Longtemps circonscrit au niveau local, le débat sur le projet de transfert de l’aéroport de Nantes est devenu une sorte de symbole national pour les opposants qui demandent son annulation. Est-ce envisageable ?
Pour être honnête, ce n’est pas un cas sur lequel on réfléchit actuellement. Aujourd’hui, nous sommes à nouveau dans le dialogue car nous en avons une vraie opportunité avec la commission voulue par le gouvernement. Nous espérons pouvoir à nouveau confronter les arguments sur un plan plus rationnel. C’est vraiment cela notre sujet d’actualité et pas le sujet de l’annulation ou de résiliation du contrat.
Pouvez-vous rappelez quelles ont été les récentes décisions du gouvernement ?
Le 24 novembre, un certain nombre d’annonces gouvernementales ont instauré trois commissions, en plus du comité scientifique qui existait d’ores et déjà au titre de la concession. Je rappelle que, dans le dispositif de suivi de contrôle de la concession sur son volet environnemental, un observatoire de l’environnement et un comité scientifique sont prévus pour éclairer les comités de pilotage et de suivi des engagements de l’Etat.
Les annonces du 24 novembre ont donc ajouté à ce comité scientifique trois commissions : une commission d’expertise scientifique (qui a pour objet d’évaluer la méthode de compensation par fonctionnalité proposé) ; une commission agricole (1) ; et enfin la commission du dialogue annoncée par le Premier ministre qui a pour vocation de faire de point sur l’ensemble des arguments des différentes parties prenantes et d’organiser le dialogue pour les prochaines étapes plus opérationnelles. Elle rendra ses conclusions dans quatre mois.
Quelles sont les conséquences de ces nouvelles commissions ?
Les travaux de défrichements, qui devaient commencer début 2013, ne pourront pas avoir lieu tant que la commission d’expertise scientifique n’aura pas rendu son travail. Nous devrons extraire les premières zones qui devront être diagnostiquées sur un plan archéologique des surfaces boisées, qui représentent environ 80 ha sur les 537. L’important est de pouvoir commencer les diagnostics archéologiques sur les terrains que l’on maîtrise et pour lesquels nous avons un accès.
Nous allons également profiter de l’année 2013 pour réaliser un maximum de transferts d’espèces protégées. Nous attendons un arrêté préfectoral dit « espèces protégées » pour la fin 2012 ou début 2013. Cet arrêté est important pour que l’on puisse planifier ce transfert, l’idéal étant entre début février et fin avril en raison des cycles biologiques de ces espèces.
Je rappelle que ce travail de transfert s’inscrit dans la suite du recensement des espèces réalisé en 2011. Nous avons alors identifié un certain nombre de sites ou d’habitats remarquables d’espèces protégées, comme 12 mares abritant des amphibiens et principalement des tritons marbrés et des tritons crêtés ou une quinzaine de fûts d’arbres, habitat potentiel du grand capricorne même si celui-ci n’a pas été contacté sur le site.
La commission d’enquête a émis un avis favorable mais recommande l’étude de l’option de parkings silos, moins consommateurs d’espaces. L’avez-vous envisagé ?
Cette option n’est pas cohérente avec le parti-pris architectural et paysagé de Jacques Ferrier et Bernard Lassus qui a sous-tendu notre offre et qui a été bien accueilli. Aujourd’hui, le changement de conception de ces parkings n’est donc pas d’actualité. Nous sommes toujours sur un stationnement horizontal en symbiose avec la trame bocagère. Mais ce sujet sera peut être débattu au sein des différentes commissions et l’on verra alors avec le concédant quelle suite lui donner.
Pouvez-vous faire le point sur la situation foncière ?
Nous sommes aujourd'hui propriétaire de 96% des terres nécessaires à la réalisation du futur aéroport. Les 4% restant correspondent aux jugements que l’on attend pour la fin de l’année.
On a signé un accord à l’amiable avec 30 exploitants sur les 40 concernés. Pour les autres, on va se porter acquéreur par voie judiciaire. Je précise que 35 exploitations sur les 40 impactées vont poursuivre leur activité.
Le calendrier initial risque-t-il d’être modifié ?
Il est prévu de commencer les travaux préparatoires avec les diagnostics archéologiques sur les surfaces aujourd’hui accessibles aux alentours de février 2013. Ces travaux préparatoires vont se prolonger jusqu’au 2e semestre 2014, date à laquelle devraient commencer les travaux de construction de la plateforme aéroportuaire. L’ouverture reste à l’horizon 2017-2018, en fonction du travail et du résultat des différentes commissions et des accords politiques pris en mai 2012. Il y a encore des aléas sur le calendrier judiciaire ou juridique et c’est en fonction de ces derniers points que l’on pourra stabiliser définitivement le calendrier opérationnel.
Alors que les perspectives dans les travaux publics sont moroses, un éventuel décalage du projet ne vous permettrait-il pas de mieux répartir vos équipes et notamment celles sur le chantier de la LGV Sud Europe Atlantique ?
Absolument pas. Ce n’est pas le même type de chantier et ce ne sont pas les mêmes équipes. Vinci est fortement ancré en région et ce sont les entités locales du groupe et leurs sous-traitants historiques locaux qui vont concevoir et réaliser ce projet. Ce ne sont donc pas tout à fait les mêmes qui sont sur le projet de LGV Sud Europe Atlantique.
Et puis, il faut relativiser. En termes de chantier, le futur aéroport du Grand Ouest n’est pas un projet pharaonique pour reprendre les qualificatifs que l’on peut lire dans la presse. C’est un projet de 446 millions d’euros, à comparer avec les 7 milliards d’euros de la LGV Sud Europe Atlantique. Le futur aéroport du Grand Ouest n’est pas le projet du siècle pour Vinci et son coût est tout à fait raisonnable par rapport aux services et aux avantages qu’il va apporter au territoire.
Le coût de cet équipement est pourtant souvent critiqué par les opposants ?
Il est important de recadrer et relativiser cette question. Le coût de la plateforme aéroportuaire est de 446 millions d’euros sur lesquels nous apportons 315 millions d’euros, soit plus de 75% du financement. Ces 315 millions d’euros seront remboursés, non pas par les contribuables, mais par les usagers du futur aéroport. Il faut aussi savoir que nous nous sommes engagé sur un coût global et forfaitaire et que les dépassements de coûts de sont pas à la charge du public.
Enfin, le complément du financement de l’ordre de 130 millions d’euros apportés par l’Etat et les collectivités territoriales pourra être remboursé à travers la clause de retour à meilleure fortune qui se trouve dans le contrat de concession. Concrètement : si le résultat d’exploitation réel est supérieur aux prévisions, l’excédant profitera d’abord et avant tout à l’Etat et aux collectivités qui ont participé au financement.
Lorsque l’on met tout ça bout à bout, la question du coût du futur aéroport de Grand Ouest est vraiment toute relative. J’ajoute que si on compare le coût de ce projet à une LGV, cela représente un peu moins de 30 kilomètres. Et on parle bien d’un équipement structurant pour le territoire du Grand Ouest !
Cet équipement structurant le sera pleinement si les différents projets de desserte voient le jour. Même si ce n’est pas de votre ressort, pouvez-vous faire un point sur ce sujet ?
Il est d’ores et déjà prévu une desserte en transport en commun par un système de cars à haut niveau de service mais le projet de tram-train est toujours d’actualité puisque les pré-études se finalisent au niveau du syndicat mixte aéroportuaire. A l’issue de ces études, des décisions politiques sont attendues et on entrera alors dans une phase plus opérationnelle. C’est une impulsion politique qui fera le calendrier de ce tram-train.
Sur la liaison ferrée rapide entre Rennes et Nantes, c’est un projet piloté par RFF et le débat public va commencer début 2013. Nous sommes sur un horizon d’ouverture autour de 2025.
En ce qui nous concerne, dans notre projet, nous avons des mesures conservatoires pour accueillir et le tram-train, avec sur le parvis une station très proche l’entrée de l’aérogare, et un gare SNCF connectée directement avec le hall de l’aérogare.
Vous le disiez, la commission de dialogue sera l’occasion pour chacune des parties d’avancer ses arguments. Quels sont les vôtres ?
C’est d’abord le fait que le transfert de l’aéroport est sous-tendu par une dynamique très forte du trafic. Nous allons finir l’année à près de 3,6 millions de passagers, soit une augmentation de près de 11% par rapport à 2011, année qui était déjà en augmentation de 7% par rapport à 2010. Nous sommes trois ans en avance par rapport aux prévisions de la déclaration d’utilité publique de 2008 qui avait pourtant été jugée très optimiste par les opposants.
Les faits montrent une très forte dynamique de Nantes Atlantique qui justifie de réfléchir à l’accueil de ce trafic à moyen ou long terme, c'est-à-dire à partir de 2017 et jusqu’en 2050 où l’on prévoit 9 millions de passagers. C’est à cette question que nous avons eu à répondre le jour où nous nous sommes porté candidats à cet appel d’offres.
Autre point important, on entend dire que c’est un second aéroport mais c’est faux ! Ce n’est pas un nouvel aéroport mais bien un transfert de l’aéroport actuel de Nantes Atlantique sur un nouveau site.
C’est un point important car si l’on ajoute le fait que la conception du nouvel aéroport du Grand Ouest sera beaucoup plus environnementale que l’actuelle, qu’il permettra de diminuer par plus de 50 les nuisances sonores générées, qu’il évitera le survol par plus de 25 000 avions par ans du lac de Grand Lieu. Si on additionne tout ça, on peut vraiment dire, et de façon très objective, que ce transfert génère une vraie plus-value écologique.