MaPrimeRénov' : la réouverture repoussée et les nouvelles règles ne passent pas

Au lendemain des annonces gouvernementales au sujet du dispositif, la pilule est difficile à avaler pour les acteurs privés et publics de la rénovation énergétique du parc résidentiel. Les entreprises de travaux font exception.

Travaux de rénovation énergétique
Le réseau Cler dénonce un « abandon » par le gouvernement de la politique publique de rénovation énergétique des logements.

La suspension temporaire de MaPrimeRénov’ (MPR) par le gouvernement pour les rénovations d’ampleur, initialement prévue du 23 juin au 15 septembre, durera finalement jusqu’au 30 septembre. Au lendemain de cette annonce parmi d’autres de Valérie Létard, le 22 juillet, la plupart des professionnels engagés dans la rénovation énergétique des logements du parc privé, ciblé par l’Agence nationale de l’habitat (Anah) qui pilote le dispositif, expriment (une nouvelle fois) leur inquiétude et leur colère.

Le réseau Cler pointe, le 23 juillet, un « abandon » par le gouvernement de la politique publique de rénovation énergétique et de lutte contre la précarité énergétique. L’exécutif de François Bayrou, dont la mission principale est de réduire le déficit de l’Etat, « fait le choix de maintenir les aides pour un seul poste de travaux (changement de fenêtre, changement du système de chauffage...) », souligne l’association, qui compte aussi bien des entreprises comme le fournisseur d’électricité Enercoop que des collectivités comme la commune francilienne de Chaville.

« L'heure du sabotage »

« Cette décision ne profite ni à la performance énergétique des logements ni au confort des personnes qui y vivent. Bon nombre de locataires vont se retrouver prisonniers de cette situation et seront condamnés à rester dans des logements indécents », assure-t-il.

Dans un post sur LinkedIn, le directeur des études de la Fondation pour le logement des défavorisés (ex-Fondation Abbé Pierre), Manuel Domergue, trouve ce nouveau dispositif « terrifiant ». « Derrière les éléments de langage lénifiants, l'Etat sacrifie volontairement la rénovation énergétique des ménages modestes pour être sûr de faire des économies. (...) Après tant d'années de progrès bon an mal an pour encourager la rénovation performante accompagnée, c'est désormais l'heure du sabotage organisé par l'Etat lui-même ! »

« Système à bout de souffle »

En excluant les ménages aux revenus modestes, intermédiaires et aisés, « tourne ainsi le dos aux nombreuses personnes qui souhaitent se lancer dans un projet de rénovation énergétique pour baisser leurs consommations d’énergie, réduire le montant des factures, et améliorer leur confort », regrette le réseau.

Même son de cloche chez Arnaud Hacquart, président-fondateur de l’agence immobilière Imodirect : « Les nouvelles règles de MaPrimeRénov’ sont révélatrices d’un système à bout de souffle. On réduit les plafonds, on limite désormais le nombre de dossiers, on restreint l’accès aux seuls ménages les plus modestes — comme si tous les autres étaient nécessairement riches — et, surtout, on continue d’accumuler les interdictions sans en assumer les moyens. »

De son côté, HelloWatt regrette que depuis le 2 juin, et l’annonce dans la presse d’un coup d’arrêt de MPR, « particuliers comme professionnels subissent un manque de cap clair et des annonces souvent contradictoires » autour du dispositif. La société d’accompagnement des particuliers « alerte sur l’importance de garantir la stabilité du dispositif : sans visibilité durable, ce sont non seulement des ménages qui renonceront à leurs travaux, mais aussi une filière entière qui risque d’en payer le prix ».

Des aides divisées par deux

Son concurrent, le groupe Effy, dénonce entre autres « une jauge de dossiers dérisoire qui laisse présager » une nouvelle fermeture « dès octobre ». Une référence aux « 13 000 dossiers qui seront acceptés d’ici fin d’année (…), un seuil étonnement faible au regard des 65 000 dossiers déposés dans les semaines ayant précédé la fermeture du guichet ».

Il estime en outre que dans la nouvelle version de MPR proposée, le montant moyen des aides sera divisé par deux. Pour les chantiers permettant un saut de 3 classes ou plus, le ménage bénéficiaire ne pourra plus toucher 63 000€ maximum mais 32 000€, assure Effy.

« Une réouverture bienvenue »

A contre-courant, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) salue « des annonces encourageantes qui doivent se concrétiser pour les TPE » qu’elle représente.

Plusieurs bons points sont à souligner, selon la confédération qui a participé à la « concertation » autour de Valérie Létard. A commencer par la stabilité qui fait tant défaut aux entreprises du secteur : « les monogestes, qui n’ont pas subi de suspension, continueront d’être financés en l’état jusqu’à la fin 2025, puis en 2026 selon la volonté exprimée par la ministre » du Logement.

La Capeb cite également « la territorialisation accrue dans la mise en œuvre du dispositif (…) en faveur de la lutte contre les fraudes et de l’adaptation aux réalités du terrain ». Aux collectivités de jouer. Il en va de la décarbonation du parc résidentiel privé, mais aussi de la lutte contre la fraude, que le gouvernement dit combattre.

Du côté de la Fédération française du bâtiment (FFB), l'enthousiasme est mesuré. Dans un communiqué, la FFB estime que « cette réouverture est bienvenue, même si elle s'avère très partielle ». Et de conclure « le véritable combat reste celui de la loi de finances pour 2026 ».

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