En juillet dernier débutait le sauvetage de Fort Boyard, qui a perdu, au gré des marées et des tempêtes, ses protections d’origine. Après de premiers travaux de terrassement, la restauration de la risberme, structure de renforcement des fondations, sera entreprise à compter de septembre prochain.
Puis viendra le cœur de l’opération : la reconstruction du havre d’accostage et de l’éperon, destinés à défendre l’édifice situé au large de Fouras (Charente-Maritime) contre les éléments naturels. Les nouveaux ouvrages seront réalisés respectivement en juillet 2026 et juillet 2027.
Programme fonctionnel
Un chantier d’ampleur – les travaux doivent durer trois ans et leur montant est estimé à près de 36 M € - pour lequel le maître d’ouvrage, le conseil départemental de Charente-Maritime, a passé un marché de conception-réalisation. Ce dernier a été remporté par un groupement composé de l’entreprise ETPO (qui s'appuie sur Merceron TP, Les Compagnons de Saint-Jaques et Tetis en qualité de sous-traitants), du bureau d’études BRL Ingénierie et du cabinet Architecture Patrimoine, désigné à l’issue d’une procédure de dialogue compétitif.
Le dialogue compétitif, une procédure rare mais pas inconnue du département
Le Code de la commande publique définit le dialogue compétitif comme « la procédure par laquelle l’acheteur dialogue avec les candidats admis à y participer en vue de définir ou développer les solutions de nature à répondre à ses besoins et sur la base desquelles ces candidats sont invités à remettre une offre » (art. L. 2124-4). Elle n’est ouverte que sous conditions aux pouvoirs adjudicateurs (art. R.2124-3 et R. 2124-5).
Le dialogue compétitif reste ainsi relativement peu utilisé. En 2021, il ne représentait que 0,2 % des procédures de passation des marchés publics, selon les données de l’Observatoire économique de la commande publique – qui a cessé depuis de publier la répartition des types de procédure de passation.
« Hormis pour le marché de Fort Boyard, nous avons entrepris quelques dialogues compétitifs à la direction de l’eau, de la mer et du littoral du conseil département de Charente-Maritime. En particulier pour la passation du contrat de partenariat relatif à la modernisation du port de La Cotinière situé sur l’île d’Oléron. C’est aussi une procédure souvent utilisée dans le domaine de la construction navale », indique Mathieu Barbier.
« Le dialogue compétitif permet de détailler les objectifs à atteindre dans un programme fonctionnel, sans spécifier les moyens pour y parvenir. Ce sont les échanges avec les candidats qui ont conduit à une solution répondant pleinement à notre besoin et à nos exigences », explique Mathieu Barbier, directeur adjoint de la direction de l’eau, de la mer et du littoral au conseil départemental.
Privilégier les moyens internes
Une façon aussi de permettre aux entreprises d’adapter leurs réponses selon les moyens à leur disposition. « Chaque groupement a proposé des méthodes et des techniques de travaux différentes, définies en fonction du matériel et des équipements dont ils disposent », observe ainsi Mathieu Barbier.
Un sujet qui a fortement pesé dans les discussions, compte tenu du fait que le chantier se déroule en mer. « Nous avons considéré qu’une entreprise qui s’appuyait sur de la location allait prendre trop de risques, notamment au regard des aléas comme les marées ou les intempéries », souligne l’agent public. Une analyse initiale qui s’est vérifiée durant la procédure. « Un groupement a jeté l’éponge pour cette raison : son offre reposait sur la location des équipements et il s’est aperçu que cela représentait un risque financier trop important ».
Un monument historique
Par ailleurs, le dialogue compétitif a permis d'aborder de nombreux autres points. « L’essentiel des échanges a porté sur la conception des ouvrages », relève Mathieu Barbier. Avec une donnée particulière à prendre en compte : le Fort Boyard est classé au titre des monuments historiques. « Il a fallu adapter les design aux exigences des architectes des bâtiments de France ». Ce qui a nécessité d’impliquer les services de l’Etat tout en veillant à garantir la confidentialité des discussions entre le conseil départemental et les groupements candidats.
Des discussions qui ont aussi porté sur le portage des risques. « Notamment les risques géotechniques, réglementaires et les intempéries, énumère Mathieu Barbier. Le contrat signé a le mérite d’être très clair quant à la répartition des risques entre le maître d’ouvrage et le titulaire », salue-t-il.