Sécurité incendie : une réglementation nationale remplacera la doctrine bois

Fruit de plus d'un an d'échanges, la nouvelle réglementation sur la sécurité incendie ne veut plus discriminer les matériaux. Le texte devrait être soumis à consultation courant mars pour une publication en juin prochain pour le volet relatif aux ERP. 

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Construction ossature bois
Les dispositions techniques détaillées prévoient de limiter la propagation latérale des flammes en façade comme le rayonnement thermique vers l'intérieur des bâtiments.

Le suspense était à son comble lors du Forum Bois Construction qui se tenait à Paris jusqu’au 28 février. En ce dernier jour, une partie des conférences était dédiée à la protection incendie des ouvrages biosourcés en Europe. C’est là que Jean-Michel Servant, délégué interministériel à la forêt, au bois et à ses usages,a pris la parole pour présenter l’état d’avancement de ses travaux et annoncer la fin des doctrines locales des pompiers en matière de sécurité incendie.

La doctrine bois des pompiers de Paris qui demande d’encapsuler systématiquement le matériau dans les constructions semble avoir fait long feu. A la place, plusieurs décrets et arrêtés sont attendus dès juin 2025 pour les établissements recevant du public (ERP) et pour les exigences fonctionnelles des solutions à effets équivalents (SEE). L’arrêté habitation est prévu pour la fin 2025, le tout devant entrer en vigueur en juin 2026.

Retour d'expérience sur l'incendie de Grésy-sur-Aix

Avant cela, les textes seront soumis à consultation, vraisemblablement dès ce mois de mars. Les contenus sur lesquels les professionnels de la construction bois pourront réagir sont inspirés des travaux pilotés depuis un an par le délégué interministériel.

Ils comprennent aussi treize dispositions techniques établies par le CSTB à partir de l’analyse de l’incendie de Grésy-sur-Aix (Savoie) le 11 août 2024. La résidence sociale du Clos Pré Rouge a pris feu et les flammes se sont propagées extrêmement rapidement aussi bien en façade, que vers l’intérieur des appartements et dans la charpente. Le flux thermique à l’intérieur du bâtiment a été suffisamment fort pour créer un embrasement des matériaux en place. « Or, cet ensemble qui date de 2012 avait été construit suivant toutes les dispositions réglementaires en vigueur. Il était donc emblématique des obligations à respecter. L’ouvrage bénéficiait même d’un surplus d’éléments en plâtre [un matériau incombustible, NDLR] pour des raisons acoustiques », indique Philippe Leblond, responsable de la division Risques ingénierie pour la sécurité des constructions (Risc) au CSTB.

Treize solutions constructives à la loupe

« L’analyse de ce sinistre a mis en lumière un certain nombres de vides réglementaires que nous avons entrepris de combler », reprend Jean-Michel Servant. Treize mesures sont donc prévues, avec une nouvelle logique : il ne s’agit plus de considérer l’ouvrage matériau par matériau, mais bien d’envisager des systèmes dans leur ensemble.

L’objectif est de protéger les personnes et de réduire les risques pour les pompiers, ce qui implique d’éviter la propagation des flammes et de limiter le rayonnement intense qui peut aller jusqu’à empêcher les hommes du feu d’intervenir.

Parmi les mesures détaillées lors de la conférence, notons que les sous-faces de toiture, lorsqu’elles sont en débord, devront être obligatoirement en matériau incombustible. Il en va de même pour les sous-faces de balcons. Pour les façades, il est possible de conserver les systèmes combustibles, à condition de lutter contre la propagation latérale des flammes [l’essai Lepir 2 ne traite que la propagation verticale, NDLR]. Une solution de recoupement de la lame d’air ou de création de zone tampon incombustible devra donc être prévue. Pour le côté intérieur des façades en bois, les protections devront éviter la propagation de la chaleur et des flammes.

Toutes les circulations verticales devront être sanctuarisées avec une durée de résistance garantie au feu. Les balcons filants devront être équipés de coupe-feu 30 min. Le texte introduira également un nouveau concept : celui de « Bâtiment à structure primaire combustible autorisée » (BSPCA), qui concernera les ouvrages à partir d’une certaine taille. Cette dernière n’est pas encore définie.

La réglementation continuera d'évoluer 

Présents dans la salle lors de cette annonce, les professionnels de la filière bois construction semblaient à la fois satisfaits, car leurs préconisations sont reprises, et dubitatifs sur la suite. La disparition de la notion de « masse combustible » semble rassurante. Cette notion qui s’exprime en MJ/m² correspond à la quantité de chaleur susceptible d’être dégagée par la totalité des matériaux combustibles d’une surface de référence. Pour le bâtiment de Grésy-sur-Aix, la masse combustible était de 900 j/m². Elle est traditionnellement de 2000 à 2500 j/m² pour le CLT et d’environ 200 j/m² pour le béton.

Enfin, point important, également annoncé par Jean-Michel Servant : « L’histoire n’est pas terminée, la réglementation continuera à évoluer et des revoyures seront prévues ». D’ores et déjà, la question des colonnes sèches, ces canalisations vides qui doivent permettre aux pompiers de se raccorder à une source d’eau pressurisée seront au menu des prochaines discussions. Il est aussi envisagé de revoir l’usage des systèmes d’extinction automatique à eau (SEAE) aussi appelé sprinklers pour les réserver aux étages les plus hauts, c’est-à-dire pour les planchers au-delà de 18 m.

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