La Haute-Saône affiche-t-elle des avancées significatives en matière de nouvelle organisation territoriale ?
YVES KRATTINGER. Au sujet des pays, nous avançons vite et bien. Le département est entièrement couvert par cinq pays, dont deux interdépartementaux : le pays des Sept rivières, qui inclut deux cantons du Doubs, et le pays de l'aire urbaine Héricourt-Belfort-Montbéliard. Ils possèdent tous une convention d'objectifs, sont dotés d'un conseil de développement et finalisent la rédaction de leur charte.
Le conseil général n'est pas étranger à cette vitalité. Nous finançons l'emploi d'un animateur et la réalisation des études à hauteur de 10 %, somme qui s'ajoute à tous les autres cofinancements. Nous leur avons aussi versé une subvention de fonctionnement de 11 434 euros pour la première année. De plus, pour les mettre en réseau, nous accordons une subvention de 60 % du coût d'équipement informatique et des connexions, plafonnée à 2 500 euros. Mais surtout, les pays de Haute-Saône peuvent d'ores et déjà travailler sur des dossiers concrets dans le cadre d'une contractualisation (2002-2006) qui nous liera avant la fin d'année et qui s'élèvera à 20 euros par habitant.
Les pays, structures de réflexion et d'impulsion, doivent s'appuyer sur l'intercommunalité pour jouer pleinement leur rôle. Ne souffrez-vous pas d'un certain retard dans ce domaine ?
Ce qui était vrai l'an dernier ne l'est plus. Un exemple : dans le pays des Sept rivières, que je connais bien pour le présider, 92 % des communes sont regroupées en communauté de communes. Sans excès d'optimisme, je pense qu'en fin d'année, 73 % des communes du département seront en intercommunalité, soit 80 % de la population. L'implication personnelle du préfet n'est pas étrangère à ce revirement. Action 70, notre société d'économie mixte d'aménagement et de développement, teste un livret méthodologique pour aider les élus locaux à travailler ensemble pour hiérarchiser des projets communs et arrêter des choix.
Faites-vous assez d'efforts pour épauler la filière bois, l'une des plus importantes de France ?
Avec près de 20 % des emplois industriels, comment pourrait-il en être autrement ? Près de la moitié de notre territoire appartient à la forêt et nous accueillons les plus beaux fleurons français, voire européens, de cette industrie en première, deuxième et troisième transformation. Il y a quelques années, lorsqu'un responsable du groupe espagnol Tafisa voulait me voir à toute heure du jour et de la nuit pour savoir s'il devait investir plus de 99 millions d'euros dans sa filiale Isoroy (fabricant de panneaux à base de bois) à Lure, ce n'était pas pour me parler du taux de la taxe professionnelle, mais de desserte routière afin de collecter et d'acheminer à l'usine sa matière première. Nous avons su répondre présent et le site fait partie des unités les plus modernes d'Europe. En outre, le conseil général sait aussi prêcher pour sa propre chapelle, en favorisant la construction bois, lorsqu'il est maître d'ouvrage : collèges, casernes de pompiers et de gendarmerie. Nous cofinançons aussi un programme de valorisation du bois comme source énergie.
L'aménagement en deux fois deux voies de RN19 pour relier les autoroutes A31 et A36 vous permettra t-il de sortir de votre «réserve d'indiens» ?
Si je trouve ce terme un peu excessif, il est vrai que la Haute-Saône est à l'écart des grands axes de communication. Aussi, cette opération à long terme permettra de mieux irriguer notre territoire. Nous l'avons si bien compris que l'Etat, la région et le département mettent à quatre voies, pour 92,24 millions d'euros, 25 km de la départementale 438 entre Lure et Héricourt, tronçon qui deviendra partie intégrante du nouvel axe après échange de domanialité.
Reste que la problématique de notre désenclavement n'est pas seulement est-ouest, mais aussi nord-sud. Il s'agit de se raccrocher à des régions économiquement très dynamiques, comme l'Alsace, la Lorraine et bien sûr Rhône-Alpes. C'est pourquoi nous aménageons à quatre voies, pour 20 millions d'euros, 12 km de la départementale 64 entre Luxeuil-les-Bains et Lure. L'Etat réalisera une opération identique sur la nationale 57, entre Vesoul et Besançon. PROPOS RECUEILLIS
PHOTO : «Près de la moitié de notre territoire appartient à la forêt et nous accueillons les plus beaux fleurons français, voire européens, de l'industrie du bois»