Dans la mesure où la Commission n'a pas pu, pour des raisons politiques, sortir son plan d'action comme prévu avant fin 2008, le Parlement s'est emparé du sujet avant la fin de son mandat et fait ses propres propositions en avril dernier.
Dans ce plan, la Commission suggère des initiatives aux autorités locales et régionales pour s'attaquer aux problèmes qu'engendrent les encombrements, en veillant à ne pas se substituer à elles dans les choix des solutions. Parmi ces actions citons l'amélioration des droits des voyageurs dans les transports publics urbains, la poursuite de la recherche, l'établissement de liens entre la mobilité urbaine et les politiques de l'UE en matière de santé, de cohésion, de handicap, etc., la préparation de matériel d'information, d'actions de formation pour accélérer l'adoption de plans de mobilité urbaine durable par les autorités locales. S'il n'est pas question dans ce texte d'imposer des péages urbains, des zones vertes ou le tramway dans chaque grande ville, la Commission entend promouvoir l'échange de bonnes pratiques. Elle préparera aussi des documents d'orientation notamment sur le fret urbain ou les systèmes de transport intelligents. Elle entend également créer une base de données recensant les meilleures pratiques pour la mobilité urbaine. En 2012, la Commission examinera la mise en œuvre du plan et déterminera s'il est nécessaire d'engager de nouvelles actions.
Voir http://ec.europa.eu/transport/urban/urban_mobility/urban_mobility_en.htm
"Ce plan d'action veut aider toutes les villes"
Un entretien avec Anne Houtman, Direction Générale Transports et Energie de la Commission européenne
Anne Houtman, directrice de la Direction A (marché intérieur et développement durable) à la DG Transports/Energie de la Commission européenne, est en charge de ce texte. Elle a expliqué ses enjeux au Bulletin européen du Moniteur (BEM).
Quelle est la valeur ajoutée d'une action dans ce domaine au niveau européen ?
La consultation publique engagée par la Commission européenne préalablement à la rédaction de ce Plan d'action a montré un très large consensus sur le fait que l'Union européenne a un rôle à jouer pour favoriser une mobilité urbaine durable. Naturellement, les villes sont toutes différentes, que ce soit en termes de climat, de géographie, de culture... Mais elles font face aussi à des problématiques communes, notamment en matière de mobilité. La Commission européenne est bien placée pour analyser, de façon objective, les expériences locales et faire remonter les initiatives qui ont bien fonctionné dans différents pays européens. Le plan d'action qui vient d'être adopté n'est absolument pas contraignant. Il vise simplement à recueillir et partager des expériences qui peuvent servir à d'autres villes, leur faire gagner du temps... Il donne une visibilité et une cohérence à tout un ensemble d'actions à réaliser ou déjà engagées au niveau européen. Toutes les villes, quelque soit leur taille, doivent savoir que nous pouvons leur apporter quelque chose.
Sous quelle forme l'Union européenne peut-elle intervenir en matière de mobilité durable ?
Comme je vous le disais, nous sommes dans l'incitatif. Le fait de faire connaître les bonnes solutions, celles qui fonctionnent, c'est déjà une façon d'inciter. Nous voulons donner aux collectivités une boite à outils dans laquelle elles pourront piocher si elles le souhaitent et en fonction de leurs besoins. Car nous sommes convaincus que seul l'échelon local peut vraiment faire bouger les choses au niveau local. Il ne faut pas oublier que plus de 70 % de la population européenne vit dans des agglomérations et 85 % du PIB de l'Union est généré dans les villes. 40 % des émissions de CO2 et 70 % des émissions d'autres polluants provenant du secteur routier sont dues au trafic urbain. Car les trajets longue distance des biens et des personnes partent et arrivent dans les villes, qui sont devenues des nœuds majeurs. On ne peut donc pas se concentrer seulement sur les TGV. En effet, quand vous sortez d'un train qui vous a permis de gagner de précieuses minutes, vous ne voulez pas perdre deux heures dans les embouteillages! Parallèlement, nous devons aussi élever le débat pour réfléchir davantage en termes de systèmes de transports, à l'échelle d'une région, d'un pays, ou même de l'Union européenne.
Quelles actions concrètes envisagez-vous de lancer ?
Le plan d'action européen identifie 20 actions classées selon les cinq grands thèmes suivants à mettre en œuvre jusqu'en 2012 :
* L'intégration des politiques. Il s'agit en quelque sorte d'apprendre à penser ensemble, en réunissant tous les intéressés autour de la table. Je pense notamment à l'usine de biogaz de Lille qui alimente à partir des déchets ménagers des bus en carburant. Il s'agit également de veiller à l'interconnexion de l'ensemble des modes de transport, notamment dans le cadre de plans intégrés de mobilité urbaine durable. Enfin, il convient d'encourager l'élaboration de plans de mobilité durable, notion entendue comme étant une vue à long terme qui optimise la mobilité en minimisant la congestion, le bruit, la pollution, etc.
* L'attention portée aux besoins des citoyens. Pourquoi les citoyens n'utilisent pas plus les transports en commun ? Sur quels leviers agir (tarification, interopérabilité des billeteries, accessibilité...) pour les inciter à le faire ? Comment rendre ce mode de transport plus attirant ? Voici quelques unes des questions sur lesquelles nous voulons travailler.
* L'écologisation du transport urbain. Nous parlons ici de soutenir le développement de véhicules propres (l'électromobilité), et les modes de transports doux, de mettre en place des systèmes permettant à plusieurs acteurs de se regrouper pour lancer des appels d'offres conjoints afin d'obtenir de meilleurs prix, ou encore d'étudier l'efficacité des péages, qui ont vocation à modifier les comportements et à faire payer l'usage de ressources rares. Sur ce point, nous devrons veiller à l'interopérabilité des différents systèmes adoptés en Europe car il est difficile d'imaginer qu'un camionneur doive transporter une multitude de "boites" dans son véhicule pour pouvoir acquitter le péage de plusieurs villes.
* L'optimisation des systèmes. Nous entendons promouvoir l'échange de bonnes pratiques, créer un observatoire virtuel pour enrichir les données dont nous disposons, faciliter les modes de circulation doux et la protection des usagers vulnérables, les systèmes de transport intelligents (gestion de trafic...), et étudier la problématique du fret urbain (comment passer d'un méga-truck à la distribution de biens localement ?).
* Enfin, le financement, qui est le nerf de la guerre. Il convient, selon nous, d'optimiser ce qui existe en faisant mieux fonctionner ensemble des instruments tels que les fonds structurels, ceux de la recherche (notamment via le programme Civitas)... Et, dans le cadre de la préparation des prochaines perspectives financières (budget 2012-2016), nous examinerons les besoins de financement pour la mobilité durable.
