Gazole non routier : les travaux publics toujours mobilisés

En région, les manifestations des entreprises de travaux publics pour protester contre la suppression du taux réduit de taxe sur le gazole non routier continuent pour « maintenir la pression ». Pendant ce temps, à Paris, la fédération nationale tente de trouver une solution avec le gouvernement pour que la mesure soit moins douloureuse.

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La suppression du tarif réduit de TICPE sur le gazole non routier pourrait coûter 500 millions d'euros au secteur des travaux publics, et même jusqu'à près de 700 millions en prenant en compte les impacts indirects.

« Ne brisons pas la reprise par un choc fiscal. » C’est avec ces mots que la délégation gardoise de la Fédération régionale des travaux publics (FRTP) d’Occitanie appelait ses entrepreneurs et ses salariés à manifester, le 15 novembre 2018. Au matin ce jour-là, une soixantaine de personnes s’étaient ainsi réunies devant la préfecture, à Nîmes, pour protester contre la suppression du taux réduit de TICPE sur le gazole non routier (GNR) à partir du 1er janvier 2019.

Cette mesure est apparue dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2019, sans que les conséquences sur les entreprises concernées ne soit imaginées, s’indignent de nombreux acteurs des TP. « La méthode est scandaleuse, continue d’ailleurs à dire Bruno Cavagné, président de la FNTP. Alors que la suppression doit rapporter environ un milliard d’euros à l’Etat, elle nous impacte à hauteur de 500 millions d’euros directement. Les entreprises ne seront pas capables d’absorber cette mesure. »

Terrassiers, routiers, PME en première ligne

Principales victimes dans le secteur : les terrassiers, les routiers et les PME. D’où la mobilisation en région. Le 5 novembre, la FRTP de Champagne-Ardenne avait organisé trois opérations escargots et deux barrages filtrants dans quatre départements. « Nos 250 entreprises devraient voir leurs marges baisser de 60%, alors qu’elles plafonnent déjà autour de 2% », expliquait alors au Moniteur Hervé Noël, président de la FRTP.

Il existe aussi « un risque de rupture d’égalité dans le cadre des marchés publics, poursuit-il. En effet, certaines entreprises du secteur agricole et paysager ayant une activité de travaux publics [notamment pour le transport de matériaux, NDLR], continueront à bénéficier du GNR ».

L'Unicem craint pour l'investissement et le recrutement

L’Union nationale des industries de carrières et matériaux de construction (Unicem) est également inquiète. Ce secteur, « composé à 80% de PME et TPE », estime que cette « augmentation brutale et soudaine du prix des carburant sera extrêmement lourde de conséquence, alors même qu’[il] se relève d’une crise sans précédent ».

Pour les producteurs de granulats, la mesure coûterait 150 millions d’euros, soit 4,5% de leur chiffre d’affaires. Ce qui aura « des effets immédiats sur les prévisions d’investissement et les programmes de recrutement de la fin de l’année, et plus encore de 2019 », prévient l’Unicem. Le surcoût pour les producteurs de minéraux industriels devrait être de 12 millions d’euros. Pour les producteurs de pierres naturelles, la hausse de leurs coûts de production avec l’interdiction du GNR s’établira entre 4% et 8%. Particulièrement soumis à la concurrence international, ils ne pourront pas la répercuter sur les clients, pense la fédération.

Accompagnement nécessaire

Travaux publics et industriels ont bien compris que le gouvernement ne comptait pas revenir sur cette mesure. Mais ils demandent un accompagnement et des solutions pour ne pas casser la dynamique actuelle, alors que les carnets de commande se remplissent et que la conjoncture est plus favorable. La FNTP travaille notamment avec le gouvernement pour que les indices prennent en compte les changements dès le 1er janvier 2019.

Cette éventualité permettrait de régler en partie le problème sur les nouveaux contrats. Mais cela impliquera par la même occasion une augmentation des prix des marchés. Alors que la commande publique [70% de l'activité des TP, NDLR] et l'investissement local retrouve quelques couleurs, les collectivités territoriales pourront-elles suivre dans un contexte budgétaire toujours contraint ? 

Contrats en cours et marchés privés

La tâche sera plus compliquée pour les contrats déjà signés. « Nous travaillons souvent sur des marchés pré-estimés par nos clients, souligne Antoine Kula, président de Pivetta BTP basée dans l’Oise. Si nous y ajoutons un surcoût, cela signifiera de nouvelles négociations ou de nouveaux appels d’offres. »

« Quid des marchés privés, se demande aussi Bernard Duhamel, président de la FRTP des Hauts-de-France ? Quelle ligne les chefs d’entreprise doivent-ils adopter pour les contrats qui seront signés d’ici à la fin de l’année ? »

En attendant d’aboutir et de trouver des solutions, la fédération nationale n’appelle pas à une mobilisation générale du secteur, mais laisse les régions agir comme elles l’entendent pour maintenir la pression. En revanche, Bruno Cavagné « déconseille de participer à la manifestation du 17 novembre » contre l’augmentation des prix du carburant. Car la problématique n’est pas tout à fait la même, et « nous risquons de brouiller le message ».

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