En 2012, trois ingénieurs Français en robotique se sont lancés la mission de faire marcher les personnes paraplégiques et même tétraparétiques. Un engagement qui leur tenait d’autant plus à cœur que le frère de Nicolas Simon et le fils de Jean-Louis Constanza, deux des trois fondateurs, ont perdu l’usage de leurs jambes des suites d’une maladie.
Ils ont donc travaillé au développement d’un exosquelette à destination du secteur médical pour aider les patients à retrouver de la mobilité. Baptisé Atalante X, la solution a été marquée CE en 2019. « Actuellement, 120 exosquelettes sont en opération dont 80 en France, tandis que les autres ont été livrés aux Etats-Unis ou dans d’autres marchés européens », précise Jean-Louis Constanza.
Ils ont ensuite conçu une version plus agile permettant aux personnes tétraparétiques de marcher dans la rue, des terrains plus exigeants que les hôpitaux. « Notre nouveau exosquelette Eve est actuellement en fin d’étude clinique aux Etats-Unis car nous avons fait le choix de nous concentrer d’abord sur l’obtention de l’approbation de la FDA [agence gouvernementale américaine spécialisée dans l’encadrement de la commercialisation des produits alimentaires et médicaux, NDLR] », poursuit le co-fondateur.
Outre-Atlantique, certains exosquelettes motorisés, dont le modèle Atalante X, sont remboursés car considérés comme des dispositifs médicaux de classe II (code PHL) qui répondent à des enjeux de santé publique. « Il faut savoir que les tissus du corps humain des personnes en fauteuil roulant se dégradent plus vite, ce qui leur fait perdre de l’espérance de vie et leur système cardio-vasculaire s’affaiblit. En outre, elles sont sujettes au développement d’escarres en étant assis en permanence, ce qui entraîne des complications médicales », détaille encore M. Constanza.

De l’exosquelette à l’humanoïde
Si l’autorisation est bien délivrée comme l’espère Wandercraft, la société envisage un lancement commercial d’Eve courant 2026 aux Etats-Unis puis dans d’autres pays.
En parallèle, l’entreprise s’intéresse également, depuis un an, à robotiser certaines tâches industrielles à travers le déploiement d’humanoïdes. « La robotique humanoïde est vraiment le point de départ de tous nos développements. Notre idée initiale était, non pas de créer une machine qui aide les jambes à bouger, mais de concevoir un robot humanoïde dans lequel les personnes embarquent pour retrouver la marche », reprend le co-fondateur. « Nous avons ainsi été la première entreprise du monde à commercialiser un humanoïde avec notre exosquelette. Certes, il ne ne possédait pas encore de bras mais il compilait déjà toutes les caractéristiques de cette innovation, en particulier sa plateforme de moteur électronique et ses logiciels de contrôle. ».
Récemment, Wandercraft a donc mis au point son premier humanoïde autonome, Calvin-40, baptisé ainsi en référence à l’héroïne de l’écrivain américain Isaac Asimov et parce qu’il a fallu 40 jours à l’entreprise pour le développer.
Plus d’humain du tout cette fois. Le robot est actuellement testé sur des pilotes réels, reproduisant des tâches de la chaîne de production, dans la Refactory de Flins (Yvelines) du constructeur automobile Renault, qui a pris en juin dernier une participation minoritaire au capital de Wandercraft. « Contrairement aux exosquelettes, les volumes de ventes plus conséquents pressentis des humanoïdes impliquent d’acquérir une capacité de production industrielle à la mesure de ce que maîtrisent les constructeurs automobiles », commente Jean-Louis Constanza.
Calvin-40 est entraîné pour effectuer un nombre de tâches pénibles ne pouvant pas être automatisées aujourd’hui. « Aux points de jonctions des processus automatisés en usine, il reste des tâches difficiles telles que transporter un pneumatique d’environ 14 kg d’un point à un autre ou visser des vis sous le châssis d’un véhicule qui est en train d’avancer sur la ligne de production continue par exemple », précise-t-il encore.

Le BTP, un secteur à robotiser
Ces expérimentations vont permettre à l’entreprise de valider le produit. Outre l’industrie manufacturière, Wandercraft envisage aussi de proposer ses humanoïdes à des acteurs de la construction. « La construction est un secteur intéressant pour nous. De nombreuses tâches pénibles y sont robotisables, à mon sens », se projette l’entrepreneur.
La troisième version de Calvin-40, dont la commercialisation pourrait intervenir courant 2026, s’adressera ainsi également à des manufacturiers du BTP, comme des fabricants d’engins de chantier par exemple.
Par ailleurs, l’entreprise est en discussion avec un groupe de construction pour adapter sa solution à différents cas d’usages d’applications intérieures ou extérieures du BTP comme les travaux de finition dans le bâtiment. « Poser des plaques de placo ou le ragréage sont des tâches assez accessibles à un robot », imagine encore le co-fondateur qui entrevoit aussi la possibilité d’un déploiement des humanoïdes sur des chantiers de travaux routiers pour manipuler les équipements professionnels d’outillage comme des pilonneuses, des plaques vibrantes de compactage ou des marteaux-piqueurs.