Rapport du COI : « Un signal fort du désengagement de l’Etat dans le développement routier », Bernard Sala, Pdt de Routes de France

Hausse des crédits à l’entretien et à la modernisation, baisse de ceux dédiés au développement et montée en puissance programmée du mode ferroviaire, le président de l'organisation professionnelle des entreprises de travaux routiers, Bernard Sala, analyse les propositions formulées par le conseil d’orientation des infrastructures dans son scénario central.

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Bernard SALA , président de Routes de France.

Comment lisez-vous les conclusions du COI et les recommandations d’investissements qu’il émet dans le scénario « planification environnementale » de son rapport consultatif ?

Ce rapport s’inscrit dans la continuité de la Loi d'orientation des mobilités (LOM) qui visait prioritairement les infrastructures existantes en vue de les entretenir et de les moderniser. Comme mentionné dans son introduction, il intègre néanmoins des « infléchissements » et la problématique de transformation des infrastructures. En somme, il me semble que la trajectoire fixée par la LOM constitue toujours une fondation solide et pertinente, mais ce rapport doit nous permettre d’injecter de manière plus marquée des dimensions qui étaient moins présentes à l’époque, comme la prise en compte et le calcul plus systématique de la performance environnementale globale pour orienter les décisions.

Que pensez-vous de l’enveloppe dédiée à l’entretien et la modernisation de la route dans le scénario central du rapport du COI avec 160 millions d’euros par an ?

Après des années de sous-investissements dans l’entretien des routes, avec pour conséquence une chute de la France dans les classements mondiaux relevant la qualité de ces infrastructures, davantage de moyens y ont été accordés depuis 4 ans. Mais au regard des enjeux de modernisation et de transition environnementale qui s’imposent à nous, ceux-ci restent insuffisants et les sommes évoquées dans le scénario de planification écologique du rapport du COI ne me semble pas permettre de répondre à la fois à la question de la maintenance du réseau existant, et à la question de sa nécessaire adaptation aux nouveaux usages et sa modernisation.

En parallèle, c’est une baisse de 130 millions par an des crédits accordés par l’Etat au développement routier qui est proposé…

L’objectif est clairement inscrit dans le rapport du COI. Il s’agit de régénérer et d’adapter le réseau routier aux nouveaux usages et de favoriser le covoiturage. En revanche, on y lit un signal fort du désengagement de l’Etat qui se traduit par la volonté de ralentir, voire stopper les projets de développements routiers, à l’exemple de l’abandon de l’A147 Poitiers-Limoges, de la remise en question du contournement de Rouen Est ou celui d’Arles Sud. Cette politique a une répercussion sur la part de l’Etat dans les CPER dont le volet routier est en baisse d’environ 30%. Ces projets vont devoir trouver des solutions localement.

Peut-on vraiment se concentrer exclusivement sur l’existant sans continuer d’investir dans le développement routier ?

En France métropolitaine, le réseau routier est à maturité en termes de desserte de tous les points du territoire. En cela c’est le premier réseau social. La seule progression du linéaire concerne essentiellement les routes communales à travers les projets de zones d’activité et de lotissements (+11 % depuis 2009). Le développement doit donc se faire d’une part sur l’entretien de ce linéaire et sur son adaptation aux nouveaux usages et d’autre part sur les techniques d’entretien décarbonées qui doivent accompagner l’objectif zéro émission en 2050. Les entreprises routières ont innové et ont des propositions à faire aux collectivités locales.

Le rapport du COI fait la part belle au ferroviaire. Pensez-vous que la route se situe à sa juste place en matière d’investissement dans ces recommandations ?

Le fléchage des investissements est important. Accentuer les investissements sur le rail, au-delà de la part qu’il représente actuellement dans nos mobilités, pour soutenir son développement est tout à fait légitime et il n’est plus d’actualité de rester dans nos silos respectifs. Nos infrastructures sont interdépendantes : le ferroviaire peut contribuer à la décongestion de la route et la route est le support indispensable pour accéder au ferroviaire. Suivant cette logique, la route est l’avenir du fer !  Néanmoins, si l’on veut réussir la modernisation et la transformation écologique de nos infrastructures, on ne peut être complètement décorrélé de la réalité des réseaux existants et des émissions liées à leur usage. Aujourd’hui, la route emporte près de 90 % de nos déplacements, il faut en tenir compte et se donner les moyens de l’entretenir, de la moderniser et de la transformer.

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