Ce procès emblématique des dérives du financement des partis politiques par les entreprises dans les années 90 s'est ouvert lundi en début d'après-midi avec 47 prévenus devant le tribunal correctionnel de Paris.
Les prévenus, dont l'ancien président du Conseil régional, Michel Giraud (RPR), et l'ex-directeur de cabinet de Jacques Chirac à la mairie de Paris, Michel Roussin, vont devoir s'expliquer sur cette vaste fraude concertée mise en place pour financer les partis politiques, de droite mais aussi de gauche, une première dans ce genre d'affaires.
Visages fermés, vêtus pour Michel Roussin d'un costume bleu sombre et pour Michel Giraud d'un costume noir, les deux hommes ont dû se frayer un chemin jusqu'à la salle d'audience au milieu d'une nuée de journalistes, sans faire aucun commentaire.
Tranchant avec cette attitude, l'ancienne trésorière occulte du RPR Louise-Yvonne Casetta, également poursuivie dans ce dossier, est arrivée tout sourire. L'ancien président du Parti républicain (PR) Gérard Longuet, lui aussi renvoyé devant les juges, est également arrivé sourire aux lèvres, se déclarant "tranquille" sur l'issue de ce procès.
Les déclarations de Michel Roussin sont particulièrement attendues car il a opposé un mutisme total aux juges d'instruction qui ont conduit l'enquête.
Les ex-trésoriers - officiels ou présumés - des partis, Louise-Yvonne Casetta (RPR), Jean-Pierre Thomas (PR) et Gérard Peybernès (PS) ainsi que l'ancien président du PR, Gérard Longuet, l'ancien ministre des Sports (RPR) Guy Drut sont également poursuivis aux côtés de nombreux dirigeants ou cadres d'entreprises du BTP d'alors (GTM, Bouygues Bâtiment, Fougerolles, Dumez...)
Tous ont pris place, ainsi que les dizaines d'avocats qui les assistent, dans la salle des criées du palais de justice, caractérisée par sa disposition en arc de cercle.
Après un appel de la vingtaine de témoins cités au dossier, le président du tribunal Jean-Louis Kantor devait démarrer l'interrogatoire de personnalité des prévenus dans ce dossier "où tout le monde se connaît plus ou moins", a-t-il lancé en ouvrant les débats.
Selon l'enquête, l'attribution des marchés publics de construction et de rénovation des lycées franciliens était subordonnée au versement par les entreprises d'une "prime" de 2% du montant des commandes: 1,2% au RPR à partager avec le Parti républicain, 0,8% au Parti socialiste.
Dans cette région, la plus riche de France, les sommes en jeu étaient colossales : près de 12 milliards de F (1,83 md EUR) de marchés auraient été attribués aux principales entreprises du BTP entre 1990 et 1995 tandis que les partis auraient reçu dans le même temps près de 200 millions de F de dons, selon un expert judiciaire.
Ce procès fleuve devant la 11ème chambre du tribunal doit se poursuivre jusqu'à début juillet à raison de trois audiences par semaine.
Avec AFP