Refonte du régime de l’étude d’impact

La loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010 a été l’occasion d’une réforme importante du régime de l’étude d’impact. Les principales nouveautés concernent l’accès du public, la simplification des textes, l’extension du champ d’application et le renforcement du contrôle de l’administration.

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Le champ d’application de l’étude d’impact est-il étendu ?

Oui. L’ étend singulièrement le champ de l’étude d’impact à tout projet, public ou privé, qui par sa nature, ses dimensions ou sa localisation est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine, élevant au passage le volet sanitaire au rang législatif. L’ (C. env.) prévoit que les projets seront soumis à étude d’impact selon des seuils et critères à définir par décret ; tout en réservant à l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement (le ministre en charge de l’environnement, le conseil général de l’environnement et du développement durable, le préfet de région ou le préfet coordonnateur) la possibilité de basculer par un « examen au cas par cas » un projet donné, a priori non soumis à l’étude d’impact, dans le champ de cette étude.

L’éligibilité des projets à l’étude d’impact devra de toute façon être appréciée en fonction des données visées à l’annexe III de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985, à laquelle le texte renvoie expressément. Le seuil financier auparavant applicable (1,9 million d’euros) disparaît.

En pratique, concernant les projets a priori non soumis à étude d’impact, il reviendra au maître d’ouvrage - sous réserve des conditions fixées par voie réglementaire - de fournir spontanément les informations visées à l’annexe III précitée, s’il existe un doute sur l’éligibilité de son projet (L. 122-1-III C. env.). En l’état, le projet de décret prévoit une liste des travaux, ouvrages et aménagements relevant de la procédure d’examen « au cas par cas » et quelques modalités liées au contenu de la demande et à la procédure de consultation. Quant aux projets non expressément visés au titre de l’examen au cas par cas, le maître d’ouvrage devra considérer qu’aucun projet ne peut être soustrait d’office des procédures prévues par la directive 85/337/CEE ( CJCE, 23 nov. 2006, « Commission c./Italie », aff. C-486/04, JOCE 331, 30 déc. 2006, p. 6). Ce principe invite le maître d’ouvrage, s’il craint une contestation des tiers, à établir automatiquement une étude d’impact en vue de sécuriser son projet.

Quel est le nouveau contenu de l’étude d’impact ?

L’ renvoie au futur décret le soin de préciser l’exact contenu de l’étude d’impact dont il fixe les nouvelles lignes directrices.

L’étude devra contenir, au minimum, une description du projet, une analyse de l’état initial de la zone susceptible d’être affectée et de son environnement, l’étude des effets du projet sur l’environnement ou la santé humaine, y compris les effets cumulés avec d’autres projets connus, les mesures proportionnées envisagées pour éviter, réduire et, lorsque cela est possible, compenser les effets négatifs notables du projet sur l’environnement ou la santé humaine, ainsi qu’une présentation des principales modalités de suivi de ces mesures et du suivi de leurs effets sur l’environnement ou la santé humaine, généralisant ainsi un volet auparavant réservé à certains types de projets (installations classées, projets miniers, etc.).

L’étude d’impact devra également esquisser les principales solutions de substitution qui ont été examinées par le maître d’ouvrage et indiquer les principales raisons de son choix.

Pour les infrastructures de transport, elle comprend toujours le même contenu : analyse des coûts collectifs des pollutions et nuisances et des avantages induits pour la collectivité, et évaluation des consommations énergétiques résultant de l’exploitation du projet, notamment du fait des déplacements qu’elle entraîne ou permet d’éviter.

Enfin, les études d’impact devront prévoir un résumé non technique devant faciliter leur prise de connaissance par le public.

Tous les projets relevant de l’étude d’impact sont-ils systématiquement soumis à une procédure de consultation du public ?

Oui. A côté des projets soumis à enquête publique, la généralise la procédure de mise à disposition de l’étude d’impact auprès du public (art. L. 122-1-1 C. env.). Il s’agit d’une procédure simplifiée, sans débat ni médiateur.

Cette procédure impose au pétitionnaire ou maître d’ouvrage de mettre à disposition du public, préalablement à toute décision d’autorisation, d’approbation ou d’exécution, l’étude elle-même, la demande d’autorisation éventuelle, l’indication des autorités compétentes pour prendre la décision et, lorsqu’ils sont obligatoires, les avis émis par une autorité administrative sur le projet. Sous réserve de dispositions réglementaires plus précises, les modalités de la mise à disposition sont définies par l’autorité compétente pour prendre la décision, et doivent être connues au moins huit jours avant par le public. La consultation elle-même ne peut être inférieure à quinze jours.

L’information générale du public est-elle renforcée ?

Hormis les règles précédemment évoquées, la renforce les informations à porter à la connaissance du public au moment de la décision. L’ prévoit que, sans préjudice des règles en matière d’expropriation ou de motivation des déclarations d’utilité publique ou de projet, l’autorité compétente livre au public les informations suivantes, à défaut de dispositions plus précises : teneur et motifs de la décision ; conditions dont celle-ci est assortie ; mesures destinées à éviter, réduire et compenser les effets notables du projet sur l’environnement ou la santé humaine ; informations sur le processus de participation du public ; lieux où l’étude d’impact est consultable.

Quel est le sort réservé aux programmes réalisés en plusieurs tranches ?

La règle reste inchangée : il y aura autant d’études que de phases à l’opération, et ce indépendamment du fait qu’il y ait un ou plusieurs maîtres d’ouvrage. La procédure de « cadrage préalable » examinée ci-dessous (article L. 122-1-2 C. env.) pourra être utilement sollicitée en cas de pluralité de maîtres d’ouvrage eu égard à la nécessité d’avoir une analyse d’ensemble du projet. Le programme est expressément défini par son « unité fonctionnelle ».

Les pétitionnaires et maîtres d’ouvrage pourront-ils demander à l’autorité compétente de préciser le contenu de l’étude d’impact ?

Oui. L’article L. 122-1-2 du C. env. , reprenant l’ancien article R. 122-2, a pour objet de garantir au pétitionnaire ou au maître d’ouvrage qu’il pourra désormais solliciter l’autorité compétente pour obtenir un avis sur le degré de précision des informations à fournir dans l’étude d’impact. L’avis indique notamment le degré de précision de ces informations ainsi que les zonages, schémas et inventaires relatifs au lieu du projet. Pour prendre la décision, l’autorité compétente doit, dans ce cadre, consulter l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement. En l’état du projet de décret, l’avis devra préciser les informations permettant d’ajuster le contenu de l’étude d’impact à la sensibilité des milieux et aux impacts potentiels, ainsi que les autres projets connus avec lesquels les effets cumulés doivent être étudiés et les guides méthodologiques existants.

Quels sont les nouveaux contrôles exercés par l’administration ?

L’étude d’impact est désormais contrôlée par l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement, consultée pour avis dans le cadre de tout projet relevant de l’étude d’impact ainsi qu’à travers la procédure d’examen « au cas par cas » (). L’avis émis dans ce second cas de figure est important, car il déterminera si le projet relève du champ de l’étude.

D’autre part, un dispositif nouveau de sanctions administratives est mis en place (art. à C. env.). En vertu de l’, certaines décisions prises pour autoriser ou approuver le projet devront préciser les mesures destinées à éviter, réduire, et, lorsque cela est possible, compenser les effets négatifs notables dudit projet sur l’environnement ou la santé humaine. Désormais, des agents assermentés ou habilités peuvent effectuer des contrôles sur l’application de ces mesures, à tout moment, en visitant notamment les lieux concernés. Ils établissent alors un rapport constatant les manquements. Celui-ci est aussitôt transmis à l’autorité administrative ayant délivré la décision qui, à son tour, met en demeure la personne intéressée dans un délai déterminé. En cas d’inexécution, diverses sanctions s’appliquent : consignation d’une somme entre les mains d’un comptable public, exécution d’office des travaux ou suspension du projet. Indépendamment de ces sanctions, les frais de la procédure de contrôle sont mis à la charge du pétitionnaire ou du maître d’ouvrage. A noter : si un manquement est constaté par un agent, l’autorité administrative compétente est tenue de délivrer la mise en demeure susvisée.

Quelles sont les nouvelles règles applicables aux décisions administratives autorisant la réalisation des projets soumis à étude d’impact ?

Dans le droit fil de l’article 8 de la directive 85/337/CEE et de l’article 6, point 8 de la convention d’Aarhus du 25 juin 1998, l’ prévoit que la décision de l’autorité compétente autorisant le pétitionnaire ou le maître d’ouvrage à réaliser le projet doit prendre en considération l’étude d’impact, l’avis de l’autorité administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement et le résultat de la consultation du public. En pratique, cela signifie que la décision doit refléter le contenu de l’étude et la consultation du public, notamment aux termes de ses visas.

Quelles sont les conditions d’entrée en vigueur du nouveau régime ?

Le nouveau dispositif entrera en vigueur dans un délai de six mois à compter de la publication du décret d’application (visé à l’). La date de référence pour le pétitionnaire ou maître d’ouvrage est la date de dépôt du dossier de demande d’autorisation, d’approbation ou d’exécution. Lorsqu’il s’agit de projets pour lesquels l’autorité compétente est le maître d’ouvrage lui-même, la date de référence est celle de l’enquête publique.

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