Lieu d'activité : le « rêve de pierre » de l'architecte

Sur le site de la carrière de Fontvieille, Gilles Perraudin a réalisé un harmonieux pavillon d'accueil en s'imposant des contraintes créatives.

Réservé aux abonnés
Image d'illustration de l'article
Eau, pierre, verre et bois cohabitent en un même lieu que la lumière magnifie.

Il y a plus de trente ans, l'architecte Gilles Perraudin remarquait, près du pont du Gard, un mur de pierres empilées à la va-vite par un ferrailleur soucieux de dissimuler ses épaves automobiles. Cette découverte est à l'origine de sa conversion à l'architecture de pierre, peu de temps après avoir reçu une mention spéciale à l'Equerre d'argent 1987 pour un bâtiment… tout en béton ! C'est aujourd'hui à une trentaine de kilomètres dudit pont du Gard qu'il a composé une ode à ce matériau, dont il est en France, depuis le début des années 1990, le redécouvreur et zélateur incontesté.

Cette ode prend la forme d'un pavillon d'accueil situé dans la mythique carrière de Fontvieille (Bouches-du-Rhône) d'où ont été extraits les blocs de calcaire des réalisations majeures de Fernand Pouillon, des logements à Meudon-la-Forêt, à Alger et sur le Vieux-Port à Marseille. Implantée au bord du précipice formé, au fil des ans, par l'extraction de la roche, comme une excroissance sur cette falaise artificielle, la construction, bien que très modeste - à peine 70 m² - prend place avec monumentalité dans le vaste paysage des Alpilles.

Coupe
Coupe Coupe

Pour Gilles Perraudin, qui fait partie de la dernière génération de maîtres d'œuvre ayant assimilé les règles de l'architecture classique, ce pavillon glissé entre deux bâtiments administratifs existants, attribués à Fernand Pouillon, matérialise un nouvel axe de symétrie reliant les trois édifices. Soulignée par les bassins qui précèdent l'entrée, cette composition axiale constitue selon lui un clin d'œil au Taj Mahal, célèbre mausolée du XVIIe siècle bâti en Inde à la mémoire de l'épouse de l'empereur. Loin d'être un monument funéraire, puisqu'elle accueille clients et visiteurs de la carrière, cette réalisation baptisée « Jardin d'Eve » rend toutefois hommage à une jeune paysagiste décédée, fille d'un ami ingénieur de Gilles Perraudin. « C'est un jardin de début du monde, avec de l'eau qui ruisselle entre les pierres, de la végétation qui s'immisce dans les interstices », métaphorise l'architecte.

Image d'illustration de l'article
PHOTO - 5653_306309_k4_k1_736742.jpg PHOTO - 5653_306309_k4_k1_736742.jpg

 

Micro-salons. Les dimensions des blocs de pierre (180 x 70 x 70 cm) qui couvrent le sol correspondent à celles des blocs tels qu'extraits. En émergent des éléments de mobilier, eux aussi en pierre, dont les hauteurs varient selon les fonctions (canapés, fontaines, jardinières), définissant ainsi trois micro-salons. Parmi ces émergences, domine la miniature d'une ziggurat babylonienne, autre référence biblique.

Ce « rêve de pierre » s'accompagne d'une règle stricte que s'est imposée l'architecte, ici inspiré par l'Oulipo, mouvement littéraire usant de la contrainte pour libérer l'écriture des automatismes de l'inconscient. Ainsi, pour bâtir les murs de cet « enclos du paradis », comme son créateur appelle ce showroom, la contrainte a consisté à tailler chaque bloc en deux parties égales, suivant une diagonale, de façon à créer des embrasures biaises pour les futures ouvertures. A partir de là, l'architecte s'est amusé à les empiler tout en les faisant pivoter les uns par rapport aux autres, dans toutes les directions, créant ainsi une combinatoire de percées aux formes des plus variées.

Image d'illustration de l'article
PHOTO - 5653_306309_k5_k1_736743.jpg PHOTO - 5653_306309_k5_k1_736743.jpg

Lumière psychédélique. Cette composition singulière, qui n'est pas sans évoquer les préceptes picturaux du Bauhaus, crée à l'intérieur du lieu une lumière naturellement psychédélique. Point de logiciel sophistiqué pour vérifier ici la stabilité des murs avec un tel assemblage. Mais une maquette, faite de morceaux de plâtre de la même densité que la pierre, et que Gilles Perraudin, également ingénieur, a manipulée dans tous les sens afin d'atteindre l'équilibre et l'harmonie recherchés.

Informations techniques

Maîtrise d'ouvrage : Carrières de Provence.

aîtrise d'œuvre : Atelier Architecture Perraudin.

Entreprises : Tonino (gros œuvre), Girard & Fils (ferronnerie).

Surface : 70 m² SP.

Montant des travaux : N.C.

Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Construction et talents
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires