Etape clé, la réception est notamment le point de départ de la responsabilité décennale des constructeurs. La question de sa validité est donc fréquemment soulevée devant les tribunaux – il est ici question de réception expresse, la réception pouvant par ailleurs être tacite ou judiciaire.
Pour être valide, la réception doit être prononcée « de façon contradictoire », c’est-à-dire en présence du constructeur, ou celui-ci ayant été dûment appelé, souligne Marine Venin lors des rencontres organisées à Bordeaux autour des problématiques de l’assurance construction le 25 mai dernier. « Il s’agit d’un acte unilatéral, comme énoncé par l’article 1792-6 du Code civil. Ce n’est donc pas en refusant de signer le PV de réception qu’une entreprise pourra s’opposer aux réserves formulées », explique l’avocate (citant l’arrêt Cass. 3e civ., 4 novembre 2008, n° 07-18104). Cependant, une telle absence de signature privera le maître d’ouvrage d’un moyen de prouver le respect du contradictoire.
Article 1792-6 du Code civil :
« La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. [...] »
Preuves du caractère contradictoire
Le PV signé est en effet la forme de preuve d’une réception contradictoire la plus évidente, elle est à privilégier (Cass. 3e civ., 21 juin 2000, n° 98-21630).
A défaut, quelles autres formes la jurisprudence admet-elle ? « Peuvent attester du respect du contradictoire la convocation du constructeur aux opérations de réception (Cass. 3e civ., 3 juin 2015, n° 14-17744, Bull.), l’envoi préalable d’une télécopie doublée d’une LR/AR (Cass. 3e civ. 7 mars 2019, n° 18-12221, Bull.), ou encore la preuve de la présence du constructeur aux opérations de réception (Cass. 3e civ., 12 janvier 2011, n° 09-70262, Bull.)», liste Marine Venin.
A noter que dans une affaire jugée en 2005, la Cour de cassation a retenu l’existence d’une « réception tacite contradictoire avec réserves » dès lors que les conditions d'une réception tacite étaient réunies et que le PV avait été transmis à l’entrepreneur qui a refusé de le signer (Cass. 3e civ., 24 mai 2005, n° 04-13820).
Sanctions en cas de non-respect du contradictoire
Lorsque le caractère contradictoire de la réception n’aura pas pu être établi, « le PV de réception est invalide, et il est impossible de solliciter les garanties d’assurance obligatoires », explique Marine Venin.
Enfin, l’avocate rappelle que la réception tacite ne peut être un plan B : autrement dit, « il n’est pas possible de contourner la sanction du non-respect du contradictoire en invoquant la réception tacite ». Ainsi a jugé la Cour (Cass. 3e civ., 20 octobre 2021, n° 20-20428, Bull.) dans une espèce où le constructeur n’avait pas été convoqué à la réception expresse.