Les barrages français vont-ils enfin sortir de l’impasse ? C’est en tout cas l’espoir suscité par l’annonce de François Bayrou le 28 août, selon laquelle « une étape importante a été franchie dans la résolution des précontentieux avec la Commission européenne sur l’hydroélectricité ». Bruxelles et Paris auraient ainsi trouvé un accord de principe pour mettre fin aux deux litiges qui les opposent depuis 2015 sur les concessions hydroélectriques.
Pour mémoire, la Commission conteste la position dominante d’EDF sur le marché français. Surtout, elle reproche à l’Etat de ne pas lancer les procédures de mise en concurrence des concessions arrivées à échéance (61 sur un total d’environ 340). Ces dernières continuent d’être exécutées par leur titulaire initial en application du mécanisme des « délais glissants », ce qui méconnaît la directive européenne de 2014 sur les concessions, estime Bruxelles.
Une proposition de loi
L’accord entre le gouvernement et la Commission européenne prévoit que soit réformée la gestion des installations hydroélectriques. Une proposition de loi devrait être déposée en ce sens par les députés Marie-Noëlle Battistel (Socialistes et apparentés) et Philippe Bolo (Les Démocrates), rapporteurs de la mission d’information parlementaire dédiée à l’hydroélectricité qui a rendu ses conclusions en 2025.
Le texte prévoira « le passage d’un régime de concession à un régime d’autorisation pour l’exploitation de l’énergie hydraulique », indique Matignon. Cette solution était présentée par la mission d’information parlementaire, qui a participé activement aux négociations avec Bruxelles, comme étant « la plus robuste » pour éviter la mise en concurrence. Les modalités du changement de régime ne sont pas encore connues. Matignon précise tout de même avoir obtenu « la possibilité de maintenir les exploitants en place », ce qui était le principal objectif du gouvernement.
A noter que les ouvrages hydroélectriques d’une puissance inférieure à 4500 kW sont d’ores et déjà assujettis à un régime d’autorisation.
Vente des barrages
Reste à savoir si le passage de la concession vers l’autorisation devra s’accompagner d’un transfert de la propriété des barrages, qui appartiennent actuellement à l’Etat. Dans son rapport, la mission parlementaire soulignait que la vente des ouvrages aux exploitants n’est pas nécessairement requise. Mais alors l’autorisation pourrait être requalifiée en contrat de la commande publique si elle met à la charge de son bénéficiaire des obligations trop importantes.
Sur le réseau social LinkedIn, la députée Marie-Noëlle Battistel fait savoir ce vendredi 29 août qu’elle veillera à ce que le changement de régime intervienne « sans transfert total de la propriété des ouvrages aujourd’hui détenus par l’Etat ».
La concession de la CNR maintenue
Par ailleurs, Matignon souligne que le changement de régime ne concernera pas les ouvrages exploités par la Compagnie nationale du Rhône (CNR, filiale d’Engie), qui font l’objet d’une concession unique, prolongée jusqu’en 2041 par une loi du 28 février 2022.
Ce sont donc principalement les barrages gérés par EDF, ainsi que par la Société hydroélectrique du Midi (filiale d’Engie), qui devraient faire l’objet d’autorisations à l’avenir.
Compensation
En contrepartie de la possibilité de maintenir les exploitants actuels, l’accord prévoit « la mise à disposition par EDF de six gigawatts de capacités hydroélectriques à des tiers ». Un moyen de satisfaire les opérateurs concurrents, qui pourront alors accéder à l’électricité produite par les barrages.
Le mécanisme de compensation mis en place devrait consister en la mise en vente de capacités virtuelles sous le contrôle de la Commission de régulation de l’énergie et via des enchères concurrentielles. La Direction générale de l’énergie et du climat, rattachée au ministère de la Transition écologique, a à cet effet conduit une consultation publique en mai et juin dernier pour évaluer « l’intérêt des acteurs du marché ».