72 000 ponts menacés par la corrosion des armatures, plus d’un train sur dix en retard… Le besoin d’entretien des infrastructures est patent – tout comme le manque de deniers pour y faire face. Un outil issu de la réforme des marchés publics entrée en vigueur le 1er avril pourrait donner un coup de main aux collectivités. Il s’agit du marché global de performance (art. 34 de l’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015) (1), auquel une table-ronde a été consacrée dans le cadre du Salon des maires. « C’est un marché public dérogatoire, car échappant à l’obligation d’allotissement, décrypte Pierre-Emeric Chabanne, délégué général de l’Institut de la gestion déléguée (IGD). La conception, la réalisation, l’entretien et la maintenance – mais pas le financement - sont confiés à un même opérateur. Des objectifs chiffrés de performance, mesurables, adaptés à chaque marché, sont fixés et déterminent la rémunération du cocontractant. » Le marché peut couvrir un champ plus ou moins large : le maître d’ouvrage peut y faire entrer, outre l’entretien des voiries, celui de l’éclairage public, des petits ouvrages d’art, des canalisations, de la signalisation, etc.
Objectiver les priorités
La Ville de Laval (Mayenne) s’est lancée dans l’aventure. « Nous avons 200 km de voirie et 400 km de trottoirs à entretenir, explique Xavier Dubourg, adjoint au maire. Le budget est contraint, donc chaque euro doit être investi au bon endroit. Et nous avons besoin d’outils pour expliquer à nos administrés nos choix. Lorsqu’on refait une voie, le quartier voisin demande immédiatement la même chose… ». Le diagnostic élaboré par la société Vectra, cocontractant de la Ville, comprend ainsi une cartographie du territoire réalisée avec des véhicules qui mesurent l’état de la surface et du dessous. Les voiries à rénover en priorité sont ainsi objectivées. Des stratégies d’entretien seront élaborées sur cette base.
Sanctuariser les budgets
L’Union des syndicats de l’industrie routière française (Usirf) s’est intéressée au sujet depuis plusieurs années. « Avec la baisse significative de l’activité routière depuis 2007-2008, résume Thierry Le Friant, président de la FRTP Midi-Pyrénées et de la commission marchés de l’Usirf, il est devenu plus que jamais nécessaire d’optimiser la dépense publique. Les élus attendent de nous que nous fassions mieux pour moins cher. Avec le marché global de performance, l’entreprise propose des solutions techniques qui permettent de réduire le coût global d’entretien et de maintenance. Autre avantage, ce contrat permet de sanctuariser les budgets consacré aux infrastructures pendant la durée du contrat » - en général, cinq à sept ans.
« Aujourd’hui, beaucoup de collectivités s’intéressent à ce nouvel outil mis à leur disposition ! », se réjouit Pierre-Emeric Chabanne (IGD). Invité à la tribune, Gérard Larra, maire de Carcassonne, n’a encore rien décidé. Mais la « simplicité » du contrat le séduit a priori. « Nous sommes actuellement en accord-cadre pour les travaux de voirie avec une dizaine de prestataires qu’il faut remettre en concurrence. C’est très lourd. Avoir un seul interlocuteur pendant plusieurs années m’intéresserait – et si en plus c’est moins cher… ! ».
Combiner régie et marché global
Une question agite toutefois les acteurs, celle du sort des personnels des collectivités chargés de l’entretien des voiries. « Il ne faut pas en effet que la collectivité paye deux fois, alerte Xavier Dubourg. La passation d’un marché global de performance doit s’accompagner d’une planification de l’organisation de la collectivité sur le moyen-long terme ». Mais le périmètre du contrat global est défini à la carte, tempère Pierre-Emeric Chabanne : « Le marché peut concerner une partie du réseau routier seulement, certains sites ou voies restant en régie directe ».







