Environnement : le coup de pouce législatif pour faciliter l'éolien en mer

Panorama des mesures phares de la loi EnR pour encourager les parcs situés au large des côtes.

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Le parc éolien en mer de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) a été mis en service en novembre 2022, plus de dix ans après son attribution. C'est le premier des sept projets lauréats des appels d'offres lancés par l'Etat devant permettre d'atteindre les objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Le rythme de déploiement de l'éolien en mer constitue un enjeu fort au regard des objectifs de production d'énergies renouvelables (EnR), qui vont croissant tant au niveau européen que national. Ainsi, le 30 mars, l'Union européenne a approuvé un accord doublant leur part (de 22 à 42,5 %) dans notre consommation finale d'énergie d'ici à 2030. En parallèle, l'Etat français et la filière éolienne ont signé, le 14 mars, un « pacte éolien en mer » afin d'atteindre 40 GW en 2050.

Atteindre ce rythme de déploiement nécessite d'accélérer l'ensemble des étapes de développement d'un parc éolien en mer, de l'identification des zones jusqu'à sa mise en service. C'est dans ce contexte que s'inscrit la relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite « loi EnR ».

Planification spatiale précisée

Traditionnellement, la planification de l'espace maritime prend la forme d'un document stratégique de façade (DSF) avec lequel les projets éoliens en mer doivent être compatibles (). L'article 56 de la loi EnR précise le contenu de ce DSF en modifiant l'article L. 219-5-1 dudit code. Désormais, le DSF établit pour chacune des quatre façades maritimes une cartographie des « zones maritimes et terrestres prioritaires » pour l'implantation d'installations éoliennes en mer et leurs ouvrages de raccordement au réseau public.

Ces zones sont établies sur une période de dix ans à compter de la publication du DSF. Toutefois, la cartographie peut être revue en dehors des périodes de révision du DSF, qui a lieu tous les six ans (). Les ministres chargés de l'énergie et de la mer doivent alors saisir conjointement la Commission nationale du débat public (CNDP) qui détermine les modalités de la participation du public.

Zone économique exclusive. La cartographie cible « en priorité » des zones situées dans la zone économique exclusive (ZEE), en dehors des parcs nationaux et « en prenant en compte l'objectif de préservation et de reconquête de la biodiversité, en particulier des aires marines protégées ». Rappelons qu'une ZEE est une zone située au-delà de la mer territoriale (cette dernière allant jusqu'à 12 milles marins) et adjacente à celle-ci et qui ne peut s'étendre au-delà de 200 milles marins.

La cartographie doit également définir des « zones prioritaires pour le développement de l'éolien en mer » à l'horizon 2050, qui pourront être revues lors de la révision de la cartographie après l'échéance de la période de dix ans.

La publication de la première cartographie doit intervenir en 2024. Une fois les zonages identifiés, le ministre chargé de l'énergie peut demander au gestionnaire du réseau public de transport d'électricité (RTE) d'engager par anticipation les études et les travaux pour le raccordement d'installations éoliennes en mer. La Commission de régulation de l'énergie (CRE) veille alors à la pertinence technique et économique des investissements envisagés par RTE (art. 31).

Participation du public renforcée

Selon l', lorsque le ministre chargé de l'énergie souhaite lancer une ou plusieurs procédures de mise en concurrence pour des projets éoliens en mer, il doit au préalable saisir la CNDP qui est notamment consultée sur le choix de la localisation de la ou des zones potentielles d'implantation des installations envisagées. L'article 56 de la loi prévoit à cet égard que la CNDP invite les « collectivités territoriales littorales » situées sur la façade maritime à moins de 100 kilomètres des zones d'implantation des parcs éoliens ainsi que le Conseil national de la mer et des littoraux (CNML) à formuler un avis sur le choix de la localisation. En outre, les ministres chargés de l'énergie et de la mer peuvent saisir conjointement la CNDP afin que la procédure de participation du public réalisée dans le cadre des projets éoliens en mer soit menée en commun avec celle effectuée pour les DSF.

Cet article 56 augmente par ailleurs de trois ans le délai dans lequel les procédures de mise en concurrence peuvent être lancées à compter de la publication du bilan de la participation du public (débat public ou concertation préalable). Ce délai est désormais de dix ans (contre sept ans antérieurement). Il est cohérent avec le délai de validité de dix ans de la cartographie des « zones maritimes et terrestres prioritaires ».

Appels d'offres accélérés

L'article 58 de la loi EnR ajoute un article L. 311-10-3 au Code de l'énergie selon lequel, dans le cadre des appels d'offres relatifs aux projets éoliens en mer, « l'Etat réalise les études techniques et environnementales nécessaires à l'élaboration des projets par les candidats et à la réalisation de l'étude d'impact ». Il peut même engager ces études, par anticipation, en vue du lancement de ces appels d'offres. La loi permet ainsi d'avancer dans le temps la réalisation des études préalables nécessaires aux procédures de mise en concurrence, afin de raccourcir les délais globaux de développement des parcs éoliens en mer et de faciliter le travail des porteurs de projet. Cela n'empêche pas les acteurs de continuer à s'interroger sur la répartition des missions entre l'Etat et le lauréat d'appel d'offres en termes de réalisation des études mais aussi d'obtention des autorisations et de suivi d'éventuels recours contre les projets.

D'autres sujets relatifs aux appels d'offres - non abordés par la loi EnR - soulèvent en outre des interrogations au sein de la filière. Il en est ainsi de l'accélération de la procédure de dialogue concurrentiel, du maintien d'un soutien financier de l'Etat, ou encore de la possibilité pour l'Etat d'attribuer, par allotissement, plusieurs projets éoliens en mer situés sur une même façade maritime à un même opérateur.

Régime des autorisations simplifié

Pour mémoire, les projets éoliens situés en mer territoriale sont principalement soumis à une autorisation environnementale et à une concession d'utilisation du domaine public maritime (CUDPM). La loi EnR a précisé le régime juridique des projets situés en tout ou partie en ZEE. Ainsi, pour les projets réalisés en partie en mer territoriale et en partie en ZEE, c'est le régime applicable en mer territoriale qui s'applique. Les CUDPM valent autorisation d'implantation pour la partie située en ZEE (art. 59).

Par ailleurs, la loi vise à simplifier le raccordement des parcs éoliens en mer situés en ZEE (art. 61) : ce dernier est soumis à une CUDPM pour leur partie en mer territoriale et à une « autorisation unique » pour leur partie en ZEE (). La loi EnR inclut désormais l'arrêté d'approbation de la CUDPM et cette « autorisation unique » dans l'autorisation environnementale prévue à l'. Un tel régime peut toutefois être perçu comme insuffisant dans la mesure où l'autorisation environnementale n'inclut pas l'« autorisation unique » précitée concernant l'implantation et l'exploitation des éoliennes en ZEE.

Enfin, parmi les autres mesures de la loi, citons celle relative au nouveau pouvoir de régularisation du juge dans le contentieux de l'éolien en mer (nouvel ).

En définitive, même si la loi EnR comporte de réelles avancées, la filière rappelle la nécessité de sa mise en application rapide pour aboutir à une réelle accélération des projets. La consultation menée au printemps par le ministère de la Transition écologique sur les moyens permettant d'y aboutir en faisant évoluer les procédures d'attribution du soutien public des projets va dans le bon sens.

Ce qu'il faut retenir

  • La loi EnR du 10 mars 2023 prévoit toute une palette de mesures visant à faciliter le déploiement des parcs éoliens en mer.
  • En matière de planification, le document stratégique de façade (DSF) devra établir, pour chaque façade maritime, une cartographie des zones maritimes et terrestres prioritaires pour l'installation des parcs et leurs ouvrages de raccordement.
  • La loi prévoit que la procédure de participation du public réalisée dans le cadre des procédures de mise en concurrence pour des projets éoliens en mer soit menée en commun avec celle réalisée dans le cadre du DSF.
  • L'Etat pourra dorénavant réaliser les études techniques et environnementales nécessaires à l'élaboration des projets. La loi tend à simplifier le raccordement des parcs situés en zone économique exclusive.
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