L’édifice financier de Bouygues reste solide, malgré les fissures apparues au 3e trimestre de l'an passé. Le géant du BTP, des télécoms et des médias a dévoilé ce jeudi 21 février 2019 des résultats en forte hausse pour 2018, éclipsant en grande partie les difficultés rencontrées dans les activités de construction au 3e trimestre. Colas faisait alors état de difficultés dans ses activités ferroviaires, tandis que Bouygues Energie et Services, peinait dans l’achèvement de trois projets menés au Royaume-Uni.
C’est donc un Martin Bouygues détendu qui a annoncé « une dynamique commerciale solide » aboutissant à un chiffre d’affaires de 35,5 Mds € en 2018, en hausse de 8% (+3% à périmètre constant). Grâce à un 4e trimestre dynamique et à un Bouygues Télécom en grande forme, les marges comme les résultats dépassent les attentes des analystes, avec un résultat opérationnel courant atteignant 1,5 Md € contre 1,4 Md € l’année précédente. Le résultat net part du groupe, lui, affiche 1,77 Md € (+229 M€ par rapport à 2017).
Chiffre d'affaires par activités, et chiffre d'affaires du groupe Bouygues :

© Groupe Bouygues, 21 février 2019
De quoi satisfaire les investisseurs et la bourse, rassurés tout autant par les résultats que par les perspectives : le carnet de commandes de Bouygues se hisse à un niveau record de 33,1 Mds € (+5% sur un an, et + 7% à change constant).
Les faits et chiffres à retenir :
► Le chiffre d'affaires des activités BTP (Bouygues Construction, Colas et Bouygues Immobilier) atteint 27,9 Mds € en 2018, soit une croissance de 8% (+3%) à périmètre constant.
► Les déconvenues du 3e trimestre ont été en partie gommées par l'élan des 3 derniers mois de l'année, pour Bouygues Construction et Colas, Bouygues Immobilier commençant à encaisser les effets du ralentissement du neuf et subissant "le décalage d'un projet en immobilier d'entreprise au premier semestre 2019".
Progression du résultat opérationnel courant des activités de construction au 4e trimestre 2018, sur un an :

© Groupe Bouygues, 21 février 2019
► Au final, le résultat opérationnel courant de ces activités s'établit à 915 M€ en 2018, en baisse de 28 M€.
► Le groupe a réalisé trois rachats importants l'an passé, à l'international : le suisse Alpiq ES chez Bouygues Construction et Colas; le canadien Miller McAsphalt chez Colas; et l'australien AW Edwards chez Bouygues Construction. Des emplettes qui, si elles ramènent un chiffre d'affaires additionnel conséquent, expliquent l'un des principaux objectifs de l'année : l'intégration de ces entreprises et de leurs collaborateurs. "Chez Bouygues Construction, nous devons intégrer près de 8000 personnes en tout", confie Philippe Bonnave, PDG de Bouygues Construction, au Moniteur. Malgré une trésorerie confortable (près de 10 Mds €), Bouygues ne devrait pas réaliser d'acquisition dans le secteur de la construction en 2019.
► Pour 2019, le groupe place l'année sous les signes de "recentrages stratégiques et d’adaptation, afin d’améliorer la rentabilité des
métiers de la construction", a annoncé Martin Bouygues. Colas travaille "au repositionnement de Colas Rail en France en diversifiant
la base de clients et en réduisant l’activité de fret." Colas vise notamment les marchés "systèmes" du Grand Paris Express.
Il procède également à "des cessions d’activités non stratégiques". Celle de Smac, annoncée le 14 février 2019 est la première sur la liste.
► Martin Bouygues s'est dit serein sur les perspectives à moyen - long terme dans les activités de construction : "nous sommes bien positionnés pour tirer parti de la demande en projets de construction complexes", a annoncé le PDG du groupe, citant notamment "le développement urbain, les éco-quartiers, les smart cities" ou, encore les smart roads.
Focus : un carnet de commandes bien garni et à large coloration internationale
Le marché remporté à Londres par Bouygues UK, annoncé ce 21 février 2019, jour de présentation des résultats annuels de la major, témoigne bien de la dynamique du groupe Bouygues : des trois titans français du BTP, elle demeure la plus internationale, comme l'illustrent à nouveau ses résultats 2018.
La croissance du chiffre d'affaires global de ses activités construction (+8% à 27,9 Mds €) repose en effet d'abord sur l'élan du "hors frontières", qui atteint 13,6 Mds € (+15%), soulignant le souffle plus court de la France, où les activités gonflent de 3%, à 14,35 Mds €.
L'année 2019 démarre sur le même rythme pour Bouygues. Le carnet de commandes du groupe, qui atteint 33,1 Mds € au 31 décembre 2018, repose en majorité sur l'international, qui pèse 61% du total en 2018 (contre 57% en 2017).
Dans le détail, 18,8 Mds € sont en effet programmés hors de France, soit un bond de 13% par rapport à l’an dernier (16,5 Mds €). Bouygues Construction (13,6 Mds € programmés contre 12 Mds € lors du précédent exercice) comme Colas (5,1 Mds € au 31 décembre 2018 contre 4,4 Mds € un an plus tôt) profitent des grands plans d'infrastructures mondiaux dans les pays matures.
Carnet de commandes des activités BTP et immobilier de Bouygues, au 31 décembre 2018 :

© Groupe Bouygues, 21 février 2019
Carnet de commandes à l'international des activités BTP et immobilier de Bouygues, au 31 décembre 2018 :

© Groupe Bouygues, 21 février 2019
En France, le carnet de commandes annoncé est en léger retrait de 1%, hors Axione. Une performance pas si anodine, si l’on considère que, comme Vinci, Bouygues n’a décroché aucun des grands marchés de génie civil du Grand Paris Express en 2018, notamment le 16-1 (remporté par Eiffage et Razel-Bec) et le 16-2 (dévolu à Salini allié à NGE).
Une tendance que la major du BTP espère bien corriger cette année. « Nous sommes candidats à tous les lots du Grand Paris Express », répète au Moniteur Philippe Bonnave, le PDG de Bouygues Construction. Le groupe reste allié à Soletanche Bachy pour concourir.