La surtoiture qui crée un pic de fraîcheur sur le zinc parisien

Les jeunes architectes de Roofscapes testent pour la première fois leur concept de surtoiture végétalisée sur l'Académie du climat, un édifice municipal en plein centre de la capitale. Réalisée avec l’entreprise Meha construction bois et Topager, cette terrasse permettra d’observer l’évolution de la biodiversité et surtout, l’impact du dispositif sur la température sur et sous une couverture en zinc comme Paris en compte des dizaines de milliers.

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Depuis mai 2024, une plateforme végétalisée de 100 m² est installée sur un avant-toit couvert de zinc, au-dessus de la cour intérieure de l'Académie du climat, à Paris.

L’idée était là, le temps est venu d’en valider sa pertinence. En 2021, les architectes Olivier Faber, Tim Cousin et Eytan Levi créaient la start-up Roofscapes pour développer une solution pour lutter contre la surchauffe des toits, mais aussi des derniers étages des bâtiments en milieu urbain. Leur principe, simple en apparence, était de poser comme un parasol au sommet des immeubles des terrasses végétalisées y compris et même surtout, sur les traditionnelles couvertures de zinc en pentes comme une ville comme Paris en compte des dizaines de milliers. En mai 2024, la première de ces surtoitures a vu le jour, sur les hauteurs d’une institution de la Ville de Paris, l’Académie du climat installée dans l’ancienne mairie du IVe arrondissement. Une réalisation qui permet déjà au trio de vérifier son hypothèse.

Roofscapes, qui avait été lauréat de l’appel à projets de la Ville «Innovation et résilience 2022-2023», a pu développer ce projet avec les services municipaux. Un objectif que ses fondateurs visaient d’ailleurs dès le début. «Il était évident pour nous que nous avions besoin du partenariat de la Ville de Paris car notre idée soulève beaucoup de questions en matière de règles d'urbanisme. Par ailleurs, nous connaissions la politique parisienne en termes de végétalisation et d’adaptation du bâti au changement climatique, raconte Eytan Levi. Mais si notre concept intéressait les services, il ne rentrait dans aucune case, d’où la nécessité de créer une installation pilote».

Marché de recherche et développement

Roofscapes, associée avec les entreprise Meha construction bois et Topager, spécialiste dans les projets de végétalisations urbaines, a été attributaire d’un marché de recherche et développement pour la conception, la construction mais aussi, pour une période de plusieurs années, la maintenance et les études d’impact de cette première terrasse.

La première phase a ainsi consisté à préciser les détails constructifs d’une plateforme en bois de 100 m² à dresser sur un avant-toit en zinc du 3e étage sur cour intérieur de l’édifice. Un chantier de deux mois, de mars à mai dernier, a permis de l’installer sur la partie nord, et donc orientée plein sud, de ce pan incliné de toit en zinc, long et étroit. Alors que poutres, solives et platelage sont en pin sylvestre français, la terrasse présente un seul élément métallique : des pilotis en acier, capotés en zinc dans leur partie inférieure qui permettent de la faire reposer, à travers des percements de la couverture métallique, sur la structure en pierre du bâtiment.

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Roofscapes axonométrie terrasse paris 2024 Roofscapes axonométrie terrasse paris 2024

© Olivier Faber/Roofscapes – Axonométrie partielle de la plateforme

Ont ensuite été installés une double rangée de bacs de plantations, eux en mélèze également issu de forêt française. Supports de diverses espèces, comestibles ou non et mêlant des plantes typiquement franciliennes et d’autres plus «sudistes» et donc supposément davantage adaptables au climat de 2050, ces volumes sont remplis non seulement d’un substrat de terre mais aussi, en partie basse, d’une cuve de récupération des eaux de pluie, contenant des billes d’argile. «Cela permet de conserver l’eau qui ensuite, remonte par capillarité dans la terre quand le temps est sec, explique Eytan Levi. Nous voulons en effet tester l’autonomie en eau des plantations car nous considérons que la ressource ne sera pas toujours aussi disponible qu’aujourd’hui. Nous avons toutefois un point d’arrivée d’eau mais il est muni d’un compteur pour nous permettre de mesurer quel apport complémentaire est nécessaire sur une telle installation.»

Mesures éloquentes

Evidemment, une autre série de mesures clés porte sur les températures. Roofscapes a donc disposé six sondes, toujours par deux : l’une est au niveau de la toiture en zinc, la seconde est à l’intérieur du bâtiment, dans les combles. Le premier couple est évidemment sous la terrasse végétalisée, tandis que les deux autres ont été placés sur les parties est et ouest de l’avant-toit, restées à nu. Ainsi Roofscapes peut, par comparaison, vérifier le bénéfice fraîcheur de son mini jardin. Et les températures relevées le mardi 30 juillet, alors que la capitale connaissait un pic de chaleur, sont éloquentes. En fin d’après-midi, les versants nord et est, exposés au plein soleil, affichait des différences d’environ 32 °C au niveau de la toiture en zinc et  17 °c sous les comble (graphique ci-dessous).

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Roofscapes Terrasse relevé température académie climat 2024 Roofscapes Terrasse relevé température académie climat 2024

© Lionel Leduc et Roofscapes - Le différentiel des températures relevés le 30 juillet, sous la terrasse au sud et au niveau de l'avant-toit est.

Cette première expérience fait enfin figure de laboratoire de biodiversité. En effet, il reviendra cette fois à Topager de venir vérifier régulièrement comment évoluent les sauges et les thyms, les fraises et les framboises, mais aussi le jasmin, le chèvrefeuille et la passiflore : quelles espèces auront tenu dans la durée, quelles autres seront apparues. «Pour le moment, nous avons constaté peu de pertes», constate Eytan Levi. Et, devant une plante en apparence desséchée, l’architecte casse une tige : « Alors que nous pensions que celle-ci était morte, on voit qu’elle reste verte au cœur. » Remarquant de nouvelles pousses, il ajoute : «d’ailleurs, je vois qu’elle repart.»

Il s’agira aussi de vérifier quelle faune attire cette végétation, et notamment quels insectes. Pour l’heure, l'installation est une aubaine pour les abeilles des ruches déjà installées sur la toiture du bâtiment depuis de nombreuses années. Devant ce festin de pollen, elles butinent à cœur joie. A se demander où elles pouvaient bien voler se ravitailler auparavant.

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