Relance des devis Les PME passent à l'offensive

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Le filtrage et la relance ciblée des devis sont les deux volets d'une politique commerciale plus dynamique. Les outils informatiques fournissent une aide précieuse à la présentation et à la gestion des devis

Synonyme d'heures à rallonges qui mordent parfois sur le week-end, voire de temps perdu, le devis est souvent ressenti comme un pensum. Mal perçu par la profession qui ne mesure pas toujours son impact, il l'est aussi par les particuliers. « Les devis ne font pas du tout rêver les clients », remarque Jean-Paul Charpentier, président de la FFB de l'Essonne, qui est arrivé à cette conclusion à la suite d'une enquête à propos des atteintes des grandes surfaces de bricolage sur l'artisanat. Bourrés de termes techniques, les devis sont jugés illisibles par les particuliers. Et ils ont raison : « Il faut illustrer les devis en y intégrant des photos, ajouter des plaquettes publicitaires et mieux expliquer les travaux à réaliser ; il faut aussi savoir vendre du crédit, bref faire du devis un véritable atout commercial », prône Jean-Paul Charpentier.

Des PME ont déjà franchi le pas. « Le devis est le premier lien contractuel avec le client. Elément de traçabilité, il est appelé à devenir un élément de droit. En soignant son devis, l'entreprise se place donc dans une logique d'attaque ; elle se vend et ne se contente plus de répondre », souligne Patrick Fouassier, P-DG de l'entreprise de peinture Robert (CA : 10 millions de francs en 1999) à Limoges et formateur à l'Institut du bâtiment et des travaux publics.

Sa stratégie est agressive : la présentation des devis fait l'objet d'un soin particulier et la relance est systématique. Pour ce faire, il a tout misé sur l'informatique. « J'ai commencé en 1981, explique-t-il. Je faisais des dessins et des plans sur logiciel Excel, je collais même des photos ! » Depuis deux ans, il s'est équipé de logiciels d'aide à l'établissement des devis.

Planification de la relance

« Je dispose de deux outils que j'utilise alternativement en fonction de mes objectifs clients. L'un, plus analytique, est réservé aux devis complexes, l'autre, plus facile à manier, est aussi plus grand public. Il me permet d'intégrer des simulations de façade colorées à partir de photos prise avec un appareil numérique ou bien scannées », indique Patrick Fouassier. Son système lui apporte deux types d'avantages : des devis « plus esthétiques et donc plus vendeurs » et un gain de temps appréciable. « Les modifications des clients sont insérées automatiquement, le devis m'aide à construire la situation de travaux et à établir la facturation », souligne Patrick Fouassier.

En parallèle, il a établi une procédure de planification de la relance basée sur un calendrier implacable. « Chaque devis est relancé au bout de 8 jours, puis 15 jours, enfin un mois puis chaque mois pendant un an », détaille le patron de la SA Robert, précisant que la relance téléphonique est effectuée par une secrétaire consacrant environ un cinquième de son temps aux courriers (mailings) et aux suivis des devis. Une stratégie payante puisque l'entreprise affiche un taux de retour d'un devis sur trois.

Pour une entreprise de plus grande taille, le suivi du devis est partie intégrante de sa démarche commerciale. Ici, la gestion des devis commence par la mise en place d'un dispositif efficace de filtre en amont. « Nous recevons énormément de demandes de devis par courrier », indique Bruno Gardon, directeur général de l'entreprise de ravalement Michel Coulon (CA : 80 millions de francs en 1999) à Courbevoie, dont la clientèle, privée, se compose majoritairement de copropriétés. « Nous avions déjà pris l'habitude de ne pas répondre dans la nature en ne traitant que les dossiers faisant apparaître un client, un architecte ou un président de copropriété connu de nos services » , souligne Bruno Gardon, ajoutant que les devis font l'objet d'études techniques complètes, longues, et mobilisent en permanence cinq techniciens (qui produisent chacun en moyenne un devis par jour). Depuis deux ans, l'entreprise a affiné son système de filtrage et embauché deux commerciaux. «Nous sommes en train de mettre en place des tableaux de bords et une procédure de suivi des devis afin d'être plus offensifs » , récapitule Bruno Gardon.

Politique de suivi des devis

C'est aussi l'objectif de Jean-Paul Charpentier, dont l'entreprise de génie climatique du même nom située à Brétigny-sur-Orge (91) a mis en place une politique de suivi des devis à la suite de son redéploiement en 1997 sur le marché des particuliers - qui représente aujourd'hui 20 % de sa clientèle. « Le moindre petit devis nous coûte au minimum 1 200 F (déplacement inclus). Or nous en réalisons entre 50 et 100 par mois. Aussi, nous en faisons beaucoup moins mais nous en concrétisons beaucoup plus » , résume ce patron de PME qui a réalisé un chiffre d'affaires de 32 millions de francs en 1999. Son plan consiste en une procédure draconienne pour les prospects : aucun rendez-vous n'est pris par les secrétaires mais par les techniciens qui interrogent au préalable ces nouveaux clients potentiels sur leurs motivations et, surtout, identifient le décisionnaire. Ce filtre passé, le devis lui sera porté en main propre par le technicien, formé aux techniques de ventes commerciales. « Apporter le devis au client s'assimile pour nous à une opération de vente réelle » , résume Jean-Paul Charpentier précisant qu'à cette occasion sont abordées en toute simplicité les questions des délais et des conditions de ventes . Cet entretien (consigné sous forme de fiches) est important, car il oriente ensuite la relance future. « C'est au technicien d'apprécier le meilleur moment pour effectuer cette relance. Nous ne voulons pas la systématiser afin d'éviter que le client ne se sente harcelé » , souligne Jean-Paul Charpentier. Pour ce dirigeant, le suivi des devis se révèle particulièrement utile en période de baisse comme de débordement d'activité, car c'est le moyen pour l'entreprise de prendre du recul, de réguler son activité et de capitaliser ses efforts sur ses marchés les plus rentables sans subir la demande. « Il est vrai qu'en période de forte charge, nous sommes tentés de retomber dans notre ancien système et ne plus chercher d'affaires. C'est un mauvais réflexe » , admet Jean-Paul Charpentier. Beaucoup de PME tombent dans ce travers : « Nous n'avons quasiment jamais eu besoin de faire de relance de devis car nous fonctionnons en autosuffisance et nous n'avons pas le temps » , confie ainsi une entreprise de peinture de 40 salariés de la Manche. Equipée en systèmes informatiques de suivi des devis, elle les utilise pour évaluer mois par mois ses performances tout en continuant à fonctionner au feeling avec ses clients... Cette même PME rêve aussi de faire payer les devis de complaisance mais hésite à franchir le pas, car, « chez nous, cela ne se fait pas » . Question de culture, d'habitudes prises. Comme le résume Manuel de Sousa, formateur à la Cegos : « Les entreprises de BTP sont habituées à établir une forte relation d'empathie avec leurs clients. Le problème, bien souvent, c'est qu'elles ne savent pas dire non » .

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