Les habitants du quartier de la Civelière, au sud de Nantes, observent avec intérêt la construction du nouvel Etablissement de santé pour enfants et adolescents de la région nantaise (Esean), déjà surnommé « la maison en bois pour les enfants ». Et pour cause ! Présent sur les façades mais aussi dans l'ossature et les parements intérieurs de ce bâtiment de 6 600 m2 HON, le bois n'avait jamais été utilisé de façon aussi intensive en Europe pour un édifice dédié à la santé. « L'idée est que les enfants soignés puissent se sentir ici un peu comme chez eux, et pas tout à fait à l'hôpital », explique Zahir Kaoula, chef de projet pour la maîtrise d'ouvrage. Mais imposer l'épicéa et le Douglas auprès des autorités sanitaires n'a pas été une mince affaire. « Alors que le bois peut avoir des vertus aseptisantes et qu'en tout état de cause rien ne s'oppose à son utilisation en milieu hospitalier, les préjugés sont tenaces », observe Laurent Rossez, directeur de l'agence Cert d'Angers, en charge des études structurelles. Au final, l'application de quelques mesures de bons sens (l'emploi d'un vernis enveloppant par exemple) et l'existence d'un précédent en Ontario auront eu raison des inquiétudes. D'autant que l'argumentaire technique en faveur du bois était particulièrement solide. « Le côté écoresponsable, les performances thermiques, la tenue au feu des planchers mixtes, les fumées non toxiques, la valorisation du savoir-faire local hérité de la construction navale, tout cela a été pris en compte », souligne Laurent Rossez. Sans parler des aspects mécaniques. « Dans une construction en béton, les charges d'exploitation ne représentent que 20 % des charges transmises aux fondations. Pour L'Esean, dotée d'une structure mixte bois-béton beaucoup plus légère, c'est 40 %. Du coup, les fondations peuvent elles aussi être notablement allégées.»
Connecteurs bois-béton
Au cœur du concept, on trouve le système bois-béton (SBB : bois pour les poutres et les solives, béton armé pour la dalle) développé par Cert Structure (avis technique n° 3/05-450). Prévu pour des portées allant jusqu'à 18 mètres, ce procédé permet de réaliser des planchers composites dont les différentes strates sont rendues solidaires par le vissage de robustes « connecteurs » métalliques. Deux à trois fois plus légers qu'à l'ordinaire, ces planchers offrent une stabilité au feu de 30 minutes. Cerise sur le gâteau, ils font aussi de beaux plafonds. « Le choix de laisser le bois apparent dans les chambres, les salles de repos et les espaces de vie en général, a rendu le passage des réseaux plus complexe et posé des problèmes de réverbération acoustique », pointe malgré tout Astrid Beem, chef de projet chez Brunet-Saunier Architecture, le maître d'œuvre. Des difficultés surmontées grâce à l'expertise du bureau d'études fluides d'une part, et par la pose de revêtements absorbants sur les parois des salles d'activité d'autre part. Pas de souci en revanche quant au calendrier du chantier qui s'achèvera fin octobre après 22 mois de travaux. « La préfabrication en usine permet d'économiser du temps et donc de l'argent en phase d'exécution. C'est l'un des atouts du bois, estime Astrid Beem. A condition toutefois de bien anticiper. »



