Au sein de la marbrerie Ravit, créée en 1836 à Livron-sur-Drôme (Drôme), devenir Meilleur Ouvrier de France devient presque une habitude. Après Régis en 1976, son fils Georges en 1994 - dirigeant actuel de l’entreprise de 4 salariés - c’est au tour de la fille de ce dernier de décrocher le précieux titre dans la catégorie « travaux marbriers ». Le 20 juin, Marguerite Weber-Ravit, 37 ans, dans l’entreprise depuis 15 ans, a été ainsi déclarée lauréate MOF, devenant même la première femme dans cette catégorie depuis la création du concours national en 1929 : « C’est la reconnaissance d’une passion au quotidien, de tout le travail réalisé depuis 15 ans, de la transmission que j’ai reçue », confie la lauréate 2023. Une reconnaissance à plus d’un titre puisque la fille de Georges Ravit n’est jamais passée par une école en marbrerie : « J’ai une formation d’architecte d’intérieur et j’ai appris au quotidien, dans l’atelier, aux côtés de mes parents, ajoute Marguerite Weber-Ravit. Mon parcours me permet d’avoir une vue d’ensemble, de la conception des plans jusqu’à la réalisation. Ce titre est le résultat de la transmission du savoir-faire familial que j’ai reçu ».
Un piédestal de 1,18 m de hauteur
L’épreuve du concours 2023 consistait en la réalisation imposée d’un piédestal évase de 1,18 m de hauteur avec un support quadrangulaire en forme de fût carré allant en s’amincissant de haut en bas, avec pour seule liberté le choix - restreint - des couleurs. De nombreux compléments étaient également exigés, allant du dossier d’exécution à la maîtrise de la géométrie descriptive, en passant par l’établissement de l’ordre chronologique des opérations d’usinage et de mise en oeuvre sur chantier. Avec quatre candidats lors de l’épreuve, puis 3 à l’oral, Marguerite Weber-Ravit a franchi toutes les étapes : « J’ai réalisé l’ouvrage en 210 heures, soit 5 mois de travail et à l’oral, j’ai expliqué mon travail, répondant à de multiples questions techniques permettant de vérifier l’investissement personnel sur ce travail ». Celle qui pose fièrement avec son piédestal de marbre blanc de Carrare, de marbre grand antique d’Aubert et de marbre rouge de Vitrolles, souhaite que cette reconnaissance ait à la fois un impact pour l’entreprise familiale et pour la profession.
Redécouverte du métier
Pour l’entreprise familiale, en espérant que ce titre permettra de décrocher le label EPV (Entreprise du patrimoine Vivant) et de faire partie du groupement professionnel Ateliers d’Art de France. Cette visibilité soudaine est aussi une aubaine pour le secteur : « J’espère que ce titre facilitera la redécouverte du métier, notamment auprès des jeunes. Je veux leur dire que le travail de marbrier n’est pas plus pénible qu’un autre, mais qu’il demande un travail de précision, de minute et de rigueur au quotidien ». Avec son frère François-Régis rentré récemment, Marguerite Weber-Ravit est la huitième génération familiale au sein de la marbrerie, celle qui prendra, dans quelques années, les rênes de l’entreprise au moment de la transmission. D’ici là, en septembre prochain, elle sera, avec les 143 lauréats MOF, reçue par Emmanuel Macron, à l’Elysée. Marguerite Weber-Ravit, qui aime notamment créer des sculptures, aura peut-être le loisir de s'arrêter devant le vestibule d’honneur pour admirer la sculpture monumentale en marbre blanc intitulée Hommage à la Révolution de 1789, commandé, en son temps, par François Mitterrand.