La tuile, un segment à réactions. En attendant que la reprise de la construction de maisons individuelles produise ses effets, c'est du côté de la rénovation que se dégagent de nouvelles opportunités. « Avec le crédit d'impôt transition énergétique (Cite), et la TVA réduite, les couvreurs ont tout intérêt à capter les travaux d'isolation », conseille Jean-Baptiste Fayet, directeur commercial et marketing France chez Terreal.
Il s'agit d'un enjeu incontournable, appuie Christophe Lagrange, directeur du marketing et de la technique chez Monier : « Le futur de la toiture est là. Le défi est d'accompagner les couvreurs pour qu'ils proposent à leurs clients l'isolation en plus de la couverture ».
Et pour cause : ce toit, qui est responsable de 30 % des déperditions thermiques, contribuera ainsi à baisser les dépenses de chauffage, mais également « à apporter une meilleure qualité d'isolation acoustique et valoriser l'habitat. Il s'agit d'un point décisif lorsque le diagnostic de performance énergétique pren- dra plus d'importance », poursuit Christophe Monier.
Conséquence, « le redémarrage va se faire par le développement du sarking en isolation thermique par l'extérieur », pronostique Gilles Wurthrich, directeur du marketing tuiles chez Wienerberger. Ce créneau enregistre déjà « une forte croissance, de plus de 20 %, dans des maisons avec combles aménagés », glisse Jean-Baptiste Fayet.
Simplifier la pose, renforcer la productivité
Dans un contexte où le nombre de chantiers reste anémié, les industriels parient également sur la facilité de pose. « Nous avons développé des tuiles plus grandes et doubles pour gagner du temps et de la rentabilité sur le chantier », souligne Olivier Lafore, direc- teur du marketing et de la communication Europe chez Imerys Toiture.
Ainsi, les tuiles 20 au m2 et même 10 au m2 ont remplacé les 60 au m2. « Moins de produits à mettre en œuvre rend la pose plus facile, mais il y a aussi une question de poids et de respect de l'esthétique locale des toitures, dont les lignes peuvent être modifiées. Aujourd'hui, avec 10 tuiles au m2, nous sommes arrivés à un optimal », analyse Christophe Lagrange (Monier). Reste que ces produits techniques, synonymes de gain de temps sur le chantier, vont continuer d'évoluer, « en s'adaptant aux différentes formes de toit pour limiter les découpes, ou en s'accompagnant de nouveaux accessoires pour simplifier le travail du couvreur. Cela se traduira par des lancements de produits en 2016 », reprend Jean-Baptiste Fayet.
Mais cette tuile protéiforme « ne souffre ni de manque de produits ni d'esthétisme, tant au niveau de possibilités de teintes que de formes », tient à ajouter Gilles Wurthrich. Résultat, elle est partie à la conquête de la façade.
Concurrence du toit plat
Elle crée ainsi une continuité esthétique avec la toiture, ou une rupture en bardage, mixée avec d'autres matériaux. Et répond encore une fois au marché porteur de l'ITE, « en contribuant à la performance du bâti et à la protection de l'isolant en sous-face », poursuit le spécialiste de Wienerberger. Une autre opportunité de marché pour des couvreurs « en perte d'activité à cause du développement des toits plats. Ils peuvent se positionner sur la façade. La mise en œuvre est simple, rapide et s'inscrit dans un courant architectural en faveur de bâtiments monolithiques », précise Olivier Lafore. Il note même une demande « de personnalisation qui peut se traduire par l'ajout de leds pour animer cette façade ».
Ce nouveau potentiel esthétique va offrir à la tuile un autre défi. « Démontrer qu'elle est un produit contemporain, notamment en réaction à cette toiture plate prisée par des plus jeunes, qui l'associent à plus de performance », dévoileChristophe Lagrange.
Tuile en acier
Cette offre plus contemporaine dans des teintes foncées et coloris émaillés, « est synonyme de lignes plus épurées », ajoute Olivier Lafore. Tout en préfigurant le développement de nouvelles esthétiques face aux attentes des architectes, « le développement de produits lisses, noirs et à faible pente ».
Reste que ces mouvements de marchés sont surtout orchestrés par la terre cuite, leader incontestée du toit en pente. Néanmoins, face à ce Goliath de la couverture, des produits « rupturistes » tentent de s'imposer.
Vapeur d'eau
Il en va ainsi de Polytuil avec son offre de tuile en acier en rénovation sur les toitures en fibro-ciment, shingle ou bac acier. Ce produit peut se mettre en œuvre sans dépose avec surcouverture, et se positionne comme une alternative poids plume pour gain de temps : son temps de pose annoncé s'élève à 60 à 100 m2 par jour pour deux couvreurs.
Pour sa part, Erlus, avec ses tuiles « engobé noble », veut s'imposer sur le créneau... de la propreté ! « Beaucoup de couvreurs tentent de se positionner sur un nombre restreint de chantiers. Nous voulons nous différencier avec une tuile haut de gamme, qui permet de garder une toiture propre de manière durable, grâce à son revêtement respirant. Il laisse diffuser la vapeur d'eau et apporte un aspect très apprécié de toiture mouillée et non brillante », décrit Dominique Ginez, responsable commercial France d'Erlus. C'est le revêtement - l'engobé noble - qui, en faisant glissant l'eau, ne retient pas les saletés sur les toits.
Avec une offre adaptée aux spécificités régionales, le petit poucet allemand, qui se sait sur un marché de niche, surfe sur un effet bénéfique de la crise qui a drainé une clientèle en attente de nouveautés et de produits différenciés. Des arguments qui justifient un prix plutôt élevé et qui valorisent une prestation à valeur ajoutée.





