Par la capacité à massifier des achats, il semble logique de supposer que l’adhésion à un groupement soit d’abord motivée par des raisons financières. « Parmi les raisons qui m’ont poussé à choisir Batiman lors de la reprise de ma société en 2019, j’ai évidemment choisi le réseau qui m’apparaissait le plus dynamique en tant que centrale d’achats et de référencement », explique Damien Giraud, dirigeant de TLB Menuiseries [aujourd’hui implantée à Mâcon (Saône-et-Loire) et à Péronnas (Ain), réalisant un chiffre d’affaires de 2,45 M€ avec 13 salariés]. « Cela répondait à plusieurs problématiques d’entreprise, dont celle relative à la gestion des achats, c’est-à-dire à la représentativité des fournisseurs et à des conditions d’achat. »
Dynamisme
C’est aussi l’une des motivations qui a incité Sébastien Mufraggi, PDG de Mufraggi Matériaux (4 points de vente, pour un chiffre d’affaires de 12 M€ avec 50 salariés en Corse), à adhérer à France Matériaux (pour les matériaux) et à Batiman (menuiseries) en 2015. « Jusqu’à cette période, nous étions totalement indépendants, sans groupement. Je voulais développer la menuiserie via une enseigne. Après un sondage sur le bassin ajaccien, j’ai opté pour la plus connue. Avant les marges arrière, le critère de choix portait sur la qualité de référencement des fournisseurs, car, tant pour les bonifications de fin d’année (BFA) que pour le référencement, notre taille nécessitait de bénéficier d’un back-office structuré. » Et d’ajouter : « Il en va de même avec France Matériaux, dont le référencement, mais pas uniquement, démontre le dynamisme. »
Emmanuel Chéné, directeur général de Denis Matériaux, résume bien l’enjeu : « Pourquoi adhérer à des réseaux ? Nous pouvons compter 36 points de vente (134 M€ pour 400 salariés) et souhaiter, grâce à un effet de taille avec d’autres adhérents, constituer, notamment en matière de négociations avec les fournisseurs, une alternative face à des nationaux. » Et de citer l’exemple de Tout Faire permettant d’accéder à une plate-forme constituée de 24 M€ de stocks de références, facilitant la constitution de plans de vente, ou encore le Big Market, qui donne aux achats une dimension nationale.

Transparence
Certains distributeurs soulignent également la possibilité, via leur groupement, de bénéficier de l’accès aux conditions de la Centrale Multi-Enseignes Matériaux (CMEM), parfois appelée le « groupement des groupements » et créée en 2007 « dans l’objectif d’accroître le volume des achats auprès des fournisseurs pour obtenir des conditions plus avantageuses ».
Avec près de 700 fournisseurs, 1,3 million d’articles référencés et une part de marché de 25 à 30 % en 2020, on comprend la satisfaction de certains d’être membres d’un groupement lui-même adhérent de CMEM. « N’importe quel adhérent de France Matériaux peut demander des informations auprès des commissions d’achats de CMEM, indique Guillaume Savin, président d’Au Faite Vénissieux, et président du groupement éponyme (sept négoces indépendants). C’est passionnant et très utile. »
Cette approche de la massification va même au-delà, comme le souligne Franck Quaireau, président de Bailly-Quaireau (adhérent d’Eqip et de Sylvalliance) : « Sylvalliance compte peu de membres par rapport à d’autres groupements. En dehors de Woodalliance, où Sylvalliance et Nebopan s’allient sur certaines actions, c’est CMEM qui négocie la plupart des contrats. Être adhérent de Sylvalliance, c’est bénéficier d’une puissance d’achat tout en gardant son indépendance. »

L’adhésion à un groupement peut aussi permettre d’y référencer de nouveaux fournisseurs. « Lorsqu’un industriel vient me solliciter, je peux remonter l’information au groupement, car l’un comme l’autre ont intérêt que les achats soient réalisés sur des volumes importants », note Franck Quaireau.
Pour autant, CMEM n’est pas la panacée. Si Jean-Marc Moreno, président de Moreno Matériaux and Co, considère le volet fournisseurs important, il a préféré ne pas intégrer un groupement lui-même adhérent de CMEM, considérant que ce super-groupement « n’a pas de réalité de terrain » : « Ce qui m’a incité à choisir BigMat, c’est sa décision de sortir de CMEM [NDLR : fin 2019] et de créer sa propre centrale intégrée. Nous en avons perçu les avantages de suite : unifier notre ERP, faciliter la remontée d’informations et le pilotage de la base de données, à la fois en termes de produits et dans la descente de la tarification. »
Opacité or not opacité ?
Pour autant, certains revendiquent une certaine opacité. « Sur les négociations de BFA ou de référencement, il y a des informations confidentielles
à ne pas mettre sur la place publique, indique un distributeur à Négoce. C’est parce qu’on n’est pas transparent qu’on peut améliorer les conditions de bonifications. Il suffit d’observer la sortie de BigMat de CMEM pour s’en convaincre. Si nous voulons aboutir aux meilleures conditions d’achat et de BFA, elles ne doivent pas être diffusées. »
Présidente du groupe Trapy (adhérent d’Algorel), Karine Simon, ne semble pas partager cet avis : « La transparence financière est aussi un critère d’adhésion. Quand le groupement reverse 100 % des BFA, tout est clair et nous ne nous posons pas de questions. »

Et même si le volet financier paraît névralgique, tous n’en sont pas convaincus. « Seulement 20 % des adhérents priorisent cet aspect, estime même Guillaume Sauvin. Si j’avais fait ce choix, j’aurais opté pour un autre groupement et une économie de… quelques milliers d’euros ». Le pilier financier peut justifier l’adhésion à un groupement, mais n’est plus une fin en soi.