Nexity : un plan social en 2024 pour rebondir «dès 2025»

Après le gel des embauches et le non-remplacement des départs, le numéro un français de la promotion immobilière passe à la vitesse supérieure pour réduire sa masse salariale. Objectif : « améliorer la profitabilité dès 2025 ».

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Le siège parisien de Nexity.
Le siège parisien de Nexity.

« Le marché recule de 40% en deux ans et nous de 30%. Il faut en tirer des conséquences sur les effectifs et la taille de l’entreprise », a lancé Véronique Bédague, en conférence de presse le 29 février.

La P-DG de Nexity fait référence à l’annonce, la veille, dans le communiqué relatif aux résultats annuels, d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) dont l’objectif vise à « améliorer la profitabilité dès 2025 », peut-on lire. D’où « la suspension », cette année, du versement du dividende pour « partager l’effort » entre force de travail et actionnaires, justifie la dirigeante.

« Cette déclaration d’intention s’inscrit dans la politique lancée en 2022 de gel des embauches et de non-remplacement des départs à la suite de ruptures conventionnelles ou de licenciements individuels », estime Laurent Alcini, délégué syndical CGT.

En 2023, le groupe a procédé à 179 ruptures conventionnelles et à 110 licenciements au sein de son pôle promotion-construction, selon Emmanuel Brie, délégué syndical CFDT chez Nexity. Des chiffres que Jean-Claude Bassien n’a ni confirmé ni infirmé.

Réduire encore la masse salariale

L’impératif de réduire encore la masse salariale s’explique par la crise de la demande depuis « l’automne 2022 », rappelle Véronique Bédague. Mais alors pourquoi avoir attendu si longtemps ? « Dans notre environnement chaotique » qui suppose de prendre le temps d’étudier toutes les options, Jean-Claude Bassien, directeur général délégué, estime que février 2024 est « le bon moment » pour annoncer un PSE car le groupe dispose enfin « des éléments à présenter aux organisations syndicales, aux salariés, aux clients et au marché » en vue du « rebond qui viendra ».

Et Véronique Bédague d’ajouter : « Un PSE est un dispositif protecteur et très respectueux des salariés. Celui-ci a été demandé par les organisations syndicales. »

« C’est un raccourci, réagit Laurent Alcini. Nous n’avons jamais demandé de PSE. Nous alertons la direction depuis deux ans sur la forte hausse des procédures individuelles, dans lesquelles les collègues ne sont pas toujours accompagnés. Avec le PSE, les personnes concernées seront prises au sérieux. Il y aura un minimum d’empathie. »

« Au moins 250 licenciements »

Les négociations entre direction et représentants des salariés doivent s’ouvrir en avril. « Au nom du risque de délit d’entrave, la direction ne nous donne pas le nombre de personnes concernées. Imaginez le niveau de stress des collègues. Ils vont se dire : "ce sera moi ou un autre ?" Il faut que l’épée de Damoclès tombe le plus rapidement possible, pour la productivité et surtout éviter une explosion des risques psychosociaux. »

Sur les 3100 salariés (contre 3269 au 31 décembre 2022) des différentes marques de promotion-construction du groupe, d’Edouard Denis à Angelotti, « au moins 250 salariés » seront licenciés, anticipe le syndicaliste. Il est « trop tôt » pour chiffrer, même approximativement, le nombre de licenciements dans le cadre de ce PSE dont le coût ne peut être estimé, répond de son côté Jean-Claude Bassien.

Le logement demeure la jambe forte de Nexity

Cette situation découle évidemment des résultats de l’exercice 2023. Le leader national du résidentiel a vendu 14 602 logements, en baisse de 19% sur un an. A titre de comparaison, le marché est en contraction de 26%. Jusque 2022, Nexity a visé un objectif à terme de 20 000 réservations par an. Il n’en est plus question sur fond de crise du logement.

« Les ventes au détail chutent de 41% par rapport à 2022, en raison principalement de la désolvabilisation des clients particuliers liée à la hausse significative et durable des taux d’intérêt et la baisse de rendement implicite pour les investisseurs particuliers. La part des ventes aux investisseurs particuliers et accédants représentent respectivement 21% et 12%, des points bas jamais enregistrés », souligne Nexity.

Les ventes en bloc représentent 67% des réservations totales en 2023 (+13%), tirée notamment par les logement intermédiaires, qui ont plus que doublé en un an pour atteindre un point haut à 16%.

Le numéro un français dans la catégorie tertiaire a enregistré 39M€ de prises de commande en immobilier d’entreprise en 2023, dans un marché également en crise en raison notamment de la suroffre de bureaux, en particulier en Ile-de-France.

Côté services, Nexity déclare à fin 2023 un taux d’occupation de 96% dans ses espaces de coworking et de 97% au sein de ses résidences étudiantes.

Le groupe a réalisé l’an passé un CA global de 4,27Mds€, en recul de 9% par rapport à 2022. Le logement, son cœur de métier, a généré 3,39Mds€ (-13%) et l’immobilier d’entreprise, 380M€ (+21%). Comme d’autres promoteurs cotés, Nexity déclare en outre un taux de marge en baisse, à 5,7%.

Alerte sur « les faillites des entreprises pendant le chantier »

En cette nouvelle année de crise du logement, Véronique Bédague voit « quelques lumières au bout du tunnel ». A commencer par les taux d’intérêt des crédits immobiliers qui commencent à reculer. « On peut s’attendre à une baisse globale de 1% entre 2023 et 2024, soit un gain de 10% de pouvoir d’achat pour nos clients » particuliers, espère-t-elle.

2024 sera aussi l’année « des premiers dépôts de permis » de régénération urbaine à grande échelle grâce à son partenariat avec Carrefour portant sur 69 terrains à densifier, se félicite-t-elle. A la clé, « 12 000 logements » au sein de « programmes mixtes ».

Au niveau politique, Véronique Bédague sent que « le ton a changé » au sein du gouvernement. Et dresse « le même constat » que Guillaume Kasbarian, le nouveau ministre du Logement, « sur la crise de l’offre et de la demande ». Mais l’inquiétude persiste sur « les faillites des entreprises pendant le chantier, car une fois qu’il y a faillite, il est difficile d’en retrouver », alerte-t-elle, sans donner de chiffres.

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