QUESTION La « théorie des sujétions imprévues » s'applique dans les marchés de travaux publics lorsque l'entrepreneur se heurte, au cours de l'exécution des travaux, à des difficultés techniques non imputables aux parties et présentant un caractère imprévu et exceptionnel. Il en découle normalement que des difficultés exceptionnelles mais normalement prévisibles n'ouvrent pas droit à indemnité.
Ce principe s'applique-t-il encore dans le cas où l'ouvrage projeté met en oeuvre des choix technologiques nouveaux qui rendent cette prévision plus difficile ?
REPONSE Oui. Le Conseil d'Etat a jugé, à propos du marché du pont de Brotonne, « ...que les difficultés exceptionnelles rencontrées dans l'exécution d'un grand ouvrage n'ouvrent pas droit à l'application de la théorie des sujétions imprévues si elles étaient prévisibles lors de la conclusion du marché et qu'il en va ainsi même lorsque le caractère novateur des choix technologiques retenus rend cette prévision plus difficile ». La décision relève par ailleurs que les difficultés exceptionnelles rencontrées trouvaient leur origine dans des choix technologiques proposés par l'entreprise.
COMMENTAIRE Cette solution est conforme à la ligne générale de la jurisprudence antérieure. Mais, appliquée à un ouvrage caractérisé par le recours à une technologie d'avant garde, elle marque que la part de risque et d'aléa liée à un tel choix doit être délibérément assumée et ne peut ensuite nourrir l'argumentaire d'une demande d'indemnité au titre de la théorie des sujétions imprévues.