Ouvert à la navigation en 1821, le canal Saint-Denis s’étire sur 7 km du bassin de la Villette au nord de Paris à la boucle de la Seine. Cet ouvrage napoléonien, axé sur la basilique Saint-Denis, parcourt un paysage marqué aujourd’hui par les infrastructures ferrées et routières (13 ouvrages franchissent le canal) et un tissu urbain hétérogène où les modestes pavillons de banlieue côtoient les sites industriels. Depuis 2001, cette voie d’eau recompose peu à peu sur sa rive droite une promenade jardinée qui a eu comme effet d’accélérer le renouvellement urbain de la Plaine Saint-Denis. De nouveaux quartiers d’habitat s’installent sur ses rives, impulsant un « retournement » de la ville sur le canal, cantonné jusqu’ici à un rôle utilitaire. Promeneurs et cyclistes ont également gagné une circulation douce qui s’étire à ce jour sur 4 km, et dont l’achèvement aux extrémités permettra d’assurer une liaison continue de Paris à la boucle de la Seine.
Accompagner la géométrie rigoureuse du canal
Les paysagistes Catherine Mosbach et David Besson-Girard ont considéré la totalité du site comme un jardin linéaire et non comme une simple voie de passage. Le projet posait cependant comme contrainte préalable forte d’être réalisé en plusieurs tranches étalées sur une dizaine d’années. Il traversait également trois communes. Pour garantir sa continuité dans le temps et dans l’espace, les paysagistes ont défini des règles simples. L’altimétrie de la berge a d’abord été calée avec minutie pour accompagner la géométrie rigoureuse du canal. Le chemin de halage, obligatoirement maintenu sur une largeur de 7,8 m, réservait une bande plutôt étroite (7 m de largeur en moyenne) pour faire évoluer ces berges en un parc public. Les paysagistes ont installé une banquette végétale, qui dessine un ourlet continu à la promenade minérale. Elle est composée d’une strate arbustive persistante (buis, fusains, ruscus…), de quelques plantes à fleurs et de bouquets d’arbres épars.
Les essences sont celles des parcs -ormes, charmes et frênes-, qui rompent avec les traditionnels alignements de peupliers et de platanes le long des canaux. Ces arbres ont été plantés à différentes forces (circonférences des troncs variables), afin que les raccords entre les différents tronçons paraissent naturels.
La promenade partagée le long de l’eau se divise en deux cheminements : un premier en béton granuleux, proche du macadam traditionnel, pour les piétons et les véhicules, et un second en béton lisse teinté pour les rollers et cyclistes. Pour multiplier les passages et les usages, des passe-pieds ont été également ménagés dans la banquette végétale, complétés par une contre-allée côté ville.
Traitement sur mesure aux franges de la ville
Comme le large couronnement du bord à quai, elle assure une limite à ce nouvel espace public sur berge. Entre les divers revêtements, les joints ont été laissés ouverts sur quelques centimètres pour accueillir une végétation spontanée, dans l’optique toujours de rompre avec le caractère minéral et technique du quai.
Les microjardins des éclusiers, aménagés sur l’aire technique, introduisent un rythme dans la promenade. Enclos pour des raisons de sécurité, ils sont traités avec la même palette végétale que la berge.
Ce parcours se confronte aussi à la complexité de la ville. L’articulation avec les quartiers traversés a fait l’objet d’un traitement adapté. Ce sont des squares de proximité greffés à la berge, des rampes d’accès aux maisons desservies depuis les quais, longuement discutées avec les associations de riverains, une ruelle réalisée en contrebas pour éviter le bouclage d’un quartier sur la berge.
Ailleurs, c’est le contournement d’un site de production, la percée d’une culée, ou encore un escalier qui remplace un terre-plein. L’éclairage prend le relais la nuit, et souligne par des lignes de néons colorées la sous-face des ponts. Tous ces raccords et événements nés des accidents urbains tissent des liens aux marges de la ville, et viennent enrichir cet aménagement linéaire.








