La Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) retient comme contraires au droit communautaire les restrictions apportées par un Etat membre à la libre acquisition d'un bien immobilier. Tel est l'enseignement de l'arrêt de la Cour du 5 mars 2002, «Reisch», et des conclusions de l'avocat général M. L.A. Geelhoed, présentées le 20 novembre 2001.
La Cour de justice a examiné la compatibilité d'une procédure autrichienne de déclaration/autorisation en matière d'acquisition de terrains à bâtir, avec le principe de libre circulation des capitaux.
La réglementation en cause a pour but de limiter l'implantation de résidences secondaires dans le Land de Salzburg. Partant, elle impose à l'acquéreur d'un terrain à bâtir de produire une déclaration préalable mentionnant notamment l'affectation du bien, soit à sa résidence principale, soit à des fins professionnelles. L'autorité compétente délivre alors une attestation, à moins qu'il n'existe des raisons de douter que le bien reçoive une affectation non conforme à la déclaration. Dans cette dernière hypothèse, est engagée une procédure d'autorisation préalable devant une commission qui vérifie que les conditions de fond liées à l'interdiction de l'affectation à une résidence secondaire sont remplies.
La Cour réaffirme sa volonté d'envisager la validité des procédures nationales d'acquisition des biens immobiliers sous l'angle exclusif des articles 56 et 60 du Traité CE (arrêt du 1er juin 1999, « Konle ») et non pas sous celui de la libre prestation de services, comme l'y invitait l'avocat général dans ses conclusions précitées. Ainsi, si le droit d'acquérir, d'exploiter et d'aliéner des biens immobiliers sur le territoire d'un autre Etat membre constitue le pendant nécessaire de la liberté d'établissement, le juge communautaire retient que ce droit relève dans son exercice concret des mouvements de capitaux.
Procédure d'autorisation préalable disproportionnée
Conformément à un examen désormais classique, la Cour vérifie que la procédure nationale de déclaration/autorisation en cause, qui constitue, par son objet même, une restriction à l'acquisition de biens immobiliers (arrêt «Konle», précité), poursuit de manière non discriminatoire un objectif d'intérêt général dans le respect du principe de proportionnalité. Si la Cour admet sans réserve, d'une part, l'existence d'un objectif d'intérêt général tenant à l'aménagement du territoire et à la protection de l'environnement, et, d'autre part, le respect du principe de non-discrimination, elle sanctionne le caractère disproportionné de la procédure d'autorisation préalable, qu'elle déduit de l'existence de mesures moins contraignantes permettant d'atteindre l'objectif recherché, à savoir la possibilité de contrôle a posteriori tenant à l'existence de sanctions pénales ainsi que d'une action en nullité. Elle retient également comme circonstance aggravante le pouvoir discrétionnaire des autorités lors de l'engagement et du déroulement de la procédure d'autorisation qui, ouverte sur simples présomptions, prévoit la possibilité d'exiger de l'acquéreur la constitution d'une garantie pouvant s'élever à la valeur du bien. En conséquence, la procédure d'autorisation préalable est considérée comme contraire à la libre circulation des capitaux.
Arrêts publiés sur le site www.curia.eu.int