L’architecte Augustin Rosenstiehl redécouvre le chasselas de Thomery : entre passion agricole et urbanisme innovant

Féru d'agriculture et d'urbanisme, l'architecte Augustin Rosenstiehl cultive, sur son temps libre, un raisin d'exception, un « or vert » qui a fait la fortune du village de Thomery au XIXe siècle.

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Dans sa longère de Thomery, l'architecte veille à l'entretien de ses vignes de chasselas doré, palissées sur l'un des 360 km de murs que compte ce village de Seine-et-Marne.

Incontestablement, cet architecte a un grain. Oui, mais de raisin, on va le comprendre. Augustin Rosenstiehl, né en 1973, grandit à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne), étudie l'ethnologie, puis séjourne longuement au Guatemala avant de s'embarquer pour des études d'architecture. Les chemins de traverse, on le sait, sont les plus féconds… Diplômé en 2003 de Paris-Malaquais, il se retrouve, en 2018, commissaire de l'exposition « Capital agricole -Chantiers pour une ville cultivée » au pavillon de l'Arsenal (Paris IVe ), laquelle explore les liens étroits entre production agricole et production urbaine, entre le cultivé et l'habité, entre la ville et le sol…

Nous y voilà ! La banlieue parisienne, avec ses champignonnières, ses murs à pêches, ses cressonnières, etc. se livre à lui dans toute sa (bio) diversité. Plus loin, à Thomery (Seine-et-Marne) - près de Fontainebleau -, bourgade célèbre pour avoir accueilli, à partir de 1859, la maison et l'atelier de la peintre animalière Rosa Bonheur (1822-1899), notre architecte découvre qu'y subsistent 360 km de murs palissés de vignes anciennes, le chasselas doré. Ce cépage a fait la fortune de la commune grâce à Baptiste Larpenteur, viticulteur du cru particulièrement inventif qui, en 1848, met au point un procédé pour conserver ce raisin royal, depuis la saison des vendanges jusqu'aux fêtes de Noël et au-delà. A la fin du XIXe siècle, Thomery en expédiera ainsi près de 1 000 tonnes par an dans toute la France, en Europe et jusqu'à la cour de Russie…

Un travail d'orfèvre

Désireux depuis longtemps de mettre la main à la pâte en trouvant une parcelle à cultiver en Ile-de-France, Augustin Rosenstiehl s'entiche de Thomery et de son chasselas, et y acquiert en 2020 une longère de 22 m, avec ses 2 000 m² de terrain et ses quatre grands murs à vignes qui ne demandent qu'à revivre. Le néogentleman farmer retape le tout et se forme auprès des derniers « anciens » qui perpétuent la tradition. « Je dois posséder aujourd'hui une trentaine de livres sur le sujet, raconte le cofondateur de Soa Architectes. Au début, j'y travaillais tout le temps. Dès que j'avais fini mon activité d'architecte, je filais dans mes vignes, du vendredi au dimanche soir, parce qu'il y a beaucoup de taille à effectuer, grain par grain, un travail d'orfèvre, et il faut ensacher chaque grappe. » Tout est en bio, travaillé avec des outils patinés par le temps et « simplement un peu de soufre ; ça reste dans la tradition ».

La récolte est bonne, 200 kg environ. « J'en consomme énormément, parce que c'est magique, on ne s'en écœure jamais, ça se mange avec tout, s'émerveille-t-il. C'est très bon, très agréable. J'en donne aussi à des copains qui font un peu de restauration. » Les quelques jours de canicule du début juillet ont été bénéfiques pour chasser l'humidité et éviter les maladies cryptogamiques. « Les grappes ne sont pas encore très fournies, mais je pense que le raisin sera très sucré cette année » On ne demande qu'à y croire. Et à y goûter !

Cet article fait partie du dossier "Jardin secret" de notre série de l'été "Miam".

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