Jurisprudence

Marchés publics : entreprises, vérifiez la portée de vos délégations de signature

L’entreprise candidate à un marché doit veiller à présenter dans son dossier la délégation de signature du signataire de l’offre… mais surtout, à s’assurer que cette délégation correspond bien au secteur d’activité concerné et au montant de l’offre ! Un rappel utile opéré par une ordonnance récente du tribunal administratif de Rennes.

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Délégation de signature
Marchés publics

L’offre signée par une personne disposant d’une délégation de signature d’un montant inférieur à celui du prix proposé est irrégulière et doit être rejetée par le pouvoir adjudicateur. Par une ordonnance du 19 décembre 2012, le tribunal administratif de Rennes balaye sur ce fondement la requête présentée par le candidat évincé d’une procédure de passation.

L’affaire portait sur un marché public de travaux à bons de commande pour l’entretien des réseaux, lancé par un syndicat départemental d’électricité. Une entreprise, membre d’un groupement évincé, a exercé un référé précontractuel, se plaignant d’un certain nombre d’irrégularités dans la procédure. Le juge administratif a alors recherché, comme le lui impose la jurisprudence « Smirgeomes », si les manquements invoqués étaient susceptibles d’avoir lésé le requérant. Tel n’est pas le cas, estime au final le tribunal, puisque son offre était irrégulière, ce qui le privait de toute chance d’obtenir le marché. En effet, rappelle la décision, « une offre dont l’acte d’engagement n’est pas, avant la date limite de remise des offres, signé par une personne dûment mandatée ou habilitée à engager l’entreprise candidate, est irrégulière et doit être éliminée comme telle avant même d’être examinée. »

Or en l’espèce, le juge relève un problème de signature dans les documents remis par le groupement évincé. Les entreprises organisent souvent en interne un système de délégations de signature, généralement attribuées aux salariés par secteur d’activité ou par montant. Le signataire de l’autre entreprise membre du groupement avait bien une délégation de signature, ce qui a permis au dossier de candidature d’être admis dans un premier temps. Mais à l’ouverture des offres, il est apparu que cette délégation était insuffisante au regard du montant de l’offre. Le signataire n’était donc pas habilité à engager son entreprise dans le cadre de ce marché, ce qui rend l’offre du groupement irrégulière. C’est donc paradoxalement un élément du dossier de candidature (la capacité à engager l’entreprise), qui ne peut se vérifier qu’au stade de l’analyse des offres, qui entraîne le rejet de l’offre – alors que les deux phases d’examen des candidatures puis d’analyse des offres sont en principe bien distinctes.

Le juge peut éliminer l’offre pour un motif différent de celui invoqué par l’acheteur lors de la passation

Autre élément intéressant à souligner dans cette décision, le juge écarte la demande du candidat évincé pour un motif différent de celui qui avait conduit le pouvoir adjudicateur à rejeter son offre. Le problème de signature n’a en effet été invoqué par l’acheteur public que devant le juge ; lors de la procédure de passation, la candidature du groupement avait été « naturellement » éliminée du fait de son classement en 14è position sur 15. Le juge opère donc une « substitution de motifs » qui pourrait sembler choquante, mais consiste finalement à rectifier une erreur d’appréciation du pouvoir adjudicateur lors de l’analyse des offres.

Pour consulter l’ordonnance du juge des référés du TA Rennes, 19 décembre 2012, n° 1204860, cliquez ici%%/MEDIA:1104004%%

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