Franchir le pas de l’EDI
Les outils de l’échange de données informatisé (EDI) sont prêts. Encore peu utilisée par le négoce, l’information en ligne sera banalisée dans moins d’une génération.
Outre le catalogue électronique, évoqué dans un autre chapitre de ce dossier, la liaison du grossiste avec ses clients professionnels s’établira sous forme de devis électroniques, par exemple. « Ils permettront au négoce de fidéliser les clients et de se donner une valeur ajoutée par rapport aux GSB qui, pour une raison de retour sur investissement, n’offriront pas ce service aux artisans étant donné la part majoritaire du grand public dans leur clientèle », estime Pierre Georget, directeur général de GS1 France.
En matière de gestion interne, l’information électronique permettra de réduire tous les coûts administratifs sur les commandes, les bons de livraison et la facturation notamment. L’efficacité administrative des agences sera grandement améliorée. Tout comme l’efficacité logistique dont nous reparlerons. Comme le présage Gérard Gallo, directeur général de L’Echangeur (groupe Laser) : « D’ici à vingt ans, nous serons dans un monde de convergence de tous les systèmes qui seront communicants (Internet, téléphone, TV...) ».
En attendant, il faut bien reconnaître que l’EDI est un domaine encore en devenir dans le monde de la construction. « Tous les acteurs ont compris l’intérêt d’un meilleur partage de l’information mais, d’une part, celui-ci implique la mise en place de standards et un changement de rythme de l’information en interne ; d’autre part, les pré-requis informatiques impliquent des investissements... », reconnaît Pierre Georget.
De son côté, Valérie Marchand, responsable des secteurs non alimentaires à GS1 France, remarque qu’il n’y pas encore énormément d’échanges informatisés de données dans le négoce : « Le problème est d’abord culturel. Il faut avoir une sensibilité informatique et une sensibilité à la codification. Il y a peu de e-managers chez les négociants. De plus, les ventes en petites quantités peuvent apparaître comme un frein supplémentaire au développement de l’EDI ».
Du fait du nombre important de paramètres nécessaires et complexes à chiffrer, il est effectivement difficile aujourd’hui pour les négoces, notamment de petite taille, de mesurer le gain apporté par l’EDI. « Les remontées d’expériences montrent qu’il faut compter sur un retour sur investissement moyen de douze à dix-huit mois, estime Valérie Marchand. Or, dix-huit mois c’est le délai de visibilité maximale avouée par nombre de négociants... ». « En fait, poursuit la responsable de secteurs à GS1 France, les négociants ne sont pas sûrs de savoir ce qu’ils veulent mettre en place. Sur les catalogues électroniques, par exemple, il y a un attentisme général. Les fabricants, eux, attendent la volonté du négoce de bouger sur le sujet. »
Pourtant, les outils de l’EDI existent. Des solutions sont proposées à des prix raisonnables et les choses ont avancé dans la profession, notamment au niveau de la gestion des commandes et, en prémisse, de facturation. « C’est plus difficile pour l’avis d’expédition car les industriels reconnaissent eux-mêmes qu’il arrive que la commande change encore même quand la marchandise est dans le camion ! Mais cela viendra. On assiste à une professionnalisation des outils et des enseignes utilisent d’ores et déjà des ERP(1) ».
Rapprocher le produit et l’artisan
Parmi les outils d’information en ligne, ceux concernant les fonctions logistiques seront particulièrement importants pour la relation entre le grossiste et ses clients professionnels.
En matière de logistique, l’EDI, c’est tout un ensemble de messages et d’outils mobiles (téléphone portable, antennes satellites et ordinateurs embarqués sur les camions, etc.) permettant de savoir ce qui arrive, quand et où ? Des outils d’autant plus intéressants pour une profession nomade comme celle d’artisan du Bâtiment qui bouge de chantier en chantier. En interne, pour le grossiste, L’EDI servira aussi bien à la gestion des stocks qu’à celle des ressources humaines dans l’entrepôt, pour chaque livraison (savoir combien de personnes sont nécessaires pour décharger tel ou tel camion ?). « Aujourd’hui, tous les messages existent pour faire une gestion logistique très fine », assure Valérie Marchand.
Mais l’un des principaux intérêts de la logistique en ligne sera son efficacité dans la lutte contre les ruptures de stocks. On peut regarder, dans ce domaine, ce qui se fait déjà dans l’aéronautique, l’automobile ou la distribution alimentaire.
Dans ce secteur, le n° 1 mondial, l’Américain Walmart (5 000 magasins aux USA ; un CA équivalent au PIB de la Suisse) est aujourd’hui capable de détourner un camion de livraison de sa destination initiale pour réduire le temps de rupture d’un produit chez un client ; l’objectif étant de calculer les coûts de rupture et de choisir, si nécessaire, la moins chère entre deux ruptures.
Pour ce qui est de l’avenir dans le monde de la construction, Gérard Gallo développe l’argumentaire : « Dans vingt ans, quel que soit le consommateur ou le distributeur, la marchandise devra être disponible tout le temps, quel que soit le mode de distribution. Toutes les technologies existent d’ores et déjà pour permettre de satisfaire la volonté de disponibilité des produits, avec la rapidité en plus. Le grossiste sera le prestataire de service qui, à partir d’une banque de données et d’historiques clients, fera préventivement, à l’aide de messages d’alerte, la proposition de réassortiment à son client professionnel, tout en le conseillant sur les solutions produits les mieux adaptées à ses besoins ».
Ainsi, les nouveaux systèmes d’information aboutiront à l’interpénétration entre le négociant et ses clients. « Le grossiste servira de plus en plus de conseil et d’intégrateur, grâce à des banques de données CRM (management de la relation client) et des banques de données d’historiques, conclut le directeur général de L’Echangeur. Qui dit intégration entre fournisseur et client dit relations étroites, et plus une relation est étroite moins le prix est un élément constitutif du service... »