Les roses de Notre-Dame de Paris livrent leurs secrets grâce au numérique

Le diagnostic du transept et des façades a été mené grâce à une acquisition par lasergrammétrie et photogrammétrie réalisée en 1,5 jour.

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Vue en très gros plan des épaufrures sur l'une des roses de Notre-Dame de Paris. Crédit : Covalence.
Auscultation des épaufrures sur l'une des roses de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Crédit : Covalence.

Avril 2024 : les travaux de réparation de la cathédrale Notre-Dame de Paris battent leur plein. La date de livraison est dans tous les esprits puisque le chantier doit être terminé le 8 décembre. Or, le diagnostic du transept et des roses de la cathédrale, une opération prévue avant l’incendie, n’a toujours pas été réalisé. Alors que l’échafaudage est encore en place, il faut rapidement décider de son démontage, car l’ouvrage temporaire pourrait être indispensable. Les deux agences qui ont remporté la mission du diagnostic Philippe Villeneuve, architecte en chef de la cathédrale et Covalence décident alors de procéder au démontage de l’échafaudage. L’acquisition se fera ultérieurement au moyen d’un scanner laser installé au sol et d’un drone.

Lasergrammétrie et photogrammétrie

Concrètement, une équipe complète se met en place avec l’expertise de Togne Solution, géomètre de formation qui dispose de plusieurs brevets mis au point notamment lors de la numérisation des grottes préhistoriques. « Nous nous étions engagés à réaliser une acquisition mixte qui mêle la précision géomatique de la lasergrammétrie avec la photogrammétrie, qui est plus précise sur les couleurs, mais où la garantie de la mesure est moindre », rappelle Farés Khima, architecte du patrimoine pour Covalence. L’acquisition a finalement lieu pendant 1,5 jour en novembre dernier, avant le gros morceau que représente le travail de recollement des données.

Une résolution d’un demi-millimètre par pixel

« Le premier défi était de parvenir à articuler l’ensemble des données, sans générer d’erreur. Nous avons choisi d’utiliser les résultats les plus précis comme base de référence pour y ajouter ensuite les données sur les teintes des vitraux, des pierres, des joints, etc. », détaille le spécialiste. Le recollement a été réalisé par une ferme de calcul, c’est-à-dire plusieurs ordinateurs connectés ensemble. L’ensemble des données est aujourd’hui disponible via un espace sur la plateforme américaine Nira, qui autorise une visualisation de haute qualité, des mises à jour et la collaboration des tous les intervenants du projet. Résultat : le modèle BIM des roses de Notre-Dame affiche une résolution de l’ordre de 0,5 mm par pixel ! « Et, grâce à notre protocole de vérification interne, nous sommes certains que chaque point est réellement à sa place. Ainsi, lorsqu’une déformation est visible, elle correspond à la réalité et pas à la marge d’erreur de la compilation des données », indique Farés Khima.

Comparer à l’envie les roses des façades nord et sud

Le modèle BIM des roses de Notre-Dame a déjà livré de précieuses informations sur leur état. « Savoir où intervenir pour changer une pierre ou un vitrail nécessite de comprendre la structure globale du remplage car chaque oculus ou quadrilobe peut résulter d’un assemblage de plusieurs pierres », rappelle Farés Khima. Devant son écran d’ordinateur, l’architecte du patrimoine fait la démonstration de la qualité du modèle. Sur la vue orthonormée, la rose sud semble en très bon état, mais les joints en plomb, qui absorbent les dilatations liées aux changements de température notamment, étaient sources de préoccupation. Pour différencier les vraies faiblesses d’une simple déformation, les experts devaient comparer les roses nord et sud. « Grâce à notre modèle, ils disposent du temps nécessaire pour examiner, mesurer, extraire et confronter les différents plans, sans mobiliser une logistique lourde sur chantier, puisque ce travail s’effectue facilement devant un ordinateur », confirme-t-il.

Si Covalence a mis au point cette solution de numérisation pour le chantier emblématique de Notre-Dame de Paris, le service est maintenant disponible pour n’importe quel monument historique. L’agence était, en effet, déjà engagé dans une véritable quête afin de disposer d’un modèle numérique qui tienne compte de tous les détails avant cette mission.

Fiche technique

Maîtrise d’ouvrage : Etablissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris.

Diagnostic : Philippe Villeneuve (Mandataire), Covalence (moyens humains et techniques).

Entreprises : Drone constrast (acquisition aérienne), Tognes solution (photogrammétrie), Covalence (scanner et traitement des données), Bestrema (sous-traitant de Covalence), Emma Groust – Atelier Muranese (maîtresse verrière). Budget : NC.

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