En sortant de l’autoroute Paris-Nantes, une forme ovoïde, blanche et immaculée flotte sur le bocage angevin. Vaisseau spatial posé en douceur sur le paysage agricole ? Installation géante de land art dont la forme arrondie dialogue avec les courbures du relief ? L’objet n’est pas identifié d’emblée. Son échelle non plus. Il faut s’en approcher, en faire le tour, pour mesurer ses grandes dimensions : 500 m dans sa longueur et 400 dans sa largeur. Et pour en découvrir sa fonction : il s’agit bien d’un centre commercial, et pas des moindres puisqu’il abrite plus de 65000 m2 de surfaces commerciales (90000 m2 Shon) en tous genres dissimulées à l’intérieur d’un grand anneau à la carapace métallique blanche. Une première dans l’univers du commerce de périphérie qui, depuis des décennies, attire toutes les critiques urbanistiques et architecturales en installant ses surfaces de vente dans des « boîtes à chaussures » au milieu de marées de parkings, à l’entrée des villes.
« Une entrée de ville propre »
L’ancien maire d’Angers, président de la Communauté d’agglomération Angers Loire Métropole, Jean-Claude Antonini, qui a lancé le concours investisseurs-promoteurs-architectes en 2008, assume entièrement le développement du commerce de périphérie mais voulait faire ici, à l’extrémité ouest de l’agglomération sur la commune de Beaucouzé, « une entrée de ville propre ». Le promoteur, Philippe Journo, P-DG de la Compagnie de Phalsbourg, en est presque lyrique : « On peut faire du commerce populaire et de la grande distribution dans des bâtiments qui ne sont pas bas de gamme. C’est ce que nous avons démontré avec ce centre commercial qui ne pollue pas le paysage par ses enseignes et qui satisfait à toutes les exigences environnementales. » Beau et HQE. Quant aux architectes Vincent Parreira et Antonio Virga, ils saluent la volonté de la maîtrise d’ouvrage d’avoir tenu bon jusqu’au bout.
Gigantesque moucharabieh
L’unité de l’ensemble est fortement liée à son enveloppe blanche formée par plus de 20000 panneaux d’aluminium perforé. Galbée en partie haute, elle fait le tour de l’anneau et en constitue une façade extérieure pratiquement vierge d’enseigne ou de signalétique. Brillante et nacrée grâce à une finition thermolaquée vernie qui reflète la lumière et le paysage environnant, cette vêture permet aussi de dissimuler complètement la voie circulaire de livraison et les espaces de déchargement des camions à l’arrière des commerces. Les perforations sont de densité variable, augmentant avec la hauteur de la façade. Le soir, l’enveloppe rétroéclairée - les teintes varient du blanc au rouge en passant par le bleu - se transforme en un gigantesque moucharabieh.
À l’intérieur de l’anneau, on retrouve cette enveloppe en partie haute des façades des boutiques, où elle se prolonge horizontalement pour se transformer en auvent et abriter la déambulation des piétons devant les vitrines. Elle accompagne aussi les trois porches d’entrée monumentaux qui permettent d’accéder en voiture au cœur de l’anneau où se situe l’essentiel des places de stationnement : le parking, légèrement décaissé, est traité comme un paysage avec ses haies d’arbustes et ses arbres (érables, charmes, pins, chênes et saules pleureurs) renvoyant au bocage régional. Au centre de ce parking-jardin prend place le « village » des commerces de restauration, proposant une autre ambiance dans des bâtiments habillés de bois.