Cet été, les nageurs compulsifs, les amateurs de bronzage et autres grappes de gamins sont toujours aussi nombreux dans le centre aquatique livré en 2008 par Jean Nouvel, à l'interface du port et de la ville du Havre (Seine-Maritime). Si le succès des Bains des Docks a été immédiat et durable, les lieux ont toutefois vite pâti de nombreux défauts d'exécution.
Avec la dilatation due aux variations de température, les mosaïques en parois et au sol ont commencé à se décoller. Les plafonds en toile tendue diaphane microperforée ont empêché la maintenance des descentes d'eaux pluviales et des éclairages.
La quasi-absence de ventilation dans l'espace de balnéothérapie a entraîné des problèmes d'hygrométrie et de qualité de l'air, ainsi que la dégradation des enduits. L'isolation défectueuse de la toiture a accentué la condensation, tandis que les verrières plates à l'étanchéité défaillante ont entraîné d'abondantes infiltrations…
Travaux lourds. Après une première campagne de mise en sécurité en 2014, comprenant la réfection des mosaïques des « plages » et des vestiaires, la communauté urbaine dépose, fin 2019, une requête auprès du tribunal administratif de Rouen afin de régler le litige qui l'oppose aux Ateliers Jean Nouvel. Dans la foulée, elle décide d'engager des travaux plus lourds sans attendre le résultat du contentieux. Elle retient alors le cabinet d'ingénierie Jacques Van Tol (qui n'a pas répondu à nos sollicitations).
« Nous avons mené une étude juridique qui a estimé le risque vis-à-vis des Ateliers Jean Nouvel, mais notre objectif était de préserver au maximum cet équipement magnifique », insiste Mickaël Foirest, directeur énergie et maintenance des bâtiments à la métropole du Havre. En parallèle, la communauté urbaine attribue une délégation de service public à Prestalis, lequel désigne les architectes d'A26 (qui n'ont pas souhaité communiquer) pour rénover la zone de balnéothérapie et transformer l'accueil, le circuit des baigneurs, ainsi que les vestiaires et l'espace fitness.
Trois types de carrelage. En cours de chantier - entre fin 2022 et octobre 2023 -, le tribunal reconnaîtra les défauts et fera indemniser Le Havre Seine Métropole à hauteur de 3,5 M€. Aujourd'hui, les trois types de carrelage (pâte de verre blanche d'origine, grès cérame beige et mosaïque italienne striée) atténuent quelque peu la dimension abstraite initiale de cette relecture des thermes romains. Des faux plafonds permettent enfin aux techniciens d'intervenir, tandis que des gaines de ventilation préservent de la condensation l'espace de balnéothérapie. En toiture, un isolant en verre expansé remplace le polystyrène extrudé et un gravier clair recouvre l'ensemble de sa surface.
Les nouvelles verrières à double pente constituent le plus grand changement esthétique. Lors la conception de l'ouvrage, Jean Nouvel travaillait sur le projet - abandonné depuis - du « Centre de la mer et du développement durable », une tour panoramique qui devait se dresser de l'autre côté du bassin Paul-Vatine. Il avait alors dessiné la toiture de la piscine telle une cinquième façade, largement vitrée, visible depuis cet édifice de 120 m. Un parti pris architectural qui a été respecté.
Informations techniques
Maîtrise d'ouvrage : Ville du Havre, Codah, puis Le Havre Seine Métropole, Prestalis (gestionnaire).
Maîtrise d'œuvre : Ateliers Jean Nouvel (2008), Jacques Van Tol (rénovation en 2023), A26.
Surface : 8 600 m2 SU.
Montant des travaux : 18,5 M€ HT (2008) ; 6 M€ HT (2014) ; 7 M€ HT (2023) ; 1,5 M€ HT (Prestalis/A26).
