Interpellé par les grands patrons pour le manque d’efficacité dans la politique énergétique, le directeur de cabinet adjoint du Commissaire européen à l’Énergie a saisi l’occasion de l’ouverture de la sixième édition d’Enerpresse Forum, qui se tenait les 27 et 28 juin à Deauville, pour leur répondre. Le fond du débat porte « sur la mise en place progressive d’un marché européen de l’énergie, avec le décloisonnement des marchés nationaux pour les interconnexions de gaz et d’électricité notamment, le couplage des marchés et l’ouverture progressive à la concurrence », a exposé Éric Mamer, conseiller du Commissaire Günther Oettinger.
Echecs et réussites
Au « triple échec » européen dénoncé par Gérard Mestrallet, Éric Mamer a opposé trois accomplissements. Une concurrence accrue sur un marché de la fourniture ouvert qui porte ses fruits, comme l’illustre « le courrier d’Electrabel annonçant une diminution de 10 % de la facture électrique » qu’ont reçu ses clients. Une évolution du prix de gros contrôlée à 3,4 %, dont le « consommateur final ne se rend pas forcément compte du résultat », déplore Éric Mamer. Enfin, un affaiblissement du joug de Gazprom, et de facto de l’ascendant de Moscou sur la partie orientale de l’UE, plus connectée et dépendante au système russe qu’au réseau de ses partenaires européens. Pour cela, le conseiller se félicite du développement des flux gaziers de l’Ouest vers l’Est européen.
Le politique bruxellois ne se leurre pas non plus : « il reste beaucoup à faire. D’une part les interconnections entre États membres sont insuffisantes ». D’où l’adoption par l’UE du « paquet infrastructures ». Celui-ci vise à identifier des projets d’intérêt communs européen qui bénéficieront à des procédures accélérées, voire d’un soutien financier pour ceux « qui n’auraient pas une valeur commerciale immédiate ». Le travail se poursuit sur les règlements techniques des réseaux de gaz et d’électricité comme sur la régulation des prix.
Côté climat, Éric Mamer s’est montré satisfait de la baisse des émissions carbone depuis 1990, avant de rappeler que « jusqu’à présent la croissance en renouvelable a été bonne, mais c’était la partie la plus facile. La pente va devenir de plus en plus ardue si nous voulons atteindre les 20% ».
Maintenir une politique énergétique commune
Il a mis en avant l’inadéquation des systèmes de soutien, avec les risques inhérents d’effet d’aubaine et de distorsion de marché. La Commission devrait publier « très prochainement » des orientations sur l’évolution des systèmes de soutien, aux énergies renouvelables. La même question se pose sur les marchés de capacités, sur lesquels les États ont une perspective strictement nationale pour la réponse à la pointe. Ce que déplore l’intervenant : « Nous pensons que cela peut mener à une refragmentation du marché européen de l’énergie, alors même que nos systèmes sont de plus en plus interconnectés ».
Un document sur les marchés de capacité sera publié cet été. Il va donner « une autre vision de la bonne approche de cette question afin d’améliorer la coopération entre États membres, et non pas surréagir au problème », a annoncé Éric Mamer. À la fin de l’année, sortent des normes pour l’exploration et l’exploitation des gaz et huile de schiste, avec toujours un dernier mot aux capitales pour décider d’y aller ou pas.