La loi Grenelle 2 prévoit-elle de nouvelles interdictions de publicité ?
Oui. Si depuis la loi du 29 décembre 1979 (ici) intégrée au Code de l’environnement, toute publicité hors agglomération - au sens des règlements relatifs à la circulation routière (article L. 581-7 du Code de l’environnement - ici) - est par principe interdite, progressivement et par exception, des préenseignes avaient peu à peu été autorisées pour indiquer la proximité d’une activité.
En réaction à la prolifération anarchique de ces préenseignes, la loi Grenelle 2, qui maintient l’interdiction de principe de la publicité hors agglomération, limite cette présignalisation, à compter du 13 juillet 2015, à certaines activités. Sont visées les activités en relation avec la fabrication ou la vente de produits du terroir par des entreprises locales, ainsi que les activités culturelles et les monuments historiques ouverts à la visite, et à titre temporaire les manifestations exceptionnelles à caractère culturel ou touristique (art. L. 581-19 (ici) et L. 581-20 (ici) du Code de l’environnement).
La loi impose en outre une signalisation "harmonisée", notion qui doit être précisée par décret.
La loi supprime également, dans leur principe, les zones de publicité élargie (« ZPE ») qui formalisaient des exceptions à l’interdiction de la publicité hors agglomération (art. L. 581-14 du Code de l’environnement - ici).
En agglomération, les « aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine » (« AMVAP ») ainsi que les « zones Natura 2000 » se voient interdire toute publicité dans les périmètres qu’elles recouvrent. La portée pratique de cette mesure est toutefois assez réduite dès lors que la publicité était en effet déjà interdite dans les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (« ZPPAUP ») que les AMVAP ont vocation à remplacer.
La loi offre-t-elle de nouvelles possibilités pour la publicité ?
Bien qu’introduites dans une loi portant engagement national pour l’environnement, les dispositions relatives à l’affichage publicitaire n’ont pas vocation à sanctuariser la protection du cadre de vie.
La loi Grenelle 2 organise même de nouvelles possibilités d’expression publicitaire (articles L. 581-7 à L. 581-9 du Code de l’environnement). Notamment, il est désormais possible d’installer des publicités dans l’enceinte des aéroports et des gares ferroviaires (art. L. 581-7 - ici). Ces nouvelles possibilités offrent un nouveau marché aux professionnels de la publicité extérieure qui vont désormais pouvoir installer des supports en bout de piste dans les aéroports bordant des axes routiers, ou encore à l’extérieur des gares TGV situées hors des villes.
Dans le même sens, selon les nouvelles dispositions de l’article L. 581-7 du Code de l’environnement - ici, la publicité peut être autorisée par le règlement local de publicité de l’autorité administrative compétente « à proximité immédiate des établissements de centres commerciaux exclusifs de toute habitation et situés hors agglomération, dans le respect de la qualité de vie et du paysage et des critères, en particulier relatifs à la densité, fixés par décret ».
Quoi de neuf pour les règlements locaux de publicité ?
- Concernant le contenu des règlements locaux
Revenant sur les dérogations multiples autorisées par les maires par rapport à la réglementation nationale, le Code de l’environnement modifié précise que les autorités locales ne peuvent que restreindre les règles nationales applicables tant à la publicité qu’aux enseignes, à l’exception de dérogations expressément prévues par la loi. Les dérogations ponctuelles pour les enseignes sont ainsi supprimées.
Le règlement local de publicité peut cependant déroger à certaines interdictions (secteurs sauvegardés, champ de visibilité des monuments historiques, etc.), tout en restant compatible avec certaines dispositions des chartes des parcs nationaux et parcs naturels régionaux.
- Concernant l’élaboration des règlements locaux
La loi modifie le régime du règlement local de publicité. Dorénavant, l’EPCI est l’autorité compétente de principe pour élaborer un règlement local de publicité adaptant les dispositions prévues par le Code de l’environnement, la commune n’intervenant plus que par défaut. Les règlements locaux de publicité pourront ainsi couvrir la totalité du territoire communal ou intercommunal (art. L. 581?14 du Code de l’environnement - ici).
La procédure d’élaboration, de révision et de modification des règlements, dans un souci de simplification et d’intégration de la publicité dans l’approche plus globale de l’aménagement de la ville, est désormais calquée sur celle des plans locaux d’urbanisme.
La modification des dispositions de l’article L. 111-1-4 du Code de l’urbanisme (ici) qui prévoient que « l’élaboration et l’approbation des dispositions d’urbanisme et du règlement local de publicité font l’objet d’une procédure unique et d’une même enquête publique » vont également dans ce sens.
. Concernant les recours contentieux
Deux mesures permettant de limiter les recours contentieux à l’encontre des règlements locaux de publicité ont été introduites par la loi Grenelle 2. D’abord, l’illégalité pour vice de forme ou de procédure d’un règlement local de publicité ne peut plus être invoquée par voie d’exception plus de six mois après l’entrée en vigueur du règlement, sauf si l’illégalité vise la méconnaissance ou la violation des règles de l’enquête publique (art. L. 581-14-1 alinéa 6 du Code de l’environnement).
Par ailleurs, obligation est faite au juge, qui annule ou suspend un règlement local de publicité, de se prononcer sur l’ensemble des moyens susceptibles de fonder sa décision (art. L. 581-14-1 alinéa 7 du Code de l’environnement - ici).
Quand s’appliquent ces nouvelles dispositions ?
Les règlements locaux de publicité en vigueur au 13 juillet 2010 restent applicables jusqu’à leur révision ou leur modification, et ce pour une durée maximale de dix ans à compter de cette date, soit au plus tard au 13 juillet 2020 (art. L. 581-14-3 du Code de l’environnement).
Les procédures d’élaboration ou de révision des règlements locaux de publicité qui avaient été engagées avant le 13 juillet 2010 pourront être menées à leur terme selon le régime antérieur, à condition toutefois que leur approbation intervienne avant le 14 juillet 2011 (art. 39 de la loi Grenelle 2 - ici).
S’agissant des publicités, enseignes et préenseignes régulièrement installées avant l’entrée en vigueur d’un règlement local de publicité avec lequel elles ne sont plus conformes, leur installation peut être maintenue pendant un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement local (art. L. 581-43 alinéa 2 du Code de l’environnement - ici).
La répression de la publicité illégale est-elle améliorée ?
Oui. Désormais l’autorité compétence en matière de répression est le préfet (art. L. 581-14-2 du Code de l’environnement - ici), et non plus le maire, sauf en présence d’un règlement local de publicité, auquel cas le maire sera compétent.
Le préfet dispose toutefois d’un pouvoir de substitution en cas de carence du maire qui n’aurait pas pris les mesures requises, dans le mois suivant l’invitation adressée par le préfet, le préfet pouvant procéder à l’exécution d’office des travaux nécessaires (art. L. 581-14-2 du Code de l’environnement).
La loi instaure également une procédure de suppression immédiate pour les publicités ou préenseignes installées irrégulièrement, au regard des dispositions de l’article L. 581-8 du Code de l’environnement, sur le domaine public (art. L. 581-29, alinéa 2 du Code de l’environnement - ici).
Enfin, le montant des amendes administratives et pénales a été doublé, passant respectivement de 750 à 1 500 euros et de 3 750 à 7 500 euros (art. L. 581-26 et L. 581-34 du Code de l’environnement). Il en va de même concernant les astreintes : en cas d’inexécution d’une mise en demeure, le montant de l’astreinte administrative est désormais de 200 euros par jour (contre 84,61 euros antérieurement), l’astreinte pénale passant quant à elle d’une fourchette de 7,5 à 75 euros à un montant compris entre 15 et 150 euros par jour (art. L. 581-30 et L. 581-36 du Code de l’environnement).
Des dispositions sont-elles prévues pour prévenir la pollution lumineuse ?
Oui. Face à l’absence de cadre légal dans le domaine de la pollution lumineuse, c’est-à-dire les émissions excessives de lumière artificielle, dues à l’éclairage public, privé et commercial, le Grenelle de l’environnement rappelle par l’article 41 de la loi Grenelle 1 (ici), la nécessité d’un cadre légal adapté.
L’article 73 de la loi Grenelle 2 (art. L. 583-1 et suivants du Code de l’environnement - ici) prévoit que désormais des prescriptions pourront être imposées aux exploitants ou utilisateurs de certaines installations lumineuses (à l’exclusion des installations classées et des installations nucléaires de base faisant déjà l’objet de polices administratives spécifiques), selon leur puissance lumineuse totale, les types d’application de l’éclairage, les zones d’implantation et les équipements mis en place. Un décret qui devrait intervenir prochainement (le projet date d’août 2010) précisera les conditions d’application de ces dispositions.
Afin de prendre en compte les caractéristiques des zones, le projet de décret divise le territoire en trois catégories dans lesquelles les exigences devront être croissantes : zones urbaines ou à urbaniser, zones agricoles, zones naturelles ou forestières.
Ces prescriptions seront fixées par arrêté du ministre en charge de l’Environnement, après réunion de l’ensemble des acteurs concernés, et pourront notamment porter sur les conditions d’implantation et de fonctionnement des points lumineux, les flux de lumière émis et leur répartition dans l’espace ainsi que l’efficacité lumineuse des sources utilisées.
Le ministre a la possibilité d’imposer des interdictions temporaires ou permanentes pour certaines installations lumineuses et de prévoir une adaptation aux circonstances locales.
L’effectivité de ces mesures est assurée par la mise en place d’une nouvelle police administrative.