Protéger simultanément la biodiversité, le patrimoine historique et la quiétude d'une petite commune. Le tout en atteignant l'équilibre économique. C'est un projet exceptionnel à plusieurs titres qui va être mis en œuvre sur l'ancien sanatorium d'Angicourt (Oise), commune de moins de 1 500 habitants située à 40 minutes de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.
Récemment retenue par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), propriétaire des 36 ha et des locaux abandonnés depuis plus de vingt ans, la proposition de revitalisation de Linkcity se veut en effet exemplaire sur plusieurs tableaux, dont celui de la préservation de la faune et de la flore.
Pour réussir ce tour de force, le promoteur s'appuie sur un programme sur mesure imaginé par l'architecte Patrick Mauger et le paysagiste Thierry Huau. Baptisé « La source d'Angicourt », il prévoit, dans un écrin de nature, un centre de séminaire de 400 chambres, ainsi que 80 appartements familiaux. Il préservera aussi 60 % du site au travers d'un partenariat original avec CDC Biodiversité, spécialiste de la compensation environnementale.
« L'opération vise le label BiodiverCity [qui atteste que la biodiversité a été prise en compte aux différentes étapes d'un projet immobilier, NDLR]. Environ 7 % du site sera désartificia-lisé grâce aux voiries et aux bâtiments déconstruits », explique Lise Mesliand, directrice générale adjointe développement Paris, projets urbains et grandes consultations de Linkcity Ile-de-France qui pilote le projet.
« Augmenter les zones de pleine terre ». « La suppression d'environ 4 000 m² SP de bâtiments de faible qualité construits en rez-de-chaussée ou R + 1 permettra d'augmenter les zones de pleine terre. Pour limiter l'artificialisation, nous avons par ailleurs profité du dénivelé du terrain pour placer en sous-sol du pavillon Varenne (voir dessin) une extension de 2 500 m² SP. Dotée d'une large fenêtre, cette partie contemporaine accueillera de grandes salles de réunion », détaille l'architecte Patrick Mauger. Le pavillon en forme de U, datant de 1924 et réservé aux femmes, sera en effet réhabilité de fond en comble pour être transformé en centre névralgique de la partie destinée aux séminaires. « Environ 9 500 m² SP d'hébergements seront aussi construits en miroir de ce U. Cela permettra de créer entre les deux édifices une “place du village” favorable aux échanges », détaille Patrick Mauger. Les anciens bâtiments de l'administration et du directeur adjoint seront aussi réhabilités. Ils pourront accueillir salle de fitness ou logement de fonction. Au total, 7 200 m² SP retrouveront une nouvelle vie, ne visant plus à soigner comme autrefois les tuberculeux mais l'esprit d'équipe des salariés.
Défiscalisations. Par ailleurs, pour remettre sur pied le vétuste pavillon Letulle mis en service dès 1900 pour les hommes, le groupement prévoit, sur 5 000 m² SP, la création de 80 appartements, tout en conservant les caractéristiques patrimoniales.
Ils pourraient bénéficier des défiscalisations au titre des monuments historiques quand le classement, en cours, de l'édifice imaginé en 1890 par l'architecte Henri-Charles Bélouet sera obtenu.
Pour que « La source d'Angicourt » vive toute l'année, elle pourrait aussi abriter un centre équestre et une crèche. Les projections n'ont pas négligé les aspects énergétiques puisqu'un partenariat avec Engie vise à couvrir les besoins en chauffage du site avec 60 % d'énergies renouvelables, en ayant recours notamment à la géothermie. « Cette année sera consacrée aux études et à la concertation avec riverains et élus. Ces derniers connaissent déjà bien le projet et l'ont plébiscité », décrypte Lise Mesliand. Pour perturber le moins possible la vie du village, l'équipe a en amont écouté attentivement leurs attentes. Ça coule de source.
Information technique
Promoteur-aménageur : Linkcity.
Maîtrise d'œuvre : Patrick Mauger (architecte). MOE démolition : Ginger Deleo. BET VRD : Setu. AMO environnement : Elan.
Paysagiste : Thierry Huau. Concepteur et exploitant géothermie : Engie Solutions.
Constructeur : Bouygues Bâtiment Ile-de-France.
Dépollution : Brézillon.
Surfaces réhabilitées : 12 200 m2 .
Surfaces démolies : 4 000 m2 . Surfaces neuves : 12 000 m².
Coût : NC.
« Le financement pourra se faire de façon réglementaire ou volontaire »
Pensez-vous que la préservation de la nature a été un critère important lors du jury ?
La protection et la gestion de la biodiversité sur le long terme constituaient en effet des éléments attendus, en particulier par la commune. Plus de trente minutes du grand oral ont porté sur ces seuls aspects.
La récupération et la gestion de 22 ha de foncier, dont 17 de boisement, par CDC Biodiversité (Caisse des dépôts) ont certainement été un élément différenciant.
Nous sommes capables de garantir la maîtrise foncière et la gestion adéquate sur une très longue période.
Comment allez-vous financer remise en état et entretien du site ?
Plusieurs possibilités s'offrent à nous pour la protection de ce site à fort potentiel de restauration écologique. Nous pouvons ainsi utiliser le levier financier que représente la compensation environnementale réglementaire [via la restauration d'habitats équivalents à ceux détruits par un projet, NDLR]. Il est aussi possible de bénéficier du soutien volontaire d'entreprises, par exemple à travers notre programme Nature 2050. La remise en état et la gestion durant trente ans seraient pilotées avec des acteurs locaux.
Comment seront justement gérés ces 22 ha ?
Afin d'en faire un démonstrateur écologique, nous allons intervenir pour restaurer les parcelles de boisement dégradées, traiter les espèces exotiques envahissantes ou diversifier les milieux. Puis nous assurerons une gestion écologique optimale du boisement en nous appuyant notamment sur les essences déjà présentes, comme le tilleul. Nous imaginons des espaces ouverts au public via des cheminements, notamment vers la source, et d'autres plus fermés.
%%MEDIA:2418720%%