Sols pollués : 50 propositions pour « assumer ses responsabilités, réparer les erreurs du passé et penser durablement l’avenir »

Après six mois de travaux, 34 auditions, tables rondes et deux déplacements, les sénateurs viennent de rendre public leur rapport d’information sur les pollutions industrielles et minières des sols. Objectif : refonder la politique de gestion des sites et sols pollués. Pour les parlementaires, cela doit passer entre autres par la création d’une véritable législation protectrice des sols, l’amélioration de l’information du public et la mobilisation des friches industrielles et minières dans une démarche d'aménagement durable.

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Sols pollués
Les Sénateurs appellent à un véritable droit de la protection des sols.

« La pollution des sols ne peut pas être réduite à des problèmes territoriaux circonscrits, elle exige une mobilisation nationale ». C’est en ces termes que la sénatrice Gisèle Jourda (Socialiste et Républicain – Aude) a présenté ce 10 septembre 2020 le rapport d’information sur les « pollutions industrielles et minières des sols : assumer ses responsabilités, réparer les erreurs du passé et penser durablement l’avenir ».

Le parent pauvre de la législation

Caractérisée par une riche histoire industrielle et minière, la France compte plus de 320 000 anciens sites d’activités industrielles ou de services, et près de 3 000 anciens sites miniers. Or, en dépit de son impact sur la santé et l’environnement, la pollution des sols est insuffisamment prise en compte dans notre législation, regrettent les sénateurs.

« À la différence de l’air ou de l’eau, des biens naturels communs dont la protection a donné lieu à un arsenal juridique très sophistiqué, les sols sont restés le parent pauvre de la législation aux niveaux européen et national », souligne le président de la commission d’enquête Laurent Lafon (Union Centriste – Val de Marne). « Or, s’ils sont trop souvent envisagés comme un bien exploitable soumis au droit de la propriété, les sols n’en restent pas moins une ressource naturelle qui n’est pas indéfiniment renouvelable et qu’il nous faut protéger. »

Poser les jalons d’un véritable droit des sols

Pour y parvenir, les sénateurs proposent de poser les jalons d’un véritable droit des sols européen et national en relançant le processus d’élaboration d’une directive européenne sur la protection des sols. Ils souhaitent aussi introduire dans le Code de l’environnement une définition législative de la pollution des sols, à l’instar de ce qui existe pour l’air et l’eau. Et clarifier et harmoniser les notions d’ « usage », de « réhabilitation » et de « remise en état ».

La commission juge aussi indispensable d’améliorer la qualité de l’information sur les sites et sols pollués, jugée trop technique et peu lisible. Pour Gisèle Jourda, l’information du public en la matière doit devenir un « droit fondamental ». Plusieurs pistes sont émises dont l’obligation pour toute personne physique ayant participé à la réalisation d’un diagnostic de sol ou d’une opération d’aménagement et de construction et ayant connaissance d’une pollution des eaux ou du sol sur un site à en informer le préfet et le maire.

50 M€ pour achever l’inventaire des établissements sensibles

Autre proposition : faire réaliser, par les maîtres d’ouvrage de projets de construction d’établissements accueillant des enfants et adolescents, un diagnostic des sols préventif. Lequel devra être soutenu financièrement par l’Etat.

Et pour combler les « trous dans la raquette de notre système de surveillance », les sénateurs appellent à débloquer une enveloppe de 50 millions d’euros pour achever l’inventaire et le diagnostic des sols des établissements sensibles situés sur des sites pollués, dont les établissements scolaires. Ils veulent aussi renforcer l’obligation annuelle de révision des secteurs d’information sur les sols (SIS), le cas échéant en portant ces mesures au niveau législatif.

Par ailleurs, la commission souhaite reconnaître aux collectivités compétentes en matière d’urbanisme, un droit d’initiative pour délimiter ces SIS sur leur territoire lorsqu’ils ont connaissance de pollutions. En contrepartie seraient prévues « des possibilités accrues de financement et d’aménagement pour les sites ainsi inscrits en SIS ».

Lever les contraintes à la reconversion des friches

Sur la question des friches enfin, les auteurs du rapport pointent une double contrainte à leur reconversion : les coûts de dépollution d’une part, qui peuvent parfois dépasser la valeur foncière du site, et d’autre part, des techniques de dépollution peu vertueuses, consistant par exemple à envoyer les terres excavées à l’étranger. La commission estime donc indispensable de faciliter la valorisation des terres excavées et se dit favorable à l’assouplissement des conditions de sortie de statut du déchet de ces terres.

Elle propose aussi d’instituer des mécanismes d’incitations fiscales pour orienter la demande vers des techniques plus respectueuses de l’environnement et pour encourager les travaux de dépollution des sites.

Mais la mesure emblématique du rapport est la création d’un fonds national dédié au financement de la réhabilitation des sites et sols pollués. Géré par l’Ademe et d’un montant de 75 millions d’euros minimum, il prendrait en charge la dépollution de sites « orphelins » et viendrait en aide aux propriétaires - essentiellement les collectivités territoriales - qui n’ont pas la capacité financière suffisante pour prendre en charge l’intégralité des coûts de la dépollution des terrains dont elles sont propriétaires.

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