Pour se conformer aux objectifs de réduction des émissions de CO2 du groupe Eiffage(1), son usine de construction métallique de Lauterbourg (Bas-Rhin) se tourne vers l’Europe du Nord. Le site a signé, ce 22 septembre dans ses locaux, un « accord de partenariat » avec l’aciériste SSAB, par lequel ce groupe suédois(2) devient son fournisseur pionnier en acier bas carbone. « SSAB possède une avance technologique en la matière », relève Boris Azimi, directeur général France d’Eiffage Métal pour justifier le choix de cet acteur parmi les divers sidérurgistes auprès duquel l’usine s’approvisionne… et qui sont ainsi, implicitement, invités à opérer le même mouvement.
Les volumes concernés, non précisés car évolutifs, porteront, pour commencer, sur des gammes alternatives aux procédés en hauts-fourneaux consommateurs de coke et de minerai de fer. Dans un premier temps, il s’agira de tôles laminées en Suède et Finlande à partir de brames (les semi-produits) sorties d’un four électrique de ferrailles recyclées aux Etats-Unis, et estampillées « zéro carbone » ou presque. Leurs émissions mesurées se limitent en effet à 0,05 kilos de CO2 par kilo d’acier produit, « soit 75 % de moins que les produits issus des hauts-fourneaux », argumente Huy Nguyen, directeur commercial Europe du Sud de SSAB. D’autres solutions promises encore plus vertueuses pourront s’ajouter au fil du temps, en particulier une qui recourt à l’hydrogène d’origine d’électricité renouvelable. SSAB en a lancé, en Suède, une unité pilote, tremplin vers une usine avec une visée de 1,3 million de tonnes en 2028 puis du double (2,7 millions de tonnes annuelles) à partir de 2030.
Lauterbourg amorce ainsi un partenariat qui pourrait s’étendre au sein de l’appareil industriel d’Eiffage Métal, constitué de neuf usines en Europe pour un effectif de 13 200 salariés et un chiffre d’affaires de 1,4 milliard d’euros.

Au service de la croissance dans le nucléaire
Sur le site alsacien de 250 salariés, les domaines d’application de l’acier « vert » venu du grand Nord correspondent aux pôles de croissance du moment. Son utilisation n’est pas particulièrement escomptée en charpente, mais davantage pour « les ouvrages d’art et les pièces de très grande dimension destinées au secteur énergétique », expose Boris Azimi.
Or, ce dernier débouché est celui qui « tire » aujourd’hui l’usine alsacienne vers l’avant. Elle confectionne de nombreux ensembles induits par les commandes qu’Eiffage a engrangées auprès du groupe EDF au titre de la relance du parc nucléaire, en France en premier lieu – « liners » (peaux étanches) des bâtiments réacteurs des deux tranches d’EPR à Penly en Seine-Maritime, supports de générateurs de vapeur, échangeurs, etc. - et à l’étranger, comme à Sizewell en Grande-Bretagne.
L’usine de Lauterbourg engage un investissement de 10 millions d’euros pour faire monter en volume et en qualification ses prestations dans l’énergie, le nucléaire en particulier. « Celui-ci devrait représenter, à partir de mi-2027, les deux tiers de nos heures de travail », souligne le directeur de l’usine, Lionel Bogner.
(1) -30 % en 2030 sur le Scope 3, celui des émissions d’origine externe ici concernées ;
(2) d’un effectif de 15 000 salariés pour une capacité de production cumulée de 8,8 millions de tonnes et un chiffre d’affaires 2024 de 103 milliards de couronnes suédoises soit 9,4 milliards d’euros.