Lyon-Turin : les entreprises partagent leurs innovations

Le maître d’ouvrage du tunnel transfrontalier a invité les acteurs du projet à présenter les moyens mis en œuvre pour un chantier exemplaire. Parmi les priorités : sécurité et durabilité.

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Signataire du Pacte mondial des Nations unies lors de sa création en 2015, Telt y a ajouté en 2021 son propre « pacte d’intégrité et de durabilité » qui s’impose à ses entreprises partenaires.

« Le chantier du Lyon-Turin doit devenir un modèle, celui qui fera évoluer positivement l’industrie de la construction et la réalisation des grands projets », martèle Daniel Bursaux, président de Telt, maître d’ouvrage de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire. Le 30 juillet, le promoteur public franco-italien a réuni à Paris les entreprises qui opèrent sur ses différents chantiers pour mettre en avant leurs engagements.

Nouveaux outils chez Vinci

Premier objectif : la sécurité des personnes sur le chantier. « Nous avons connu plusieurs accidents graves dont trois mortels en un an », rappelle Daniel Bursaux qui pointe une situation « inacceptable ». Vinci Construction, qui réalise actuellement les quatre puits de ventilation d’Avrieux et qui creusera la portion du tunnel comprise entre Saint-Martin-la-Porte et Modane, a mis en place de nouveaux outils : « un laboratoire d’analyse des poussières in situ, des engins équipés de détecteurs de piétons, des lasers pour signaler les zones d’exclusion sur le chantier, un simulateur pour la formation des pilotes de jumbos [les engins de forage de front de taille]… » liste Nicolas Ebel, directeur ESG Europe de la major française.

Un rover autonome

Côté italien, l’entreprise Webuild a innové avec le rover Axel, un véhicule autonome d’exploration envoyé en repérage dans la galerie de la Maddalena. Inspiré des rovers spatiaux, Axel est équipé de caméras haute résolution et de toutes sortes de capteurs. « Ce tunnel avait été creusé il y a de nombreuses années, l’humidité et la température y étaient très élevées, la ventilation ne fonctionnait plus, nous suspections la présence d’eau et de radon et nous n’avions pas d’information sur la qualité de l’air », récapitule Laura Captini, vice-présidente sécurité, environnement et qualité de l’entreprise italienne, également partie prenante du chantier Vinci. Le petit robot a exploré les 3000 m de la section en 70 jours sans que jamais un salarié n’ait besoin d’y pénétrer.

Des matex au béton

Autre priorité : réduire l’empreinte carbone des chantiers et leur impact sur l’environnement. Chez Eiffage, qui creusera 2 x 18 km au moyen de tunneliers et 14 km en méthode traditionnelle, une partie des 11 millions de tonnes de matériaux d’excavation sera réutilisée comme agrégats dans le béton. Et l’entreprise française aura besoin de beaucoup de béton : 2 millions de mètres cubes.

« Les matériaux excavés seront immédiatement analysés grâce au procédé Carasol qui permet d’identifier le niveau de pollution et de sulfates en moins de deux heures contre une semaine pour les procédés classiques », explique Loïc Thévenot, responsable des grands projets souterrains chez Eiffage. Les matériaux de bonne qualité deviendront ensuite des agrégats pour les bétons des voussoirs de radier et seront mis en œuvre avec des ciments sursulfatés. « Ces ciments représentent 80 kg de carbone la tonne contre 400 et 500 kg pour les ciments habituels, leur utilisation aura un impact considérable sur nos émissions », relève Loïc Thévenot.

Mini-toupies

Vinci Construction prévoit également le réemploi des matériaux d’excavation mais aussi du matériel utilisé sur son précédent chantier, à Saint-Martin-la-Porte. « Nous avons intégré les contraintes écologiques dans les études et les méthodes, ajoute Nicolas Ebel. Nous allons par exemple utiliser des mini-toupies à béton de 4 m3 qui permettront de se déplacer sur la plateforme sans endommager la faune et la flore ».

Un « smart tunnel » à exploiter

L’innovation doit perdurer au-delà de la phase chantier : une fois l’infrastructure mise en service – fin 2033 au lieu de fin 2032 et à un coût supérieur de 30% aux estimations initiales, a annoncé Telt récemment – le maître d’ouvrage se transformera en exploitant du tunnel. Pour assurer cette nouvelle mission, la société franco-italienne utilisera « le BIM pour le suivi et la maintenance de l’ouvrage », explique Lionel Gros, son directeur général délégué pour la France, qui assure également que « l’intelligence artificielle aura toute sa place » pour le suivi des activités et l’optimisation de la circulation des trains.

Le tunnel sera « intelligent, connecté, un smart tunnel », décrit Lionel Gros. Cet aspect fait l’objet d’un dernier marché dont les candidats viennent de recevoir le dossier de consultation. « Ces innovations aideront Telt à être aussi sûr et respectueux de l’environnement que possible mais aussi à être performant et à équilibrer nos comptes », résume le dirigeant.

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