C’est une nouvelle qui tombe à pic. Un mois après la publication du rapport de la mission sénatoriale qui pointait plusieurs lacunes dans la gestion des ponts en France, le ministère de la Transition écologique et solidaire a rendu publique la liste provisoire des ouvrages d’art concernés parla loi Didier du 7 juillet 2014.
Cette loi concerne les ponts qui permettent à une voie de communication, appartenant à une collectivité locale, de franchir une infrastructure de transports appartenant à l'Etat ou un de ses établissements publics. C'est par exemple le cas d'une route départementale surplombant une voie de la SNCF.
La répartition des charges financières inhérentes à l’entretien de ces structures est souvent floue, car plusieurs acteurs interviennent : d’une part, le gestionnaire de l’ouvrage, comme la collectivité, et, d’autre part, le propriétaire de la voie qui est franchie, en général un opérateur de transport, ferré, routier ou fluvial. Pour clarifier les rôles financiers de chacune des parties, des conventions sont le plus souvent réalisées.
Conflits dans la gestion financière
Sur le terrain, la gestion s’avère néanmoins très hétérogène. Dans leur rapport, les sénateurs de la mission d’information sur la sécurité des ponts en France dénonçaient ainsi un « véritable casse-tête » pour les gestionnaires, expliquant que ces ponts de franchissement font régulièrement « l’objet de conflits sur la question de la répartition des dépenses de surveillance et d’entretien ».
Auditionnée par le Sénat, l’Assemblée des départements de France avait indiqué que 35% des départements considèrent que les opérateurs, en particulier SNCF Réseau et VNF, « n’entretiennent pas les ouvrages à hauteur de ce qui était prévu dans le cadre de leur convention ».
Un inventaire indispensable
Le recensement prévu par la loi doit aider à clarifier les rôles respectifs de chacune des parties. A l’origine, cet état des lieux devait être réalisé pour le 1er juin 2018. « Nous accusons un peu de retard, mais c’est un travail considérable, et qui n’avait jamais été fait auparavant. Cet effort a demandé plus de trois années de travail », explique-t-on au ministère.
Le travail réalisé par les services de l’Etat dénombre ainsi 15 400 ouvrages de rétablissement de voies, dont 2 700 surplombent le réseau routier national, 8 300 les voies ferrées nationales et 4 400 le réseau géré par VNF.
Un recensement provisoire
Le travail réalisé contient toutefois encore des lacunes, puisqu’il ne concerne que les ouvrages déjà connus, et en grande majorité ceux qui ont déjà fait l’objet d’une convention. Or, tous les ponts de ce type ne sont pas encore sous l’objet d’un accord formel. Dans leur rapport publié en juin 2019, les sénateurs avaient ainsi estimé à 5 000 le nombre de pont surplombant des voies ferrées et pour lesquels « aucune convention de financement n’est en vigueur » et à 1 650 le nombre dont le statut est « indéterminé ».
« Cette liste est certainement encore incomplète, c’est pourquoi nous avons choisi de la mettre en consultation jusqu’à la fin de l’année. Il est en effet possible que des collectivités ne se soient pas encore signalées. Une fois que nous aurons les éléments, à ce moment-là seulement il nous sera possible de renégocier celles-ci avec les opérateurs », argumente-t-on au ministère.
La participation des collectivités territoriales à ce recensement ces prochains mois devrait en effet être décisive. « Les ponts listés ici sont ceux qui posent le moins de problèmes, car ils font l’objet d’un encadrement juridique. A présent, un travail d'inventaire pour les autres ouvrages reste à faire, et c’est la tâche la plus compliquée », prédit Christian Tridon, président du Syndicat national des entrepreneurs spécialistes de travaux de réparation et de renforcement des structures (Strres).