Conservatoire de musique de Paris Portzamparc réagit aux accusations de « malfaçons » portées à son encontre

Dans l’attente du jugement du Tribunal administratif de Paris qui devrait être prononcé fin juin, l’architecte Christian de Portzamparc s’explique, pour « Le Moniteur », sur la nature et l’étendue des désordres constatés sur le bâtiment du Conservatoire de la Cité de la musique (Paris XIXe).

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«Ahuri ! », « interloqué ! », l’architecte Christian de Portzamparc n’a pas de mot assez fort pour exprimer son dépit et sa colère. La raison ? une série d’articles qu’il estime « caricaturaux », publiés ces dernières semaines dans certains médias, au sujet des malfaçons apparues au Conservatoire national supérieur de musique et de danse (CNSMD) à la Cité de la musique (Paris XIXe)… Ces articles « à charge » le font en effet apparaître comme seul visé par la longue procédure en cours, alors même qu’aucune erreur de conception architecturale n’est retenue à son encontre et qu’il s’agit en fait d’une action en garantie décennale contre l’ensemble des constructeurs !

Affecté mais combatif, l’architecte tient aujourd’hui à faire valoir son point de vue après l’audience du 16 mai devant le Tribunal administratif (TA) de Paris. Un rappel des faits s’impose. Conçu et réalisé entre 1985 et 1990, le CNSMD constitue la partie ouest de la Cité de la musique, lauréate du Prix de l’Equerre d’argent en 1995. Une réalisation majeure qui a pesé dans l’attribution en 1994 du prestigieux Prix Pritzker à son auteur.

Pas d’erreur de conception architecturale. Si quelques désordres « malheureux » apparaissent en 1994, ceux-ci « très localisés, mais pris par tous avec sérieux, n’ont à aucun moment entravé le fonctionnement de cet établissement de 30 000 m2, avec ses 186 salles de musique où vivent et travaillent 1 700 personnes », tient à préciser Christian de Portzamparc. Ils concernaient, à titre d’exemple, des portes coupe-feu qui ne fermaient pas bien, le bris de quelques dalles de sol sur plots, un mur-rideau dont le profilé commençait à vriller, un bassin qui fuyait à cause d’un dispositif oublié lors de la réalisation, un carrelage fissuré en raison d’un mortier inadapté, etc. Tous ont aussitôt été réparés après expertises aux frais avancés du maître d’ouvrage, avant prise en charge par les assurances.

Des procédures ont été engagées par ce même maître d’ouvrage contre tous les acteurs, architecte compris. C’est la loi du genre : « L’architecte est sur chaque sujet, même lorsque cela n’est pas de sa compétence directe, parce que conception et réalisation forment un tout indissociable, précise un brin fataliste Christian de Portzamparc. Et les expertises menées n’ont pas reconnu de faute de conception architecturale. » « Il y a des malfaçons après de nombreux chantiers. Mon agence n’en a connu que très peu, ce que mon assureur, la Mutuelle des architectes français (MAF) vous confirmera », ajoute-t-il.

« Dramatisation ». Face à ces désordres, la direction technique du CNSMD disposait de plusieurs possibilités pour agir : demander réparation à l’entreprise directement, réclamer une expertise amiable et obtenir l’accord des parties, demander une expertise judiciaire en proposant aux assurances de s’en tenir aux conclusions de l’expert, enfin choisir la procédure la plus longue et la plus lourde, celle de l’expertise judiciaire et du Tribunal administratif. C’est cette dernière option qui a été retenue. Le jugement final est alors rendu au terme d’une longue recherche sur l’origine des désordres, les solutions à y apporter et l’évaluation du chiffrage qui s’y rapporte.

« Il y a eu là, peut-être, une volonté de dramatiser et de théâtraliser chaque désordre », estime encore Christian de Portzamparc, en pointant au passage le triste « état d’abandon » dans lequel est aujourd’hui laissé ce bâtiment, fruit de plusieurs années de travail « d’une ardeur totale » : garde-corps rouillés jamais repeints en dix-huit ans, façades jamais ravalées pendant le même laps de temps, bassin asséché dont l’étanchéité est désormais perforée par des plantes, etc. « La comparaison avec le bon entretien de l’école de danse de Nanterre ou de la Cité de la musique, deux bâtiments construits dans les mêmes années, avec les mêmes techniques et matériaux, est vraiment poignante à observer », soupire-t-il…

« Pleine confiance ».Les trois juges du TA étudient à présent le dossier et sont libres de suivre ou non les conclusions du Commissaire du gouvernement (CDG). Le jugement, qui devrait être rendu à la fin du mois, établira les responsabilités des parties mises en cause et les sommes à répartir éventuellement entre les assureurs. A titre indicatif, et selon le CDG, le coût global de réparation des désordres présentés par le Conservatoire s’élève à 2,70 millions d’euros (valeur 1999). La responsabilité de l’architecte y est engagée, en l’état des conclusions, à hauteur de 14 % du total des travaux de réparation.

« On est loin des sommes miro-bolantes avancées par certains médias », s’exclame-t-il ! Reste que cette cabale médiatique dirigée contre lui – et dont il confie peiner à comprendre les raisons ultimes – « lui occasionne un grave préjudice d’image et un préjudice économique certain ». Serein toutefois quant à l’issue de la procédure, l’architecte laisse désormais, « en pleine confiance », aux juges le soin de se prononcer.

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