Tribune

Dans la tourmente, les promoteurs immobiliers vont se réinventer

Bousculée par la crise du logement, la profession doit dégraisser le mammouth pour mieux rebondir, analyse Ines Trojette, économiste du groupe Ecole supérieure des professions immobilières (ESPI).

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Ines Trojette, économiste du groupe École Supérieure des Professions Immobilières (ESPI).
Ines Trojette, économiste du groupe Ecole supérieure des professions immobilières (ESPI).

En pariant sur des coûts travaux et des prix de sortie élevés, les promoteurs immobiliers sont actuellement engagés dans des opérations où ils perdent de l’argent. Les marges sont négatives, voire très négatives. L’enjeu – vital – est de préserver les honoraires qui servent à payer les salaires. Ajoutez à cela la chute des ventes de logements qui sévit depuis un an et vous obtenez un cocktail explosif.

Politique de rationalisation

Initiée en début d’année, la politique de non-remplacement des départs volontaires ne suffit plus. Depuis la rentrée, la tendance générale est orientée vers des départs provoqués. Chez certains employeurs, les salariés en poste accomplissent deux à trois tâches au lieu d’une.

Il est trop tôt pour chiffrer les pertes d’emploi car la situation économique peut évoluer. Depuis le début d’année, la baisse des effectifs est estimée à environ 10%. Pour 2024, les professionnels anticipent une décrue de 10 à 15%. Une chose est sûre : tous les acteurs sont concernés, qu’ils soient locaux, régionaux ou nationaux.

Les développeurs fonciers menacés

Le développement est gravement touché, à cause de la chute des ventes qui obligent les promoteurs à lever le pied. Les équipes programmes, qui étaient en sureffectif en raison de la rareté de l’offre, sont également concernées. Les commerciaux ressentent également les répercussions de la crise de la demande qui sévit depuis un an.

Les métiers techniques et les fonctions de support semblent moins touchés, car ils restent indispensables. Les mises en chantier étant repoussées, le volume d’opérations en cours tend à décroître. Cela risque d’entrainer une baisse des effectifs chez les opérationnels.

Des opportunités de rachat

En 2024, il est probable que des opportunités de rachat entre promoteurs se généralisent, permettant une croissance externe pour les groupes ayant une gestion saine et disposant de trésorerie. 

Les rachats à venir pourraient se concentrer sur un savoir-faire spécifique, comme la pierre de taille. D’autres pourraient cibler des parts de marché en phase exploratoire, comme la construction bois et le bas carbone, sur le modèle du groupe Altarea qui a racheté Woodeum en 2023.

Les acquisitions de promoteurs locaux pourraient ne pas être opportuns. Les villes moyennes et les marchés provinciaux sont quasiment à l’arrêt actuellement.

De financier à technicien

En plein retournement de marché, c’est également le moment de réinventer la profession en termes de procédés constructifs et de performances énergétiques, afin de parvenir à construire de manière plus durable et moins coûteuse.

Le promoteur doit ainsi passer de commercial ou financier à ingénieur ou technicien. L’industrie automobile s’est réinventée en moins de dix ans en adoptant massivement la technologie électrique. La promotion immobilière, aux structures plus légères, est en mesure de relever le défi.

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