Par sa décision du 11 janvier 2013, le Conseil d’Etat se prononce sur deux points importants de la police « tous risques chantier » (TRC) : le champ d’application de cette assurance facultative et les conditions de sa mise en œuvre. Dans cette affaire, l’établissement public du musée du quai Branly souscrit un contrat TRC, compris dans un marché public d’assurance, et garantissant tous les dommages, qu’elle qu’en soit l’origine, survenant en cours de chantier. Or deux sinistres se produisent pendant l’exécution des travaux : des dommages sont causés à la façade vitrée du musée, et un orage occasionne au chantier d’importants dégâts. La compagnie d’assurances refuse de délivrer sa garantie, car ces sinistres trouveraient leur origine dans une négligence du musée et seraient dépourvus d’aléa, lequel constitue l'essence même de tout contrat d'assurance. L’établissement public saisit alors le juge administratif, et demande la réparation de ses dommages qu’il évalue à plus de 500 000 euros.
L’assureur TRC invoque à tort la faute intentionnelle
Le tribunal administratif, puis la cour administrative d’appel (CAA) de Paris rejettent la demande d’indemnisation de l’établissement public, tout en reconnaissant que les dommages entrent bien dans le champ d’application de la TRC. Dans un premier temps, les juges considèrent que les dommages se sont, en effet, produits pendant la période de garantie du contrat, comprise entre le début des travaux et leur réception ; et qu’ils n’ont pas été causés par une faute intentionnelle du maître d’ouvrage public, exclusive de garantie au sens de l’article L. 113-1 du Code des assurances. On rappellera que la jurisprudence adopte une interprétation restrictive de la faute intentionnelle en exigeant une intention de l'assuré de causer le dommage, ce qui n’était sérieusement pas défendable en l’espèce. Mais dans un second temps, les juges estiment cependant que l’assuré n’apporte pas la preuve de la réalité et de l’ampleur de ses préjudices.
Le musée n’est pas tenu de produire des factures pour être indemnisé
Le Conseil d’État, saisi par l’établissement public, ne suit pas le raisonnement des premiers juges et annule l’arrêt de la cour d’appel en estimant que cette dernière a commis plusieurs erreurs de droit sur les terrains de la preuve, exigée de l’assuré, du dommage et de son chiffrage, et sur les justificatifs relatifs aux sommes à rembourser.
Ainsi, la CAA aurait dû apprécier le bien-fondé des prétentions de l’assuré au vu des pièces produites et diligenter les éventuelles mesures d'instruction qui lui semblaient nécessaires. De plus, elle n’avait pas à exiger de l'établissement public la production de factures dès lors que l'assuré n'est pas, sauf clause particulière, tenu de procéder aux réparations pour percevoir l'indemnité due par l'assureur. Autrement dit, les premiers juges ont ajouté au contrat une condition qu’il ne pose pas. Le Conseil d’État décide de ne pas statuer sur l’affaire au fond et la renvoie devant la CAA de Paris.
La saga « assurance construction » n’est donc pas finie !
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