Alerte rouge sur le logement neuf. La Fédération française du bâtiment (FFB) s’attend en 2023 à un effondrement de 21,3% des permis de construire (+3,1% en 2022) et un repli de 8,6% des mises en chantier (-1,9%). La faute, notamment, à la RE 2020 : « Le surcoût de 8 à 10% pour la maison individuelle est normal car nous changeons de matériaux et de moyen de production de chauffage. A coûts constants, cela se tassera d’ici 8 ans maximum », illustre Olivier Salleron, le président de la FFB en conférence de presse à Paris le 13 décembre.
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Le bureau résistera en régions
En 2023, le ciel ne sera pas totalement couvert pour le bâtiment. En témoigne la quasi-stagnation annoncée des bureaux, commerces, usines et entrepôts neufs (-0,8%, après +6,6% en 2022). « La baisse des autorisations et des ventes de bureaux en Ile-de-France est compensée par les métropoles régionales, où le marché est porté par les délocalisations et les agrandissements car les open spaces ne sont plus à la mode », explique Olivier Salleron. Le segment des bâtiments administratifs devrait de son côté reculer de 2,5%, les collectivités privilégiant la rénovation du parc existant. Mais au global, la dynamique des permis relevée en 2022 porterait les mises en chantier (+2,7%) et la production (+1,7%) des bâtiments non résidentiels neufs.
L’activité de l’amélioration-entretien devrait croître de 2%, après +2,1% en 2022. Merci à la rénovation énergétique (+2,6%) qui devrait compenser le coup de frein sur les travaux non thermiques, jugés non prioritaires dans un contexte inflationniste accentué par la crise énergétique. « Cette croissance sera tirée par MaPrimeRénov’, un marché des CEE qui s’est redressé, le retour du crédit d’impôt pour la rénovation des locaux des TPE-PME, le plan de rénovation des écoles annoncé par le Président de la République lors des "24 heures du bâtiment" et un contexte plus favorable aux économies d’énergie », résume Olivier Salleron.
Retenant une prévision de croissance de 0,4% du PIB national et un ralentissement de l’inflation annuelle à 4,3%, la FFB table sur une légère progression de 0,7% de la production de bâtiment (+3,7% en 2022).
ZAN : des dérogations pour les villages et la Guyane
Les solutions portées par la fédération sont connues. Sur le crédit : assouplissement des obligations du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) sur le taux d’effort de 35% maximum et la durée d’endettement limitée à 25 ans. L’accession : rétablissement d’une quotité de prêt à taux zéro de 40% dans le neuf en zones B2 et C. La FFB croit également à la réforme du statut du bailleur privé, d’ici 2024. « Nous allons y travailler début janvier avec deux députés (de la majorité, NDLR) qui avaient porté des amendements sur le Pinel, mais aussi avec la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) et la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI) », a confié Olivier Salleron.
La FFB réclame aussi un assouplissement de l’objectif, à horizon 2050, de zéro artificialisation nette (ZAN). Olivier Salleron imagine des dérogations pour les villages, qui ont « besoin d’une maison médicale et de logements pour les médecins et les infirmiers », et les territoires d’Outre-mer. Exemple ? « La Guyane, qui a des besoins énormes, n’a rien à rénover. Il serait incompréhensible de leur dire d’arrêter (d’artificialiser, NDLR). »
Pour stimuler davantage la rénovation énergétique des logements, Olivier Salleron milite pour « une forte majoration » des aides publiques, indexées sur l’inflation annuelle de près de 6%, afin de lever le frein financier. Quid de la « cohérence insuffisante dans l’articulation » des dispositifs nationaux et locaux, dixit la Cour des comptes ? Et que dire du manque de savoir-faire, pointé par Bruno Le Maire qui veut quadrupler le nombre d’entreprises Reconnu Garant de l’Environnement d’ici 2028 ? « Nos entreprises RGE emploient 510 000 salariés. Un artisan réalise 12 rénovations par an ; une TPE, 50 ; une PME, 200 ; une ETI, 2 000, une major, 10 000. Il est donc faux de dire qu’il n’y a pas assez d’entreprises. Nous aurions pu avaler un budget MaPrimeRénov’ de 4Mds€ (au lieu des 2,5Mds€ prévus en 2023, NDLR). Surtout qu’il faut recycler des salariés qui font du neuf. »