sont disponibles au format électronique. Aussi, les maîtres d’ouvrage nous demandent de plus en plus souvent de prolonger la solution jusqu’à l’exploitation du bâtiment. »
La maîtrise d’œuvre quant à elle s’en sert comme d’un outil de pilotage de l’ensemble des entreprises intervenant sur le projet. En outre, les Sedi lui permettent d’éviter les problèmes d’envoi par mail de fichiers trop lourds. Enfin, elle peut ainsi se décharger des problèmes de sécurité des données sur la plate-forme qui jouera le rôle de coffre-fort électronique.
Partager l’information avec ses clients
Chauvet Ingénierie (Lyon, 70 personnes) a pour sa part opté pour un outil développé par le service informatique de son groupe, SNC Lavallin, il y a plusieurs années. « Il nous permet avant tout de partager de l’information avec nos clients au travers de tous types de documents : plans, spécifications, notes, planning, documents techniques, explique Pascal Lafond, directeur technique. Cela évite de les envoyer en pièce jointe, et de générer des copies. C’est d’autant plus intéressant que nous travaillons avec beaucoup de sous-traitants et de fournisseurs qui produisent des documents. »
Quant aux entreprises du secteur du BTP, si elles jouent le jeu, c’est bien souvent parce qu’elles y sont contraintes contractuellement. « L’accompagnement de ces entreprises, qui arrivent parfois en cours de projet, est primordial, souligne Hakim Fagoul, de Sword CTSpace. Nous les prenons en charge, les formons et les accompagnons jusqu’au bout. C’est en leur tenant la main qu’elles adhéreront à la solution. »
Efforts de simplification des éditeurs
Pour autant, les éditeurs de ces plates-formes soulignent aujourd’hui les efforts de simplification qui ont été menés. A titre d’exemple, Mezzoteam en est à sa troisième version en mode ASP. Désormais, sur de petits marchés, la mise en œuvre du système peut se faire en une journée, sans nécessiter aucun autre équipement qu’un ordinateur et une connexion à Internet.
En outre, un soin particulier a été apporté à la relation client, avec la mise en place de hot line ou encore de chefs de projets dédiés au suivi technique de chaque client. L’objectif, à court terme : amener les maîtres d’ouvrage à systématiser le recours aux plates-formes pour tous leurs projets, quelle qu’en soit la taille.
49 %
des maîtres d’ouvrage qui imposent l’utilisation deplates-formes collaboratives le font quel que soit le budget de l’ouvrage.
39 %
des maîtres d’ouvrage souhaiteraient voir se développer les plates-formes sécurisées d’échange et de partage de documents ou de plans.
58 %
des maîtres d’œuvre ne pourraient plus se passer aujourd’hui de l’usage d’Internet pour l’échange et le partage de plans et de données.
86 %
des entreprises de BTP et 84 % des maîtres d’œuvre qui utilisent ces plates-formes les jugent efficaces.