Les contrats de performance énergétique montent en puissance

Les premiers chiffres de l’Observatoire des CPE révèlent un début de popularité de ces contrats dans les secteurs du tertiaire municipal, du résidentiel et des bâtiments d’enseignement. La clé de cet engouement naissant ? La promesse d’une performance mesurée et garantie.

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La garantie de performance énergétique, un engagement de résultat

Ce n’est qu’un échantillon. Mais il permet déjà de dessiner des tendances. L’Observatoire des contrats de performance énergétique (OCPE), lancé en mai 2016 par le CSTB, l’Ademe et le Cerema, a récolté des données sur près de 250 contrats en cours (1). Pour l’essentiel (86%), il s’agit de projets publics, plus facile à repérer - grâce aux publications d’avis - que les opérations privées. Les premiers chiffres ont été dévoilés le 20 juin à Paris par les trois organismes.

La garantie de performance énergétique au coeur du contrat

Pour Olivier Ortega, avocat associé du cabinet LPA-CGR et auteur d’un rapport au gouvernement sur les CPE en 2011 qui a posé le cadre de ces contrats nouveaux, l’existence de cet Observatoire est une bonne nouvelle en soi : « C’était la première préconisation de mon rapport ! ». Il rappelle que peuvent être conçus trois grands types de CPE. « Les CPE fournitures et services, portant sur les systèmes de gestion énergétique de l’immeuble et qui s’autofinancent en trois à cinq ans, ou sur les équipements de production/distribution/consommation d’énergie, qui s’autofinancent en dix à douze ans. Et les CPE avec travaux, ou les CPE globaux, qui ne sont pas autofinançables mais relèvent d’une approche patrimoniale pour le propriétaire ».

Autre élément essentiel à se remémorer, le CPE repose sur une garantie de performance énergétique (GPE), qui constitue une véritable obligation de résultat, sur des performances mesurées grâce à un protocole (voir Focus ci-dessous). Quant aux véhicules juridiques, ils sont divers, résume Olivier Ortega : « Les acteurs publics ont commencé par le modèle le plus compliqué au début des années 2010, celui du contrat de partenariat de performance énergétique ! Contrat qui est d’ailleurs en coma végétal depuis deux ans mais pourrait bien redémarrer. Mais ils peuvent aussi recourir au marché public classique, ou au marché global de performance énergétique [qui remplace depuis avril 2016 les CREM et les REM] ». Pour le secteur privé, des contrats de fournitures et services ou de travaux sont utilisés.

Des freins à lever pour le secteur privé

Même s’ils sont pour l’essentiel hors radar de l’Observatoire des CPE, ces contrats  se développent aussi dans le secteur privé, aux dires des professionnels. Quelques copropriétés se sont ainsi lancées, et le secteur de la grande distribution en serait friand également. Mais pour Frédéric Bougrain (économiste au CSTB), divers freins restent à lever pour faire véritablement décoller les CPE privés : la méconnaissance du dispositif, la difficulté à avoir une vision à long terme et à bien connaître la situation de référence des biens immobiliers, le manque de temps et de moyens pour exercer un contrôle efficace de la performance… En outre, dans le cas des foncières, le montage de CPE travaux est complexe dans la mesure où ce sont les propriétaires qui payent les investissements, et les locataires qui s’acquittent des factures d’énergie et de contrats de maintenance.
« Pour que le CPE prenne, il faudra assurer un accompagnement efficace des dirigeants dans le choix des investissements, des outils contractuels pré-rédigés et faciles à comprendre, et des dispositifs financiers pertinents », conclut l’économiste.

L'Auvergne-Rhône-Alpes, championne des CPE

Les chiffres de l’Observatoire traduisent tout d’abord une évolution en flèche du nombre de CPE avec travaux ou CPE globaux depuis 2012. Quant aux secteurs qui ont le plus fait l’objet de CPE, se détachent nettement le tertiaire municipal mixte (64 contrats sur 242 observés), le résidentiel (62) et les bâtiments d’enseignement, collèges et lycées surtout (50). Sur le plan géographique, l’Auvergne-Rhône-Alpes se distingue : 30 % des CPE recensés ont été signés dans cette zone (19% en Ile-de-France, 9% en Occitanie, etc.). Elle doit ce statut de champion notamment au fort investissement de la Région et à la création d’une SPL d’efficacité énergétique, baptisée Oser.

Autre enseignement intéressant, concernant le montage juridique des projets : si les contrats de partenariat ont essuyé les plâtres du CPE comme l’indiquait Olivier Ortega, ce sont les marchés publics de performance énergétique qui dominent aujourd’hui. Et « plus de la moitié de ces CPE porte sur des durées comprises entre cinq et dix ans », précisent les rapporteurs de l’OCPE, ajoutant qu’un "grand nombre de projets a été lancé dans le cadre d’un dialogue compétitif, procédure qui semble aujourd’hui  bien maîtrisée par les donneurs d’ordre publics".

Enfin, du côté de la performance énergétique, il apparaît que les contrats couplant investissements sur le bâti et les systèmes affichent des objectifs contractuels plus élevés (39 % d’économies d’énergie en moyenne) que ceux portant seulement sur les systèmes (20 %), et des temps de retour sur investissement plus longs. « Mais, note l’Observatoire, ces contrats ne sont jamais lancés dans une seule logique de performance énergétique ; ils traduisent aussi la volonté de lutter contre l’obsolescence des bâtiments et de maintenir leur valeur patrimoniale ou locative ».

Le coup de pouce du décret tertiaire

« Aujourd’hui, souligne Nicolas Doré, adjoint au chef de service Bâtiment de l’Ademe, le CPE est plutôt réservé aux maîtres d’ouvrage importants. L’enjeu désormais est d’œuvrer pour qu’il soit accessible à tous, jusqu’au propriétaire de maison individuelle ! ». Une évolution récente de la réglementation en tous cas devrait booster ces contrats : il s’agit du décret « tertiaire » du 9 mai 2017, qui impose des objectifs précis de réduction de consommation d’énergie pour environ la moitié du parc tertiaire public et privé français d’ici à 2020. « En pratique, les acteurs auront deux moyens principaux pour atteindre ces objectifs, développe Olivier Ortega. L’annexe dite verte aux baux commerciaux, issue des lois Grenelle, et tombée en sommeil jusque-là parce que bailleurs et locataires ne savaient pas trop quoi y mettre. Et les CPE bien entendu, qui répondent parfaitement aux exigences du décret ». Un bel avenir s’ouvre.

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