Rexel, de l’électricité au pilotage

Le numéro deux du marché français de la distribution électrique avait vu venir le vent de la convergence des métiers du bâtiment. En faisant entrer des références de l’hydraulique thermique dans son catalogue il y a cinq ans, Rexel a fait un choix risqué mais pertinent.

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A rrivé en 2003 à la tête de Rexel France - et devenu depuis directeur Europe du Sud, centrale et de l’Est -, Patrick Berard a engagé son entreprise dans un certain nombre de changements. Le plus visible - et le plus connu - reste le développement d’une offre dite multi-énergie. D’un catalogue de matériel strictement électrique, le groupe est passé à un éventail de références plus large, y intégrant des solutions de chauffage à boucle d’eau chaude à partir de 2010. « Il a fallu une bonne année pour convaincre les acteurs du chauffage-ventilation-climatisation de la pertinence d’un tel rapprochement, et du potentiel de marché que représentait le “ thermique ” pour les électriciens, raconte le dirigeant. De Dietrich est le premier à avoir accepté de livrer l’une de nos agences, alors qu’il avait des positions bien établies au sein des grands négociants du sanitaire-chauffage. » Atlantic, Acova, Daikin, Toshiba et une vingtaine d’autres suivront.

Convergence des métiers

Si la notoriété de De Dietrich a fortement contribué à ce mimétisme, Patrick Berard assure que le rachat de Brossette par Cedeo en mars 2014 a aussi joué en sa faveur : « Ce rapprochement a mis certains fournisseurs en garde contre un phénomène de concentration trop prononcé. À leurs yeux, nous sommes devenus un marché complémentaire intéressant. » La morosité du bâtiment, avec le besoin urgent pour ces acteurs de trouver des relais de croissance, a fait le reste.

RT 2012, des pertes compensées

La démarche n’est plus un cas isolé. Le grand concurrent de Rexel, Sonepar, a fait également entrer la boucle d’eau chaude dans son catalogue. De la même manière, les acteurs du sanitaire-chauffage ont également ouvert leurs catalogues à la filière électricité. Ainsi, Tereva et Comafranc ont procédé par croissance externe, Algorel a créé un pôle dédié en janvier 2014. Quant au multispécialiste Socoda, il a réuni les branches sanitaire-chauffage et électricité sous une même direction achats en 2011.

Au sein du groupe Rexel, l’offre multi-énergie a également permis de limiter certains effets de la ré-glementation thermique (RT) 2012, qui avait, entre autres, signé l’arrêt de mort du marché du radiateur électrique et entraîné, pour le groupe, une perte de chiffre d’affaires d’environ 100 millions d’euros en deux ans. « Nous avons pu compenser le déclin de la demande de radiateurs électriques grâce aux ventes que nous avons réalisées sur le segment de l’hydraulique thermique », déclare Patrick Berard. Pour réussir ce pari risqué, d’intégrer des solutions éloignées de son métier historique, l’entreprise a recruté une trentaine de personnes issues du monde du chauffage et de la climatisation. Si l’on ajoute à ces profils spécialistes ceux aux compétences hybrides, quelque 120 personnes sont désormais dédiées à la commercialisation de ces solutions.

Certes, entre la culture des électriciens et celle des chauffagistes, il y a un monde. « Mais si l’eau et l’électricité n’ont jamais fait bon ménage, elles se croisent néanmoins dans l’usage. D’ailleurs, d’un point de vue technique, les logiques ne sont pas si lointaines, il suffit pour s’en apercevoir de comparer un plan de câblage à un calepinage », explique le directeur général, qui précise avoir « rapproché les deux univers grâce au pilotage ».

Le pari de la domotique

Ces trois dernières années, ce rapprochement a clairement bénéficié du marché croissant des objets connectés. En 2014, 30 % des ventes de Rexel en France ont été générées par ce type de solutions. Entre le segment résidentiel de la domotique et celui des gestions techniques du bâtiment (GTB) dans le tertiaire et l’industrie, le pilotage à distance des équipements représente encore un bon potentiel de développement pour le négoce de matériel électrique.

En termes de domotique, Patrick Berard se dit persuadé que l’avenir réserve de beaux jours au commerce B to B : « Notre métier de distributeur professionnel, qui intègre de fortes contraintes de sécurité, recèle des opportunités. Les installations de demain, qui utiliseront une tension de 230 V, ne pourront être posées que par des professionnels. »

Pour s’imposer sur ce marché, le groupe de distribution s’attache à concevoir des plans d’offre qui soient à la fois multimarques, complémentaires entre eux, tout en disposant, du même coup, d’une très grande profondeur de gammes chez deux ou trois marques clés. Leur conception est assurée par une cellule de « veille technologique avancée » de 50 personnes qui surveillent de près les innovations et les tendances du marché et vont jusqu’à tester les différentes « combinaisons » de produits avant de lancer les packages.

En revanche, c’est un produit « maison » siglé Rexel que le distributeur a choisi de commercialiser en 2014 pour piloter à distance les équipements de la maison, le contrôleur domotique Energeasy Connect, lequel gère le chauffage et l’eau, les ouvrants, l’éclairage, l’alarme... Reposant sur un standard ouvert, cette solution est donc compatible avec les équipements de ses fournisseurs dont les formats de protocoles ne sont pas « propriétaires ».

Auprès des industriels, Energeasy Connect se veut un moyen de se placer au cœur de leur métier et de les encourager à sortir de leurs territoires de marque. Bien sûr, cette forme de « concurrence » n’est pas très appréciée des fournis- seurs de Rexel qui proposent leur propres solutions de contrôle domotiques. Autant ces derniers voient plutôt d’un bon oeil le fait de concevoir des packages mul- timarques, autant le dévelop- pement d’un produit en MDD sur ce segment fait grincer des dents certains d’entre eux.

Se renforcer dans le diffus

Comme avec la suite logicielle Esabora, un ensemble d’outils de gestion à destination des électriciens racheté en novembre 2013, Rexel tâche avec la domotique de renforcer ses positions et de se démarquer sur le diffus. Avec la création de 3i en 2014, un service de préparation des chantiers domotique en agence, et le lancement de la certification 3i à l’intention des installateurs en mars 2015, le distributeur s’attache non seulement à faire monter en compétences sa clientèle, mais également à asseoir sa notoriété de marque auprès du grand public.

La deuxième pierre à l’édifice de la cible du diffus concerne le renforcement de son offre e-commerce. Alors que 70 % des ventes de Rexel sont encore conclus par téléphone, le groupe a lancé, au quatrième trimestre 2014, une nouvelle version, plus ergonomique, de son site Internet de ventes en ligne avec 2 millions de références disponibles. Elle y intègre désormais les solutions dites multi-énergies, jusqu’alors séparées.

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